FILIÈRE ALLAITANTE
PRATIQUE MIXTE
Formation
Auteur(s) : HÉLÈNE ROSE
Les intervenants de la 4e conférence Grand angle viande – Institut de l’élevage (Idele), qui s’est tenue à Paris en novembre 2017, ont notamment mis en avant les moyens de prévention des troubles respiratoires chez les broutards, qu’ils ont présentés aux acteurs de la filière.
Soixante-quinze pourcent des maladies rencontrées en engraissement sont liées à des troubles respiratoires, d’origine virale ou bactérienne, notamment au cours du premier mois. Au niveau de la filière, ces troubles respiratoires seraient responsables de pertes financières estimées à 100 millions d’euros par an. Au niveau individuel, ils entraînent une diminution du gain moyen quotidien (GMQ) pouvant aller jusqu’à 70 g/jour. Outre des facteurs prédisposants (la race, le poids, la génétique, etc.), des facteurs favorisants sont connus : le stress subi par les jeunes broutards, le mélange sanitaire, les conditions de logement, etc. Mis à part les traitements médicaux, d’autres leviers d’action sont possibles.
L’étude Phéroveau, menée conjointement par des membres d’Idele (Béatrice Mounaix et Marlène Guiadeur) et d’Oniris (notre confrère Sébastien Assié, de l’UMR1 Bioepar Oniris-Inra2, et l’étudiante Justine Boullier) s’est intéressée aux effets potentiels d’une phéromone apaisante, l’apaisine (bovine appeasing pheromone, BAP) appliquée en pour on lors du passage des broutards en centre de tri. 265 jeunes mâles charolais ont ainsi été répartis en 23 lots, recevant soit l’application de phéromones, soit un placébo, puis transportés chez quatre engraisseurs.
Les animaux ayant reçu l’apaisine ont présenté plus de comportements exploratoires, ce qui suggère que l’habituation à leur nouvel environnement a été facilitée. Aucune différence significative n’a cependant été observée concernant les interactions négatives et l’intérêt pour l’aliment.
Un examen clinique standardisé a été réalisé 30 jours après l’arrivée en engraissement : dans les lots traités, les broutards étaient trois fois moins nombreux à présenter plusieurs signes cliniques de pathologies respiratoires. La proportion d’animaux ayant nécessité un traitement et celle d’animaux morts étaient toutefois équivalentes. L’utilisation d’apaisine semble avoir amélioré la résistance des bovins. Quantifié lors de l’examen clinique, cet impact positif n’avait pas été perçu par les quatre éleveurs.
Comme dans d’autres espèces, les apaisines pourraient ainsi être une aide à la gestion du stress chez les jeunes bovins.
Béatrice Mounaix est également revenue sur les chiffres d’une étude conduite par Idele en 2015 concernant la perception de la vaccination par 32 éleveurs naisseurs et/ou engraisseurs situés dans des régions de forte production allaitante.
Vingt-huit éleveurs ont indiqué qu’ils vaccinent leurs cheptels. Parmi eux, 22 estiment que la vaccination coûte cher, mais qu’elle est rentable. Ils sont toutefois quatre à l’avoir qualifiée d’inutile, ce qui représente tout de même un éleveur sur huit dans l’échantillon. La vaccination des broutards suscite cependant plus de réserves. Outre le motif invoqué de son inutilité, les principaux freins sont les contraintes que cela entraîne, la manipulation difficile au pâturage, le manque d’équilibre entre le coût et le bénéfice et la non-valorisation des broutards vaccinés. Le surcoût est cependant complexe à estimer, il serait compris entre 10 et 50 € par jeune bovin.
Des modifications des pratiques sont ainsi à considérer. Une première injection pourrait être réalisée avant le départ des broutards de leur élevage de naissance. La mise en place d’un système de traçabilité de la vaccination permettrait également de valoriser l’engagement des éleveurs.
Ces pistes vont être développées dans le cadre du projet WelHBeef, qui s’étendra de 2018 à 2020. Celui-ci a pour objet de mieux préparer les broutards à l’engraissement, en effectuant un préconditionnement, dès l’élevage de naissance. Les jeunes animaux y seront notamment écornés avant 4 semaines, vaccinés, traités contre les parasites internes et externes. Une adaptation sera réalisée. Cette approche combine ainsi plusieurs pistes pour améliorer la santé globale des animaux et expérimente une nouvelle démarche pour la filière.
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1 Unité mixte de recherche.
2 Institut national de la recherche agronomique.