Le choix d’une SAS est-il judicieux ? - La Semaine Vétérinaire n° 1752 du 16/02/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1752 du 16/02/2018

FISCALITÉ

ÉCO GESTION

Auteur(s) : CLARISSE BURGER 

La forme juridique d’une entreprise conditionne le régime d’imposition fiscale des bénéfices du dirigeant et des associés. Pour autant, est-elle adaptée à l’évolution de son activité et de ses revenus ? Le point avec Julien Allspach, chef de groupe au cabinet d’expertise comptable Optimys Expertise SAS.

Quelle structure sociétaire faut-il privilégier, lorsque l’on est chef d’entreprise vétérinaire ? Une société par actions simplifiée (SAS), une société d’exercice libéral par actions simplifiée (Selas) ou bien une société d’exercice libéral à responsabilité limitée (Selarl), par exemple ? La question du choix de la forme juridique de sa clinique et des régimes d’imposition (à condition que le statut sélectionné laisse le choix), en fonction de son exercice, demande réflexion.

Certains professionnels libéraux ont eu tendance, ces dernières années, à privilégier le statut de la SAS, soumise au régime de l’impôt sur les sociétés (IS) ou de l’impôt sur le revenu (IR), selon le cas de figure. Quelle fiscalité avantagera une très petite entreprise dont l’activité se développe et qui génère des bénéfices (dans l’hypothèse d’une absence de pertes antérieures) ? S’il s’agit d’une SAS, les dividendes distribués sont soumis à des règles fiscales différentes selon qu’une personne physique ou une personne morale les perçoit. Quel sera le taux de prélèvement le plus avantageux ? Pas si simple d’arrêter son choix. « C’est pourquoi il faut analyser tous les besoins de l’entreprise et non pas uniquement le coût des charges sociales et fiscales. Le taux de prélèvement d’une autre forme juridique (une société à responsabilité limitée ou SARL, par exemple) pourra s’avérer plus efficace que celui d’une SAS, s’il est optimisé. Il faut donc bien lister l’ensemble des paramètres avant de faire son choix », explique Julien Allspach, chef de groupe au cabinet d’expertise comptable Optimys Expertise SAS.

Un phénomène de mode ?

Le statut de la SAS retenu par certains professionnels libéraux a-t-il été un phénomène de mode ou bien d’abord un moyen d’éviter de payer les cotisations des organismes sociaux des indépendants, tels l’Urssaf et le RSI1 ? Ce dernier, créé en 2008 – très décrié par de nombreux assurés lors de ses dysfonctionnements et apparenté à une « catastrophe industrielle » par la Cour des comptes – que le gouvernement a finalement décidé d’adosser au régime général de la Sécurité sociale. Depuis le 1er janvier 2018, le RSI est en effet remplacé par la Sécurité sociale des indépendants, avec une période transitoire de deux ans. Les dysfonctionnements du RSI ont probablement poussé certains libéraux à préférer un autre statut juridique. Le choix de la SAS permet au président qui la dirige d’être assimilé salarié (affilié à l’Urssaf) et d’avoir des prélèvements moins élevés qu’au RSI, sans pour autant profiter de certains droits, comme celui du régime de l’assurance chômage.

Selas versus SELARL

Concernant les autres formes juridiques adaptées aux professions libérales, la SELARL présente de vrais avantages en matière de coût social et fiscal, de pluralité des gérants, ainsi que de coût de fonctionnement, selon Julien Allspach :

- concernant les rémunérations, lorsque le dirigeant d’une SELARL prélève 1 €, cela a un coût de 1,50 € chargé (1 € de prélèvement + 0,50 € de charges sociales), tandis que le prélèvement de 1 € dans une Selas coûte 2 € chargés (1 € de prélèvement + 1 € de charges sociales) ;

- en ce qui concerne le coût de fonctionnement et la nécessité de faire certifier ses comptes, les seuils légaux à partir desquels il faut nommer un commissaire aux comptes sont plus élevés dans une SELARL que dans une Selas. En d’autres termes, l’obligation de nomination est plus vite atteinte dans une Selas que dans une SELARL. La problématique est la même dans le cas d’une optimisation avec mise en place d’une holding sous forme de SAS. Dans ce schéma, si une SAS détient ou est détenue par une autre SAS, l’obligation de nomination doit être respectée ;

- en cas d’association, le statut de co-gérance de la SELARL est plus efficace et plus simple à mettre en œuvre que des présidences tournantes, dans le cadre de la Selas ;

- pour pallier la soumission des dividendes au RSI (dès lors qu’ils sont supérieurs à 10 % du capital et des sommes laissées à disposition de la société), l’une des solutions peut être l’augmentation de capital.

Cependant, la Selas a d’autres avantages tels que la souplesse de ses statuts, le pacte d’actionnaire, la protection sociale de son dirigeant, le coût fiscal et social des dividendes, le coût de transmission des actions. « En définitive, le choix d’une structure juridique doit être fait en fonction des besoins réels du professionnel libéral (indépendance, responsabilité, association, disponibilité du revenu, codirection, etc.). De la même manière qu’un praticien vétérinaire posera un diagnostic et, par la suite, appliquera le bon remède, il faut pouvoir définir les caractéristiques déterminantes du dirigeant pour appliquer la bonne structure », souligne également Julien Allspach.

Les nouveaux dispositifs pour 2018

Au regard de la loi de finances pour 2018 et de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2018, de nouveaux éléments sont également à prendre en compte :

- la hausse de la contribution sociale généralisée (CSG) : + 1,7 point, pour les revenus du travail et du capital. Cette augmentation est intégralement déductible des revenus imposables, à l’exception des plus-values de cession de titres ;

- la modification de l’imposition des dividendes, avec la mise en place d’un prélèvement forfaitaire unique (PFU), appelé aussi flat tax : ainsi, l’imposition s’effectuera au taux commun de 12,8 %, auquel s’ajouteront les prélèvements sociaux (17,2 %), soit un taux global de 30 %. « La conséquence est la suivante : les dividendes versés seront moins imposés qu’à l’heure actuelle, où ils sont soumis au barème progressif après abattement. Les contribuables pourront cependant continuer à bénéficier du barème progressif sur option. Pour les gérants majoritaires, il n’y a pas de prélèvement social puisque le dividende dit excédentaire (+ 10 % de la somme du capital social et des sommes laissées à l’entreprise) est soumis aux charges sociales calculées par le RSI ou l’Urssaf », ajoute Julien Allspach ;

- l’absence de mesure prévoyant la fin de la soumission du dividende excédentaire au RSI ;

- le prélèvement PFU est optimum dès lors que le taux moyen d’imposition est supérieur à 22 %.

1 Union de recouvrement des cotisations de Sécurité sociale et d’allocations familiales et Régime social des indépendants.

LA MODERNISATION DU RSI

Parmi les changements inhérents à la réforme du Régime social des indépendants (RSI), il convient de noter :
- le changement de nom du RSI en Sécurité sociale des indépendants et la modification du chemin d’accès sur Internet : secu-independants.fr ;
- le changement d’interlocuteur pour un rapprochement vers les Unions de recouvrement des cotisations de Sécurité sociale (Urssaf), afin de bénéficier de leur expérience ;
- la possibilité de modulation plus rapide des cotisations, en fonction de la déclaration en cours d’année. Alors qu’auparavant, les appels provisionnels des cotisations étaient calculés sur les revenus des années N-2 et N-1, les cotisants pourront dorénavant, sur la déclaration de leurs revenus, obtenir une modulation quasi instantanée de leurs appels provisionnels provenant de l’Urssaf ;
- l’absence de modification des taux. Cependant, comme pour les salariés, une diminution des cotisations aux allocations familiales et à l’assurance maladie a été votée, afin de compenser la hausse de la contribution sociale généralisée (CSG).