Anesthésie du veau : adapter les protocoles au cas par cas - La Semaine Vétérinaire n° 1756 du 23/03/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1756 du 23/03/2018

CONFÉRENCE

PRATIQUE MIXTE

Formation

Auteur(s) : BÉATRICE BOUQUET 

Avec la montée en puissance des préoccupations sur le bien-être animal, la prise en charge de la douleur devient un point critique à maîtriser absolument en chirurgie vétérinaire. Parallèlement, la pharmacopée évolue et il n’est plus possible d’ignorer l’apparition de spécialités qui viennent combler un vide thérapeutique dans l’espèce cible. Ainsi, Procamidor®, à base de procaïne à 2 %, est désormais la seule spécialité anesthésique locale qui dispose d’une autorisation de mise sur le marché chez les bovins, assortie de temps d’attente pour la viande et le lait (nuls).

Si le recul manquait aux praticiens à sa sortie commerciale, des doses et des protocoles pour une utilisation de ce médicament, seul ou en association, sont désormais validés. Selon le principe de prescription dit de la cascade, il convient de recourir en priorité à une spécialité qui dispose d’une indication dans l’espèce ; continuer à utiliser la Lurocaïne® est donc pour le moins discutable.

Lurocaïne® et procaïne

L’usage épidural (subarachnoïdal) de la Lurocaïne® associée à la xylazine était bien ancré en pratique courante. Il convenait de valider des doses avec la procaïne.

C’est ce qu’a réalisé une équipe de chercheurs d’Oniris vis-à-vis de l’indication spécifique de l’anesthésie lors d’intervention ombilicale chez le jeune bovin. L’étude a été conduite sur 27 veaux laitiers âgés de 15 à 46 jours. Elle consistait à comparer la qualité de l’analgésie et de la sédation obtenue avec les deux spécialités utilisées aux doses recommandées. L’anesthésie (par voie subarachnoïdale) contenait, au hasard, soit la procaïne à la dose de 4 mg/kg (encadré), soit la Lurocaïne® à la dose de 2 mg/kg. Dans les deux cas, l’anesthésique local était combiné à la xylazine à 2 % à la dose de 0,2 mg/kg. En outre, chaque veau avait été sédaté par voie intramusculaire au préalable (xylazine également, à la dose de 0,1 mg/kg). L’évaluation s’est basée sur des scores validés de réaction à la stimulation, de douleur, et de sédation avant, pendant, et 48 heures après chirurgie ombilicale (durée médiane : 80 min).

Des effets variables à surveiller

Analgésie et sédation sont apparues équivalentes dans les deux lots. Petite différence toutefois dans la nécessité de recourir à un supplément anesthésique localement (par exemple, par infiltration : 75 % dans le groupe “procaïne”, 69 % dans le groupe “Lurocaïne®”). La douleur a été qualifiée d’assez élevée dans les deux cas, au moins dans les deux premières heures postopératoires. Dans tous les cas, le temps de réveil varie considérablement selon les veaux : 80 à 230 min pour un premier mouvement de membre. Le praticien doit donc rester vigilant tout au long de son intervention chirurgicale avec ce type de protocole. Les possibles réactions au produit sont également à bien connaître pour mieux les anticiper.

PRÉCISIONS SUR L’USAGE ÉPIDURAL DE LA PROCAÏNE

Anne Relun Oniris à Nantes (Loire-Atlantique). Article rédigé d’après une présentation faite lors du 5 e forum européen de buiatrie à Bilbao (Espagne), du 4 au 6 octobre 2017.

Le résumé des caractéristiques du produit (RCP) des spécialités vétérinaires “récentes” est riche d’enseignements ; le praticien rural ne peut faire l’économie de le lire (notice). En voici quelques aspects éclairants pour Procamidor®, dans le cadre d’un usage épidural lors de chirurgie du veau.
Chez les bovins et les ovins figure l’indication « Anesthésie par infiltration et anesthésie épidurale ». Dans ce dernier cas, seule la chirurgie du pénis est mentionnée chez le veau, et la dose indiquée est un volume fixe de la spécialité utilisée seule, soit 15 ml (soit 300 mg) de chlorhydrate de procaïne épidurale.
Il est bien précisé que l’administration d’anesthésiques locaux par voie épidurale peut être suivie d’une anesthésie insuffisante chez les bovins. En outre, « ce médicament vétérinaire ne contenant pas de vasoconstricteurs, sa durée d’action est courte ».
Côté technique, « le positionnement correct de l’aiguille doit être vérifié par aspiration, afin d’exclure une administration intravasculaire ; la tête de l’animal doit être amenée en position correcte ». Cet anesthésique local devant être utilisé avec précaution lors de nombreuses pathologies associées (épilepsie, bradycardie, etc.), une auscultation et un examen clinique sont nécessaires avant intervention sur l’ombilic, d’autant plus que les anomalies cardiaques congénitales ou acquises ne sont pas rares chez le jeune veau et que le choc endotoxémique est fortement possible comme complication d’abcès ombilical.