Edito
Auteur(s) : TANIT HALFON
Et si, dans la série, Dr House avait été vétérinaire ? Un vétérinaire au sens clinique hyper aiguisé, innovant dans ses approches (voire dangereux) et, surtout, peu regardant sur les convenances. Sans parler des concepts de management transversal, de communication positive ou encore, tout simplement, de l’éthique professionnelle. Flairant le filon, des scénaristes y ont pensé et, en 2012, la série Animal Practice était diffusée sur les chaînes américaines. Flop. Peut-être parce que la relation avec l’animal tend à se complexifier ? D’abord domestiqué, notamment pour être utile à l’humain, l’animal est passé progressivement de l’animal-machine dénué de raison de Descartes à l’animal sensible et, de fait, devant être protégé, au moins pour le domestiqué. Une analyse de 2016 du centre d’études et de prospective du ministère de l’Agriculture1 a souligné que « la séparation occidentale entre espèce humaine et règne animal » n’était plus si nette, notamment en lien avec les changements dans nos interactions avec les animaux familiers. La thèse2 de Diane Pendariès-Issaurat, présentée dans ce numéro, explique aussi que les propriétaires deviennent de plus en plus exigeants. Aujourd’hui, le vétérinaire ne peut plus se contenter d’être un bon médecin et/ou chirurgien. Il doit aussi maîtriser un grand nombre de compétences dites non techniques. La thèse en propose un peu moins de 50 à un panel de vétérinaires. Parmi celles jugées très importantes par les professionnels interrogés, citons “travailler en équipe pluridisciplinaire” ou “savoir écouter les clients et collaborateurs”. Un Dr House inconcevable chez le vétérinaire, peut-être aussi parce que l’animal familier n’est pas un humain taille réduite ? La thèse précise que les propriétaires de chats sont plus stressés d’amener leur animal en consultation que ceux de chiens. Face à un House, on imagine aisément la scène : oreilles aplaties, pupilles dilatées, quelques feulements… Bref, un chat qui devient vite intouchable. Pourtant, certains praticiens spécialisés en comportement animal nous apprennent aujourd’hui à adapter notre façon de travailler à l’éthogramme de l’animal vu en consultation. La maîtrise des compétences non techniques, qu’elles soient humaines (le savoir-être) ou de l’ordre de la gestion d’entreprise, sera-t-elle un gage de l’épanouissement personnel ? ●
2 « Les compétences non techniques dans la profession vétérinaire : état des lieux de la formation dans les écoles et enquête auprès des vétérinaires praticiens ». Thèse de doctorat vétérinaire, VetAgro Sup, 2017. Lire pages 42 à 47 de ce numéro.