ENTRETIEN AVEC PIERRE BUISSON
ACTU
Auteur(s) : PROPOS RECUEILLIS PAR TANIT HALFON
Les auxiliaires vétérinaires pourront-elles, en toute légalité, pratiquer certains actes jusqu’à présent réservés aux seuls vétérinaires ? Un travail sur cette question est en cours depuis un an et mobilise toutes les organisations professionnelles vétérinaires. Pierre Buisson, président du SNVEL, nous en explique les enjeux.
La question de la délégation des soins aux assistants s’inscrit-elle dans un contexte d’urgence ?
Nous nous inscrivons davantage dans une démarche d’anticipation face à un contexte qui semble favorable à une évolution des pratiques. Au niveau européen, la délégation des soins existe partiellement dans plusieurs pays, qu’elle repose sur un flou réglementaire ou sur des bases légales. Dans un contexte européen de mobilité professionnelle, comment répondre aux besoins de reconnaissance légitimes du personnel non vétérinaire, qui se retrouve avec une fonction et une rémunération réduites ? En France, ouvrir des perspectives d’évolution plus larges est aussi voulu par ces professionnels. Au niveau national, le gouvernement semble favorable à une ouverture des droits aux professions intermédiaires, avec des professions réglementées qui perdraient leur position historique de monopole, comme en témoigne le rapport de l’Inspection générale des finances de 2013. En pratique, la profession d’auxiliaire spécialisé vétérinaire (ASV) souffre d’un taux de renouvellement important, avec une pyramide des âges qui s’écrase au-delà de 35 ans, ce qui peut, en raison de la perte de ces compétences acquises, freiner le développement des entreprises. Ce contexte, national et européen, a poussé les organisations professionnelles vétérinaires (Afvac, Avef, SNGTV, SNVEL1 et Ordre national) à entamer une réflexion sur la question depuis environ un an.
La profession est-elle favorable à la délégation des soins ?
Selon notre dernier sondage (1 049 questionnaires analysés), une grande majorité des vétérinaires y est favorable. Cette tendance est particulièrement marquée chez les moins de 40 ans (87 % de réponses positives versus 71 % pour les plus de 40 ans). La plupart des vétérinaires attendent que cette évolution des pratiques soit encadrée, via l’établissement d’un contrat de travail spécifique (pas d’indépendants), et par la présence physique obligatoire d’un vétérinaire en exercice dans les locaux. Face à ces résultats, et après un avis favorable des délégués du SNVEL, notre conseil d’administration va poursuivre le travail sur les modalités d’évolution de la législation. Il sera nécessaire de définir par décret les compétences du personnel non vétérinaire et de préciser dans un arrêté la liste des soins dérogatoires. Aujourd’hui, je pense la profession ouverte à une nouvelle organisation du travail. Il me semble que les nouvelles générations, du fait qu’elles sont formées avec et par des auxiliaires sur des gestes techniques de base, n’appréhendent pas cette évolution, ou l’appréhendent moins. De plus, certains actes n’ont plus la même valeur ajoutée qu’avant pour un vétérinaire, par rapport aux processus intellectuels mobilisés par une médecine interne de plus en plus complexe.
En pratique, quelles seraient les nouvelles compétences des ASV ?
Nous envisageons la mise en place d’un certificat de qualification professionnelle (CQP) accessible aux ASV diplômés et associé à une hausse de la rémunération de l’ordre de 2 à 3 %. Les qualifications supplémentaires ne se limiteraient pas aux soins, des compétences spécifiques à la vente ou à l’encadrement pouvant être envisagées. Un autre CQP est en préparation et concerne le conseil en clientèle vétérinaire : développement des ventes, des conseils, du suivi client. En pratique, chacun serait libre d’acquérir un certificat dans son domaine de prédilection, les compétences pouvant être cumulatives, comme la rémunération. L’employeur reste décideur de l’ouverture ou non des postes relevant de ces compétences additionnelles. Côté soins, les dérogations porteraient sur tout ce qui relève des injections et des prélèvements, ainsi que la réalisation de certains actes non médicaux comme la prise de clichés radiographiques ou l’usage des automates d’analyses. Ce travail de définition est réalisé avec l’ensemble des organisations professionnelles. Les conditions d’accès aux formations et les rémunérations sont en cours de négociation avec les centrales syndicales des salariés.
Ne peut-on pas y voir une menace pour les entreprises vétérinaires ?
Cette évolution ne me semble pas révolutionnaire, ni menaçante pour l’équilibre économique des structures vétérinaires. Le changement est organisationnel. En pratique, le salaire d’un tel employé se rapprochera de celui du vétérinaire débutant (convention collective). Chaque établissement sera libre de fixer ses prix par rapport à son plateau technique et humain. Et de toute façon, certaines cliniques rémunèrent déjà à la hausse leurs ASV les plus qualifiés.
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1 Association française des vétérinaires pour animaux de compagnie, Association vétérinaire équine française, Société nationale des groupements techniques vétérinaires, Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral.
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