ENSEIGNEMENT
ACTU
Auteur(s) : TANIT HALFON
Le jeudi 12 avril, les étudiants vétérinaires de l’école d’Alfort et d’Oniris ont pu assister pour la première fois à une vidéotransmission chirurgicale en direct.
Aujourd’hui, les écoles vétérinaires doivent réfléchir à des outils pédagogiques attractifs pour nos nouvelles populations d’étudiants. » En parlant d’enseignement, Dominique Grandjean, professeur à l’École nationale vétérinaire d’Alfort (ENVA) et responsable de l’unité de médecine, de l’élevage et du sport imagine déjà des cours sous forme de jeux vidéo, voire des élèves en action dans une réalité virtuelle. Si ces scénarios ne sont, a priori, pas envisageables dans l’immédiat, les étudiants de l’ENVA et d’Oniris (Nantes) ont déjà pu assister à un premier essai de vidéotransmission chirurgicale le jeudi 12 avril dernier, un projet initié par notre confrère. Le principe : des interventions chirurgicales réalisées dans les locaux du centre hospitalier vétérinaire d’Alfort, filmées par une équipe de professionnels de l’audiovisuel, avec des images transmises en direct sur grand écran dans une salle spécialement dédiée à l’événement. « L’objectif de cette journée était déjà de vérifier la faisabilité technique, en matière de qualité de transmission des images et du son, et de fluidité des échanges entre les chirurgiens au bloc et les spectateurs, a expliqué Mathieu Manassero, maître de conférences en chirurgie à l’ENVA, et l’un des organisateurs de cette journée. Et le bilan s’avère très positif. » La journée a ainsi mobilisé une équipe technique1 de cinq personnes, sept caméras fixées sur des bras motorisés et une caméra mobile portée par un vidéaste réparties entre les deux salles opératoires, un satellite pour communiquer avec Nantes, et beaucoup de temps. « La journée a été précédée de deux jours complets d’installation du matériel au bloc, a-t-il souligné. J’avais aussi élaboré un véritable story-board pour chaque chirurgie, pratiquement à la minute près. »
Au programme de cette journée, deux ovariectomies, une de chatte et une de chienne réalisée sous cœlioscopie, une castration de lapin et une ostéotomie de nivellement du plateau tibial (tibial plateau levelling osteotomy ouTPLO). Précédées d’une courte présentation théorique, les interventions chirurgicales étaient ensuite commentées par le chirurgien lui-même, les étudiants pouvant lui poser directement des questions. Ces derniers se sont pris rapidement au jeu. « J’ai pu observer certains élèves intervenir alors qu’ils n’auraient probablement pas osé le faire en clinique ou en cours magistral, s’est enthousiasmé Dominique Grandjean. Cet outil a l’avantage de libérer la parole. Moi, ça me plaît bien. »
Si les étudiants étaient ravis de cette journée, reste à savoir si ce dispositif présente un réel intérêt pédagogique. La réponse est définitivement oui pour Dominique Grandjean. «
Je suis persuadé que c’est un outil pédagogique apprécié, notamment du fait de la possibilité donnée aux étudiants d’interagir.
» À Oniris, ce concept était déjà validé par le corps enseignant. «
Nous avons équipé nos nouveaux blocs de chirurgie canine et équine de quatre caméras, une caméra d’ambiance, une dans l’axe du scialytique, et deux pour les endoscopes, a ainsi expliqué Olivier Gauthier, professeur de chirurgie des animaux de compagnie, qui avait été invité à faire participer l’école de Nantes à la journée de vidéotransmission. Le système sera opérationnel pour la prochaine rentrée scolaire.
» L’objectif : diffuser des chirurgies quotidiennement en direct dans plusieurs salles de diffusion, mais aussi constituer une vidéothèque. Une première en France. «
Cet outil apporte un réel avantage pour l’enseignement de la chirurgie. Au bloc, les étudiants ne voient pas grand-chose du champ opératoire, et suivant leur planning, ils n’assistent pas forcément aux mêmes interventions chirurgicales au cours de leur cursus. Et le bloc ne peut accueillir qu’un nombre limité de personnes.
» De plus, au contraire des méthodes d’apprentissage qui utilisent des supports inertes qui « aseptisent le côté chirurgical », l’image vidéo permet de contextualiser l’intervention. «
En plus d’être techniquement à la pointe, les étudiants doivent être armés pour prendre des décisions dans des situations de stress. Avec ces vidéos, en direct ou en différé, la chirurgie n’est pas déconnectée de son contexte.
» Pour lui, avec cet outil, l’idée est de faire «
un compagnonnage pour le plus grand nombre. Il y a un côté démocratisation. On pourra voir et revoir une intervention.
» L’intégration de ce type de dispositif dans l’enseignement permettra aussi d’aller dans le sens de la mutualisation des compétences entre écoles vétérinaires. Un avantage certain dans un contexte d’augmentation d’effectifs et de budget restreint.
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1 Sociétés Vivactis et VecteurM.
UN OUTIL COÛTEUX ?