RECHERCHE
PRATIQUE CANINE
L'ACTU
Auteur(s) : VALENTINE CHAMARD
Une équipe nord-américaine, associant des chirurgiens vétérinaires et des ingénieurs en génie mécanique, étudie la possibilité de fabriquer des endoprothèses sur mesure (par impression 3D) comme alternative à l’amputation ou au remplacement de l’os par une endoprothèse métallique standard, source de complications.
Différentes options existent lorsqu’un ostéosarcome est diagnostiqué chez un chien : expectative, soins palliatifs (analgésiques, radiothérapie), amputation (mal tolérée chez les chiens de grande taille atteints d’autres problèmes orthopédiques) ou chirurgie pour préserver le membre (qui n’augmente pas la durée de survie, mais qui permet un gain de qualité de vie, en l’absence de douleur du membre concerné). Cette dernière consiste à enlever la partie osseuse atteinte et à la remplacer par une greffe ou un implant métallique standardisé, fixé à l’aide d’une plaque. Or les complications sont fréquentes (80 %) : infections, bris du matériel ou de l’os, récidive locale de la tumeur.
Fort de ce constat, notre confrère Bertrand Lussier, spécialisé en chirurgie vétérinaire et chercheur en chirurgie expérimentale et en maladies rhumatismales au Québec, a réuni une équipe pluridisciplinaire pour savoir s’il serait possible de fabriquer, par impression 3D, une endoprothèse spécifique à chaque individu, et dans quelle mesure cette technique pourrait prévenir les complications. Dans l’affirmative, un nouveau paradigme serait possible, qui consisterait à adapter la prothèse au patient et non plus le patient à la prothèse.
L’essai clinique, dont 5 chiens ont pu bénéficier depuis 7 mois, se déroule sous la responsabilité de Bernard Séguin, chirurgien vétérinaire spécialisé en chirurgie oncologique à la Colorado State University de Fort Collins. Les chiens inclus dans l’étude ont un diagnostic d’ostéosarcome radial confirmé par histologie et un bilan d’extension négatif. Un scanner des deux membres thoraciques est réalisé et le site de coupe de l’os atteint est déterminé par le chirurgien. Les images sont acheminées à l’École de technologie supérieure (ETS), à Montréal. Des modèles numériques des os, supports pour la conception des implants, sont réalisés à partir des clichés. Une opération de miroir est effectuée sur le radius sain, qui est ensuite positionné et orienté de la même manière que le radius affecté. Un plan de coupe, correspondant aux indications du chirurgien, est créé et une endoprothèse combinée à une plaque personnalisée est ajoutée pour combler le déficit osseux et permettre la fixation au radius et aux os métacarpiens III et IV. Le logiciel de conception modélise également un guide chirurgical pour garantir une coupe chirurgicale identique à la virtuelle. Après validation par le chirurgien, le modèle de l’endoprothèse est traité par une imprimante 3D métallique (alliage de titane fusionné par laser), de même que le guide de coupe (réalisé en plastique). Les deux produits sont ensuite adressés à Bernard Séguin, aux États-Unis. Après stérilisation du matériel, le chien est opéré (entre deux et trois semaines après le diagnostic) : exérèse de la tumeur en marges saines avec le guide de coupe, mise en place de l’endoprothèse, fixation par des vis (18 en moyenne). Après quelques jours d’hospitalisation, l’animal est rendu à son propriétaire avec un léger bandage, des analgésiques, parfois des antibiotiques. Une chimiothérapie adjuvante est instaurée et l’animal est régulièrement suivi (réévaluations cliniques et radiographiques). Si les résultats, qui restent à ce jour confidentiels, s’avèrent concluants, l’équipe ne cache pas son ambition de pouvoir en faire bénéficier les patients humains.
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