Comportement et pronostic des tumeurs mammaires - La Semaine Vétérinaire n° 1727 du 08/07/2017
La Semaine Vétérinaire n° 1727 du 08/07/2017

CONFÉRENCE

PRATIQUE CANINE

Formation

Auteur(s) : LAURENT MASSON 

La plupart des tumeurs mammaires sont malignes chez la chienne et chez la chatte. Les dysplasies sont reconnues comme des stades précancéreux. Au moment du diagnostic, l’âge moyen des chiennes et des chattes se situe respectivement entre 8 et 10 ans et entre 10 et 12 ans. Les facteurs de risque prédisposants sont l’appartenance à certaines races (siamois, par exemple), le fait d’être de pure race, l’obésité et l’administration de progestatifs à long terme. Le nombre de portées, l’âge à la première d’entre elles ou des pseudogestations multiples sont des facteurs sans influence. Enfin, l’ovariectomie précoce semble un facteur protecteur chez la chatte comme chez la chienne. Cependant, toutes les études cherchant à mettre en évidence une relation entre l’âge au moment de la stérilisation et l’apparition de tumeurs souffrent d’un niveau de biais modéré à élevé. Le niveau de preuve de l’influence de l’ovariectomie sur la réduction du risque de tumeurs mammaires canines est donc faible.

Signes cliniques

Au moment de la consultation, l’animal présente le plus souvent un bon état général, même lors de volumineuses masses. Un œdème local, des zones nécrosées et des ulcérations cutanées peuvent compliquer la gêne liée au volume de la tumeur ou à sa localisation.

Les mamelles les plus souvent affectées sont les abdominales caudales et inguinales chez la chienne, et les thoraciques chez la chatte.

Le potentiel métastatique des tumeurs malignes est très élevé (93 % chez la chienne) : nœuds lymphatiques, axillaires et/ou inguinaux, mamelles controlatérales, carcinomatose cutanée, extension à distance (80 % dans le thorax, mais aussi dans le foie, la rate, les reins, les surrénales, le cerveau et les os). La progression du cancer conduit à des signes systémiques et fonctionnels selon l’organe infiltré, voire à des syndromes paranéoplasiques. L’évolution se fait vers une asthénie, une anorexie, une défaillance multiorganique et la mort.

Examens complémentaires

Plus de la moitié des chiennes développent plusieurs tumeurs mammaires simultanément, pas toujours de même nature. En outre, il n’est pas possible de distinguer avec certitude les formes bénignes des malignes sur la seule base du tableau clinique.

L’analyse histologique sur la masse entière est le gold standard, mais elle n’est réalisable qu’après la chirurgie. La cytoponction ou la biopsie présentent une sensibilité faible (63 % et 65 %) : en l’absence de cellules cancéreuses, une tumeur maligne ne peut être exclue. En revanche, la cytologie est plus intéressante dans l’exploration des nœuds lymphatiques et lors de carcinomatose inflammatoire, car ces lésions sont beaucoup plus homogènes. D’autres moyens de diagnostic préopératoire sont en cours d’étude, mais ne sont pas utilisables en routine actuellement. Une échographie abdominale, des radiographies thoracique et du squelette, des scanners thoracique et cérébral peuvent compléter le bilan d’extension.

Facteurs pronostiques

Annoncer un pronostic est la principale problématique. Pour cela, il convient de se fonder sur des facteurs pronostiques cliniques (taille, extension, la présence d’adhérence ou d’ulcération) et histopathologiques (type, grade, emboles). Le pronostic d’une tumeur de moins de 3 cm est d’environ 21 mois, contre 14 mois si elle dépasse 5 cm. Lorsque la tumeur mesure plus de 5 cm chez la chienne et 3 cm chez la chatte, ou en cas de présence de métastases locorégionales ou à distance, le taux de survie à 2 ans et la médiane de survie diminuent significativement (tableaux).

Selon les données histologiques

Chez la chienne, le type histologique fait partie des facteurs pronostiques identifiés. La durée de survie globale médiane est de l’ordre de quelques semaines pour le carcinome mammaire inflammatoire, de 2 mois et demi pour le carcinome anaplasique, de 14 mois pour un carcinome complexe, de 16 mois pour le carcinome solide, de 21 mois pour le carcinome tubulopapillaire et de 3 ans et demi pour le carcinome in situ. Il est donc important de différencier ce dernier des carcinomes invasifs, grâce à la mesure de l’expression du marqueur immunohistochimique P63. Chez la chienne et chez la chatte, la médiane de survie globale est deux fois plus longue lors de carcinome in situ par rapport à un carcinome invasif sans embole (1 241 versus 696 jours chez la chienne et 999 jours versus 496 jours chez la chatte).

Selon le grade histologique (scoring) du carcinome, le taux de survie à 2 ans passe de 100 à 53,3, puis à 13,5 % respectivement lors de grades I, II et III chez la chienne, pour laquelle la densité microvasculaire élevée augmente le risque de récidive locale. Chez le chat, un index mitotique faible (moins de deux mitoses par champ) est associé à une espérance de vie plus longue.

Selon les marqueurs immunohistochimiques

Chez le chien comme chez le chat, peu d’études ont établi un lien avéré entre l’expression de marqueurs immunohistochimiques et le pronostic des tumeurs mammaires. Cependant, une faible expression des récepteurs hormonaux aux œstrogènes et à la progestérone chez la chienne est corrélée à un pronostic plus péjoratif. Une expression élevée du marqueur Ki-67 semble associée à une augmentation du risque d’extension métastatique et à une faible durée de survie sans récidive ou globale. L’infiltration lymphocytaire (> 600 lymphocytes en huit champs à l’immersion) est associée à une faible durée de survie. Enfin, plus la Cox-2 est exprimée dans les tumeurs mammaires canines, plus le pronostic est péjoratif.

La présence de récepteurs aux androgènes améliore le pronostic chez la chatte triple négatif (pas d’expression de récepteurs aux œstrogènes, à la progestérone et à la protéine HER2).

Anne Gogny Diplomate Ecar, praticienne hospitalière en reproduction des animaux de compagnie à Oniris, à Nantes (Loire-Atlantique). Article rédigé d’après des présentations faites au congrès de l’Afvac à Lille (Nord), en novembre 2016.

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