Les vétérinaires, acteurs majeurs en recherche et santé publique - La Semaine Vétérinaire n° 1745 du 21/12/2017
La Semaine Vétérinaire n° 1745 du 21/12/2017

ACTU

Nous sommes tous fiers d’avoir été étudiants dans une école vétérinaire, mais comment valorisons-nous cette formation par la suite au cours de notre parcours professionnel ?

J’ai consacré ma carrière à la lutte contre le cancer et à la recherche médicale, et je considère qu’avoir été formé comme vétérinaire m’a beaucoup servi.

À l’Académie vétérinaire de France, nous menons une réflexion sur l’importance du vétérinaire dans le domaine de la santé en général. Les écoles nationales vétérinaires et les vétérinaires eux-mêmes doivent prendre en compte le fait qu’ils sont des acteurs clés, non seulement de la santé animale, mais aussi de la santé humaine, dans une vision globale One Health.

Pourquoi sommes-nous impliqués dans la santé globale ?

Les vétérinaires jouent un rôle majeur dans le concept de santé globale One Health : contrôle des zoonoses, prévention de l’antibiorésistance, maladies émergentes, etc. Nous sommes en première ligne, et nous ne le réalisons pas. La profession mérite d’avoir plus d’ambition, car elle a une responsabilité sociale qui dépasse son périmètre réducteur de la seule santé animale. On constate que les vétérinaires ne se valorisent pas très bien, ne communiquent pas suffisamment. Nos écoles sont probablement un peu isolées du monde de la santé globale par leur tutelle principale qu’est le ministère de l’Agriculture. Nos étudiants bénéficieraient certainement d’un lien plus étroit de nos écoles avec des grandes universités pluridisciplinaires par nature. Et très certainement nous enrichirions beaucoup ces dernières.

Un autre exemple du poids du vétérinaire dans la santé : nous effectuons de la pathologie comparée, une exploration intéressante pour laquelle les vétérinaires ont toute légitimité.

Toutefois, si l’on souhaite une formation complémentaire, il faut passer par d’autres structures, les diplômes ne sont pas réalisés dans nos écoles vétérinaires, alors il est nécessaire de s’orienter vers l’université en particulier. Les écoles n’incitent que très peu les étudiants à s’orienter vers les filières recherche alors que de nombreux postes nous sont ouverts et ne sont pas pourvus.

J’estime ainsi que nous avons une responsabilité en tant que vétérinaire à former des étudiants qui pourront contribuer ensuite à la santé humaine dans une vision globale que nos études nous aident à acquérir. Il faut s’assurer que, dans nos écoles, un parcours permette plus facilement aux étudiants de faire autre chose que de la pratique. Il y a d’autres débouchés, en particulier en recherche, qu’elle soit publique ou privée, et, de plus, nous sommes appréciés. Il y a une richesse dans les écoles vétérinaires qui ne profite pas assez au secteur académique de façon plus globale.

Certes, certaines écoles ont pris des initiatives intéressantes, mais elles sont encore limitées. Il est primordial, au niveau national, de pouvoir dire que nous sommes des acteurs incontournables de la santé. Pour cela, nous avons besoin de la pluridisciplinarité que peut nous apporter un rapprochement avec les universités pour les domaines où nous n’avons pas les compétences.

Nous avons la responsabilité vis-à-vis des étudiants de les accompagner pour obtenir des formations complémentaires, pour qu’ils accèdent à des métiers où l’identité vétérinaire sera renforcée.

Faisons en sorte que, grâce à la formation et à la recherche, les vétérinaires prennent une part plus importante dans le domaine de la santé globale.

GILBERT LENOIR (A 68)

préside la première section recherche enseignement de l’Académie vétérinaire de France. Il a mené une carrière de chercheur dans le domaine du cancer, que ce soit au Centre international de recherche sur le cancer (le Circ, à Lyon) de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), à l’Institut Gustave-Roussy, comme directeur de la recherche, ou encore à l’Union internationale contre le cancer (UICC). Il est professeur de génétique médicale à l’université Paris-Sud et à l’origine de la création des Cancéropôles en France et de Cancer campus, un biocluster francilien dédié à l’innovation dans la lutte contre cette maladie.