CONFÉRENCE
PRATIQUE CANINE
Formation
Auteur(s) : MYLÈNE PANIZO
Lors d’une conférence intitulée « Hyperthyroïdie et hypertension artérielle, maladie rénale chronique ou diabète : des mariages pour le meilleur ou pour le pire ? », Dan Rosenberg est revenu sur des dogmes établis en endocrinologie vétérinaire et a mis en lumière des pièges diagnostiques lors de comorbidité.
Il est communément établi que le traitement de l’hyperthyroïdie peut révéler une maladie rénale chronique sous-jacente, ce qui entraîne parfois le vétérinaire à être réticent à traiter une hyperthyroïdie modérée. Sur la base des données actuelles de la littérature, Dan Rosenberg conclut que l’augmentation d’une azotémie après un traitement classique pour l’hyperthyroïdie est en général modérée (augmentation d’un stade de la classification Iris [International Renal Interest Society]), sans pour autant être associée à une espérance de vie diminuée.
Les facteurs de risque de décès associés à l’hyperthyroïdie sont, au moment du diagnostic, l’âge, la présence d’une protéinurie, d’une hypertension artérielle, d’une diminution de la capacité de concentration des urines et d’une anémie (la valeur de la créatinémie n’apparaît donc pas).
Il convient de contrôler régulièrement les paramètres rénaux, particulièrement lorsque ceux-ci sont proches des limites hautes voire supérieures aux intervalles de référence au moment du diagnostic de l’hyperthyroïdie, et de prévenir les propriétaires de leur probable augmentation, sans toutefois surestimer son impact sur la santé de l’animal.
Des études sont en cours pour analyser l’intérêt du dosage de la SDMA (symmetric dimethylarginine, marqueur non influencé par le poids et la masse musculaire) dans ce contexte. À ce jour, les premières données partagées en congrès ne semblent pas soutenir une capacité à identifier avant traitement les chats susceptibles de développer une azotémie post-thérapeutique.
Dan Rosenberg a évoqué la possibilité d’un sous-diagnostic d’hyperthyroïdie chez un chat atteint de maladie rénale chronique. En effet, la valeur de la thyroxine (T4) peut être diminuée en cas de comorbidité (réduisant par conséquent la sensibilité du dosage de la T4 totale, celle-ci étant égale à 90 % chez des chats uniquement atteints d’hyperthyroïdie). En cas de forte suspicion clinique, il peut s’avérer nécessaire de mesurer la T4 libre, moins influencée par les maladies intercurrentes, sous réserve de le faire par dialyse à l’équilibre.
Cette association n’est pas si fréquente que ce qui a pu être communément admis et l’hypertension induite par un hyperthyroïdisme est, en général, modérée. Il est nécessaire de continuer à être vigilant sur l’apparition d’une hypertension artérielle chez un chat hyperthyroïdien sous traitement (même après équilibre). Dan Rosenberg a rappelé à cette occasion d’autres causes d’hypertension artérielle chez le chat : essentielle (liée à l’âge), maladie rénale chronique et hyperaldostéronisme félin (les deux derniers étant des causes fréquentes d’hypertension morbide).
L’hyperthyroïdie s’observe chez au moins 5 % des chats diabétiques. Cette comorbidité (avec symptômes communs :polyphagie, amaigrissement, polyuro-polydipsie, etc.) peut s’avérer difficile à diagnostiquer. En effet, les hyperthyroïdiens ont tous une fructosaminémie diminuée (en raison de leur métabolisme augmenté, le temps de demi-vie des protéines sériques et l’intensité de leur glycosylation sont réduits). Dans ce contexte, une hyperglycémie associée à une fructosaminémie conforme à l’intervalle de référence peut être interprétée à tort comme une hyperglycémie de stress. À l’inverse, il est possible de sous-estimer la présence d’une hyperthyroïdie chez un chat diabétique (T4 diminuée en cas de comorbidité).
Au terme de la conférence, Dan Rosenberg invite donc à être vigilant sur la présence potentielle d’affections concomitantes à l’hyperthyroïdie et d’envisager ces associations à l’aide de données actualisées renversant quelques dogmes (moindre impact de la mise en évidence d’une maladie rénale chronique, relation de causalité entre hyperthyroïdie et hypertension artérielle moins forte qu’envisagé auparavant). D’autres comorbidités, qui ne faisaient pas partie du thème de la conférence, sont aussi à prendre en compte en pratique, sur des chats le plus souvent âgés (présence d’un lymphome digestif, notamment).
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