DOSSIER
Auteur(s) : STÉPHANIE PADIOLLEAU
Le marketing dans la vie quotidienne du vétérinaire : une évidence ! Mais pas de panique, il ne s’agit pas de transformer des cliniciens en vendeurs d’aspirateurs, quoique… Le développement de l’activité vétérinaire, ou son maintien, impose parfois de concevoir des offres qui s’écartent de l’urgentisme historique. Cette évolution peut alors s’inspirer des méthodes élaborées en marketing, quitte à changer la sémantique pour mieux valoriser (vendre) le savoir-faire vétérinaire !
Segmentation, marketing mix, “7P”, benchmark : que de mots inhabituels dans le vocabulaire vétérinaire ! Sans renier la pratique clinique, il est parfois nécessaire, dans la vie d’une structure vétérinaire, d’évoluer, de développer des offres de service ou des consultations spécialisées. C’est aussi un moyen de s’écarter d’une pratique subie, centrée sur l’urgentisme et donc dans l’attente du client, pour s’orienter vers une pratique proactive, qui va au-devant des besoins de sa clientèle. Dans ces cas-là, pourquoi se priver d’outils et de techniques testées et éprouvées ? Le marketing n’est pas réservé qu’à l’industrie ! Et d’abord, de quoi s’agit-il ? Le Larousse définit le marketing comme l’« Ensemble des actions qui ont pour objet de connaître, de prévoir et, éventuellement, de stimuler les besoins des consommateurs à l’égard des biens et des services et d’adapter la production et la commercialisation aux besoins ainsi précisés ». Cette définition indique bien qu’il s’agit d’une démarche en plusieurs étapes, pas si éloignée d’une démarche diagnostique. D’abord l’anamnèse, en quelque sorte, qui consiste à étudier le contexte, c’est le marketing d’étude : analyser la clientèle, ses attentes, ses besoins ; étudier le marché, la concurrence, l’environnement. C’est dans cette phase qu’il pourra être utile de segmenter sa clientèle, de procéder à des études de marché, d’analyser ses forces et ses faiblesses. La deuxième étape est le moment du diagnostic, appelé marketing stratégique, ce moment où vous allez décider de ce que vous voulez et allez faire, en fixant des objectifs à court, moyen et long termes. Ensuite viendra le moment d’agir, comme pour un choix thérapeutique, c’est-à-dire de définir le contour de votre offre, avec le prix, la présentation, la façon de la proposer et la place que vous allez lui donner. En marketing, il s’agit de la phase opérationnelle, définie avec la formule des “4P” ou “7P” (produit, prix, promotion/communication et place/distribution, avec, pour les services, l’ajout du personnel, du processus et des preuves matérielles). Enfin viendra la quatrième et dernière étape, celle du contrôle, durant laquelle il conviendra de vérifier que tout va bien et de corriger si cela ne se passe pas comme prévu. Un impératif : tout consigner par écrit, de l’objectif poursuivi au détail de l’offre, jusqu’à la manière de la présenter en précisant qui fait quoi, c’est le repère auquel toute l’équipe de la structure pourra se référer et qui permettra, au bout d’un laps de temps prédéterminé, de faire le point et de faire évoluer sa pratique.
Une des particularités de l’exercice vétérinaire est sa double casquette de profession de santé, par l’exercice de la médecine, et de société de services, qui propose une activité, un travail, contre rémunération. Le service n’est pas un produit comme les autres. Un produit est concret : il a une forme, une texture, une couleur, une odeur, que le client peut aisément percevoir, il peut être stocké, plus ou moins longtemps, voire revendu. Pour le service, point de tout cela : par définition intangible, il ne peut être touché, stocké, il est indivisible et utilisé, consommé, au moment de sa production. Son appréciation par le client dépend des attentes de celui-ci, de son historique personnel et de sa compréhension globale du contexte et du service. Tout l’art sera alors de donner une apparence concrète, tangible, à un service, et de montrer sa qualité pour que le client puisse juger selon ses propres critères du bénéfice qu’on lui apporte. Ainsi, selon l’offre choisie, des éleveurs seront sensibles au bénéfice en matière de chiffre d’affaires, de volume de lait produit, de diminution des pertes, alors que le propriétaire d’un chien de compagnie sera sensible à des arguments de bien-être, d’esthétisme, ou là aussi de rapport qualité/prix.
Le marketing ne crée pas le besoin, mais du désir. Chaque client ayant des attentes variées, un même service rendu à deux clients aboutira à une prestation différente ou à un bénéfice pour le client différent. Les attentes des clients peuvent s’organiser en plusieurs thèmes :
- éléments techniques : contenu technique, fiabilité, régularité du service, compétences techniques du personnel ;
- éléments fonctionnels : disponibilité du personnel, rapidité de réaction, qualité de la documentation écrite, clarté de la relation entre prestataire et client ;
- éléments financiers : clarté et flexibilité du prix, de la facturation et régularité de celle-ci ;
- éléments relationnels : qualité des relations humaines, aptitude à conseiller, à prendre en compte les réflexions et remarques du client, qualité et moyens de communication ;
- éléments institutionnels : références, image du prestataire, taille de l’équipe dédiée.
On parle de positionnement pour exprimer où l’offre se situe sur le marché, par rapport à la concurrence, mais aussi par rapport aux attentes qu’elle devra satisfaire. Par exemple, mettre en avant l’avantage principal qui sera perçu par le client : dans le cas du développement de l’utilisation du laser, il est possible de proposer le service en insistant sur l’aspect bien-être dans le cas d’animaux arthrosique, ou sur l’absence d’effets secondaires, etc. Un bon positionnement se définit par quatre notions, les “4D” : définir clairement l’offre, se différencier par rapport à la concurrence, dialoguer avec les clients/être à leur écoute, et défendre son produit face à la concurrence. La détermination du prix se fera en fonction de critères de rentabilité pour l’entreprise, d’environnement concurrentiel, mais aussi de qualité et d’image pour le client. Dans un univers fortement concurrentiel, le choix sera fait entre une stratégie de prix économique (le low cost, qui ne peut s’appliquer que pour des services de proximité) ou une stratégie de pénétration (prix d’appel bas pour attirer, qui remonte ensuite). Au contraire, si la concurrence est faible, il sera possible d’appliquer une stratégie dite d’écrémage (tarif élevé pour un service innovant ou une cible étroite) ou d’alignement (prix aligné sur le principal concurrent, pour des services de base avec une cible large).
Une offre de service sera définie selon cinq éléments. Elle devra être, autant que possible, créative ou innovante, c’est-à-dire se différencier des offres concurrentes. Les engagements annoncés, s’ils doivent être tenus, devraient aussi être difficiles à effectuer par les concurrents. Elle doit comporter des processus standardisés pour garantir que le service soit toujours de la même qualité, servir des besoins homogènes, et se fonder sur des éléments connus et existants, qui permettent au client d’évaluer le bénéfice qu’il va en retirer. Un point à ne pas négliger est donc la rédaction des processus internes qui définissent ce que comporte l’offre, et celle des documents qui seront remis au client, ainsi que les supports de communication. À une époque où le visuel et la qualité perçue prennent le pas sur le concret et la qualité réelle, l’interaction avec le client et la documentation qui lui est remise sont primordiales et devront être formalisées. Il sera également utile de s’interroger sur la place du digital et des réseaux sociaux.Le seul savoir-faire ne suffit pas, il faut aussi savoir le vendre. C’est là toute la difficulté rencontrée par les praticiens : vouloir donner envie à ses clients n’est pas une démarche spontanée. Des exemples sont régulièrement proposés au cours des congrès professionnels. Il existe également des formations soit généralistes, soit adaptées à la pratique vétérinaire, par exemple, au sein du diplôme d’école de management vétérinaire proposé à l’École nationale vétérinaire de Toulouse. Il est également possible de recourir à des prestataires externes, qui peuvent être spécialisés dans le milieu vétérinaire pour les praticiens qui ne souhaitent pas s’investir seuls dans la démarche.
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Pour en savoir plus :
- Charles Ditandy et Benoît Meyronin. Du management au marketing des services. Dunod, 2015.
- Christopher Lovelock. Marketing des services. Pearson, 2014.
- Aurélie Tourmente. Conseils marketing pour les vétérinaires. Med’Com, 2016.
- Laurent Lacouture. Clinique Well’com - Communication et mise en avant de sa structure vétérinaire sur Internet. Éditions du Point Vétérinaire, 2016.
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