PROFESSION
ACTU
ÉVÉNEMENT
Auteur(s) : CLARISSE BURGER
La profession devrait continuer à tirer parti d’une demande soutenue, en particulier dans le secteur canin urbain. Par ailleurs, une nouvelle offre de services 2.0 devrait aider les vétérinaires canins ruraux à répondre à une clientèle devenue plus technophile et exigeante, selon le rapport Astarès.
En France, le secteur vétérinaire bénéficie d’une demande dynamique depuis plus de dix ans. Mais tout le monde n’en profite pas de la même manière. L’activité canine en milieu urbain a été dopée par une demande soutenue de soins vétérinaires (pour la période de 2006 à 2016). Le nombre de praticiens pour animaux de compagnie a bondi de 20 % en cinq ans (soit 69 % des effectifs inscrits au tableau de l’Ordre), alors que celui des ruraux (23 % des inscrits à l’Ordre) a baissé de 3 %, compte tenu d’une demande très dépendante des pressions financières du monde agricole.
Pour autant, la demande en santé animale devrait se maintenir, ces dix prochaines années, dans ce secteur d’activité en pleine mutation : les vétérinaires pourront s’appuyer sur de nouveaux outils digitaux (applications numériques pour les propriétaires, objets connectés, intelligence artificielle pour l’analyse de données, robots, etc.) pour exercer et innover en matière de services. « À l’instar de la médecine humaine, la médecine animale du futur sera, grâce à ces innovations et aux initiatives des vétérinaires, plus prédictive, préventive, personnalisée et participative » : c’est ce que souligne le dernier rapport du cabinet Astarès sur l’activité vétérinaire française, réalisé en 2017 à la demande du Conseil national de l’Ordre des vétérinaires (CNOV) et du Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL).
Dans les années à venir, l’exercice vétérinaire prendra sans aucun doute diverses formes. D’abord, la profession se féminise et les jeunes diplômés privilégient, s’ils le peuvent, l’équilibre vie professionnelle et vie privée (salariat, temps partiel, journées de travail allégées, exercice en ville, etc.). Ensuite, le développement des nouvelles technologies (nanotechnologies, biotechnologies, informatique et sciences cognitives, connues sous le sigle NBIC), dans tous les secteurs d’activité, continue à bouleverser les pratiques, les offres de services et la relation client.
Toute la difficulté sera d’évaluer et de mettre en place le bon modèle économique et l’organisation adéquate.
L’étude Astarès a décelé une douzaine d’évolutions socioéconomiques (regroupées en trois catégories), qui pourront impacter la demande des propriétaires d’animaux en matière de santé.
Les Français devraient posséder davantage d’animaux de compagnie, mais moins de chiens. La population canine a décliné de 10 % entre 2006 et 2014, pour se stabiliser en 2016. En revanche, celle des félins a augmenté de 35 % (tableau). Son taux de médicalisation est toutefois moins élevé, comme pour celui des nouveaux animaux de compagnie (NAC), ce qui peut impacter le nombre de consultations et les honoraires des cabinets urbains. En 2011, la dépense annuelle moyenne dédiée aux soins vétérinaires (incluant “autres services”) d’un chien était deux fois supérieure à celle d’un chat (120 € versus 61 €), selon l’Insee1.
Demain, la clientèle canine ou mixte sera davantage connectée, plus technophile, plus exigeante vis-à-vis des praticiens. Sans oublier les changements d’habitudes alimentaires, avec la tendance du bio et de la réduction de consommation de viande, l’attachement des Français à l’environnement et au bien-être animal.
Par ailleurs, les vétérinaires auront à affronter une nouvelle concurrence multiforme, source de risques aussi, incluant aussi bien le low cost que les plateformes numériques qui investissent le secteur de la santé (comparateurs de prix, ubérisation des activités vétérinaires, etc.).
Dans le monde agricole, les vétérinaires ruraux assistent à la stagnation de la population d’animaux de rente et à la décroissance des cheptels laitiers (- 19 % entre 2005 et 2015). Les élevages de bovins (soit 47 % du cheptel total des animaux de rente en 2016), comme ceux de poules (83 % des élevages avicoles), ne progressent plus depuis 2000. Mais les éleveurs disposent aujourd’hui d’exploitations plus importantes et modernisées. Devenus de meilleurs gestionnaires et connaissant mieux la santé animale, ils exigent davantage des vétérinaires, qui ne s’appuieront plus seulement sur leur expertise, mais aussi sur de nouvelles technologies pour les accompagner, notamment dans la prévention des risques sanitaires, et pour offrir des services à valeur ajoutée, tels que la formation des éleveurs en matière de prévention. La pratique de la médecine animale à distance va se développer, à condition d’être encadrée. Sans oublier que la branche rurale pourrait, selon l’étude Astares, manquer de praticiens ruraux ou mixtes dans 5 à 10 ans, dans certaines localités du pays.
•
1 Institut national de la statistique et des études économiques.
LE POIDS DES ACTIVITÉS VÉTÉRINAIRES