Vers la formulation d’aliments qui limitent les impacts environnementaux

Une méthode de formulation multiobjectif (FMO) d’éco-aliments pour volailles réduirait les impacts environnementaux de l’alimentation des animaux, conjointement à un surcoût limité.

La formule d’un aliment correspond à un mélange de matières premières (caractérisées par leur composition nutritionnelle et leur prix) en des proportions permettant de satisfaire les besoins de l’animal pour un objectif de production donné. Ce problème est traduit en une fonction mathématique, dont la solution retenue est celle qui minimise le prix de la formule. Dans la FMO, la solution retenue est une combinaison linéaire du prix des matières premières et d’impacts environnementaux : la consommation de phosphore non renouvelable, l’utilisation d’énergie non renouvelable, le changement climatique, l’acidification et l’eutrophisation des systèmes et l’occupation des terres. Les impacts des matières premières ont été calculés par analyse de cycle de vieet proviennent des données Écoalim de la base Agribalyse^®1.

Un éco-aliment, pour diminuer l’impact environnemental

L’utilisation d’un éco-aliment formulé à partir d’une liste de matières premières restreinte à celles qui sont couramment utilisées permet d’améliorer les impacts potentiels des variables “consommation de phosphore” et “changement climatique” de -12 %, et “énergie non renouvelable” de -18 %, sans augmentation significative de l’occupation des terres, pour un surcoût de 3,4 % en moyenne, par rapport à l’aliment de référence (moins de 10 €/t), pour le contexte économique considéré. Dans tous les cas, une augmentation de la part des coproduits de céréales (tourteaux de colza et de tournesol) est nécessaire dans les formules, associée à une diminution des céréales, remplacées par des oléo-protéagineux (colza, tournesol), et à de l’huile de colza remplaçant l’huile de soja.

Toutefois, l’utilisation de matières premières actuellement peu disponibles (sorgho, pois et féverole) améliore encore les impacts environnementaux en limitant le surcoût. Ainsi, les impacts de la consommation de phosphore, du changement climatique, de l’utilisation d’énergie non renouvelable et de l’acidification sont respectivement diminués de 9, 19, 19 et 23 %, pour une augmentation du prix de 2,3 % (moins de 7 €/t).

Un compromis valable pour le produit final

De plus, il apparaît que le compromis économique et environnemental identifié pour l’aliment par la FMO est le même à l’échelle du produit final, à performances animales identiques. Pour cela, les impacts environnementaux de 120 aliments ont été évalués à l’échelle de la tonne de poulet vif en sortie d’élevage (à 36 jours) à l’aide de l’analyse du cycle de vie. Il apparaît que la réduction des impacts à l’échelle de l’aliment réduit les impacts à l’échelle du produit, lorsque les performances des animaux ne sont pas modifiées. La contribution de l’aliment est plus faible sur l’impact acidification que sur les autres indicateurs, car les émissions d’ammoniac des effluents contribuent fortement à cet impact final. De plus, les effets sur le prix sont atténués, car le poste alimentation n’est pas l’unique contributeur aux coûts de production.

Cette méthode de FMO répond ainsi aux objectifs visés concernant les impacts environnementaux Il devient également possible de connaître l’objectif de réduction des impacts nécessaire à l’échelle de l’aliment pour satisfaire un objectif fixé à l’échelle du produit par le cahier des charges (par exemple, pour une réduction de 20 % de l’impact du changement climatique du produit, un éco-aliment réduisant cet impact de 25 % environ doit être formulé).

Toutefois, le surcoût, même s’il est limité, reste un frein. Il doit être réparti entre les acteurs des filières ou répercuté sur le prix de vente du produit, et être consenti par les opérateurs. La FMO se révèle cependant une approche pertinente pour améliorer la durabilité de la filière.
•

¹ Wilfart A., Dauguet S., Tailleur A. et coll. Ecoalim : une base de données des impacts environnementaux des matières premières utilisées en France pour l’alimentation animale. Proceedings JRA-JRFG. 2017;12:361-365.