Et si ce n’était pas qu’un simple cas chirurgical ! - La Semaine Vétérinaire n° 1749 du 27/01/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1749 du 27/01/2018

RETOUR D’EXPÉRIENCE

DITES-NOUS TOUT

Auteur(s) : JEAN-PIERRE LEGROUX, CLINIQUE DE LA TOISON-D’OR, À DIJON (CÔTE-D’OR)  

Quel est votre diagnostic ?

Une femelle fox-terrier de 16 ans est consultée pour malaise. L’examen clinique et la palpation abdominale orientent vers une radiographie abdominale latérale sans préparation. L’image obtenue (ci-dessous) est spectaculaire ! Quelque chose dans cette image suggère toutefois qu’il ne s’agit peut-être pas que d’un cas chirurgical ! De quoi s’agit-il ?

Réponse

Nous constatons sur cette radiographie, hors normes, que l’estomac est complètement rempli de cailloux, dont un exemplaire a traversé le pylore et se retrouve en position colorectale. Ceci suggère que de la motilité intestinale a perduré peu après le début de l’ingestion inappropriée, mais que celle-ci s’est stoppée probablement d’une manière contemporaine de la fermeture du pylore.

Le remplissage méthodique de cet estomac, tel un sac de billes, interpelle. Un animal “normal” peut-il entasser aussi scrupuleusement une telle masse de corps étrangers sans que l’organisme ne réagisse ? Après tout, nos carnivores sont prompts aux vomissements par ce réflexe physiologique salvateur qu’ils ne partagent, somme toute, qu’avec la seule espèce humaine.

Le pylore a, lui, réagi en se fermant, mais aucun renvoi n’a accompagné l’ingestion anarchique. Qui plus est, la sensation de satiété, qu’on imagine obtenir après l’ingestion, disons, de la moitié des cailloux, n’a pas fonctionné.

Il est donc suspecté, chez cet animal âgé, un trouble de la conscience. Il les aurait, pour ainsi dire, avalés “à l’insu de son plein gré” !

La gastrotomie évacuatrice s’est accompagnée de biopsies de nodules spléniques suspects, les autres organes abdominaux apparaissant normaux.

Le soir de l’intervention, l’animal bien réveillé a montré des signes d’accident vasculaire cérébral (AVC : tête penchée, pousser au mur, nystagmus horizontal, rotation sur le cercle), indépendants, peut-on penser dans leur genèse, du protocole anesthésique, mais sans doute promus par ce dernier.

Un traitement symptomatique corticoïde et vasodilatateur a semblé amender temporairement les symptômes.

Les nodules étaient des hémangiosarcomes spléniques, dont l’évolution rapide des métastases au foie et au cerveau a conduit à endormir définitivement l’animal.

En conclusion

L’“arbre” des cailloux de l’estomac cachait, finalement, la forêt de l’AVC néoplasique.