ANTIBIOTIQUES
PRATIQUE MIXTE
L'ACTU
Auteur(s) : TANIT HALFON
Minapig, un projet de recherche sur les stratégies de réduction de l’usage des antibiotiques en élevage porcin, a identifié deux facteurs déterminants d’utilisation de ces médicaments. Il a aussi montré qu’une réduction était possible sans impacter les performances techniques et économiques des élevages.
Mené entre 2012 et 2015, le projet européen Minapig1 s’est penché sur les stratégies de réduction de l’usage des antibiotiques en élevage porcin. Les objectifs étaient multiples : identifier les indicateurs les plus adaptés à la quantification de l’utilisation des antibiotiques, établir l’importance des principaux déterminants techniques et psychosociologiques de leur usage, définir les caractéristiques des éleveurs combinant un faible usage en antibiotiques et des bonnes performances économiques, et enfin évaluer l’impact technique et économique de l’application de mesures réduisant la consommation d’antibiotiques. Pour ce faire, deux études successives ont été menées dans quatre pays européens : Allemagne, Belgique, France et Suède.
Une première étude transversale a été menée entre décembre 2012 et janvier 2014 dans 227 élevages naisseurs-engraisseurs, situés en Allemagne (60), en Belgique (47), en France (60) et en Suède (60), possédant plus de 70 truies et 500 porcs à l’engraissement. Les données récoltées selon une méthode harmonisée entre chaque pays se classaient en six catégories : la structure de l’élevage, les performances techniques, les pratiques de biosécurité, la présence de signes cliniques, le schéma vaccinal et la perception des éleveurs vis-à-vis de l’usage des antibiotiques. L’idée était ensuite d’explorer les associations entre ces différentes catégories (ou blocs de variables explicatives) et des indicateurs reflétant l’utilisation des antibiotiques. « Nous avons fait le choix de sélectionner plusieurs indicateurs pour décrire cette utilisation, explique Catherine Belloc, enseignante-chercheuse en pathologie des animaux de rente monogastriques à Oniris. Chacun décrit l’usage qui est fait de ces molécules, selon ce que l’on souhaite explorer. » La méthode des blocs explicatifs a ainsi permis de déterminer la contribution relative2 de chacun d’entre eux dans l’emploi des antibiotiques.
L’analyse des données a montré qu’aucun bloc n’était dominant. Néanmoins, pour les quatre pays, le bloc “Présence de signes cliniques” constituait un des principaux blocs explicatifs de l’usage des antibiotiques. En Allemagne, en Belgique et en France, leur utilisation était plus particulièrement associée à la présence de signes respiratoires chez les porcs à l’engrais ; en Belgique et en France, à celle des signes nerveux. L’analyse a également révélé que la perception des éleveurs contribuait à l’utilisation des antibiotiques en Belgique et en Suède, alors que ce bloc n’avait que peu d’effet en Allemagne et en France. Le bloc de la biosécurité ressortait surtout pour le modèle français. Ainsi, en France, les élevages porcins situés en zones de densité porcine réduite, et ceux avec des meilleures pratiques en lien avec l’approvisionnement en eau et en aliments présentaient un plus faible usage d’antibiotiques.
Une seconde étude de type avant/après a intégré 70 élevages naisseurs-engraisseurs des quatre pays. Pour chacun, un plan de réduction de l’usage des antibiotiques, adapté au contexte sanitaire et à la conduite d’élevage, a été mis en œuvre par le vétérinaire traitant. L’analyse des données récoltées pendant un an a montré une réduction médiane de 47 % des antibiotiques, correspondant à une baisse de 35 % des dépenses pour ces produits. Faute de données disponibles, l’impact technico-économique n’a pu être évalué que dans 33 élevages belges et français. Il en est ressorti que la réduction de l’emploi des antibiotiques n’avait pas d’impact notable sur les performances des élevages. La variation médiane observée du bénéfice net par truie et par an, de 1,23 €, étant davantage influencée par le gain moyen quotidien et l’indice de consommation que par le coût des mesures mises en œuvre. «
Dans notre étude, l’observance est plutôt bonne. Ce point est un des enseignements du projet
: il est à travailler et à privilégier
», commente Catherine Belloc. Parmi les raisons pouvant expliquer la non-observance : un éleveur pas convaincu de l’efficacité des mesures à mettre en œuvre.
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2 Le modèle statistique PLS multibloc expliquait 51,6 %, 29,8 %, 26,6 % et 38,6 % de la variabilité observée dans l’utilisation des antibiotiques respectivement en Allemagne, en Belgique, en France et en Suède.
CARACTÉRISTIQUES DU “TOP FARMER”
« QUEL QUE SOIT LE CONTEXTE SANITAIRE, L’USAGE DES ANTIBIOTIQUES PEUT ÊTRE RÉDUIT »