La responsabilité du vétérinaire équin - La Semaine Vétérinaire n° 1765 du 25/05/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1765 du 25/05/2018

CONFÉRENCE

PRATIQUE MIXTE

Formation

Auteur(s) : MARINE NEVEUX  

Concernant l’administration d’un médicament, le vétérinaire n’est pas tenu à une obligation de résultat, mais de moyen si l’injection est réalisée dans les règles de l’art. L’obligation d’information reste aussi valable à tous les stades. Elle doit couvrir les risques et les avantages d’une technique, d’une façon claire, simple et intelligible. Celle-ci se retrouve d’ailleurs dans le Code de déontologie. La preuve de l’exécution de l’information va être à la charge du vétérinaire. C’est une obligation qui est réciproque, car le propriétaire doit aussi fournir toutes les informations sur le passé de l’animal. L’article 1112-1 du Code civil met en place l’obligation d’information précontractuelle renforcée. Les parties ne peuvent ni la limiter ni l’exclure. « On est dans le rapport de transparence nécessaire des parties », explique Catherine Froment, avocate.

L’obligation de sécurité va couvrir le matériel et les installations du vétérinaire, la fiabilité des instruments, des locaux, des salles de réveil, des box de réveil, etc.

Mise en jeu de la responsabilité civile

Trois notions doivent être réunies pour la responsabilité civile :

- un fait dommageable : la faute professionnelle, médicale, l’acte que n’aurait pas commis un praticien avisé. Le recours à une expertise judiciaire permet de contrôler si les soins prodigués sont conformes aux règles de l’art.

- le préjudice.

- le lien de causalité : c’est le plus délicat à établir. Là aussi, l’expertise judiciaire va déterminer si la cause est à l’origine du préjudice.

La notion de perte de chance est aussi à connaître : est-ce qu’avec un autre traitement l’animal aurait eu plus de chance ?

Exemple de cas avec le jugement de la cour d’appel de Caen en 2007 : le vétérinaire procède à un examen incomplet (pas d’examen cardiorespiratoire). Le cheval meurt le lendemain de l’opération à la suite de coliques. La cour reconnaît une faute dans l’obligation de moyens du vétérinaire (pas d’examen clinique), mais il n’est pas démontré de lien de cause à effet avec la mort du cheval. Autre affaire, celle de la cour d’appel de Bordeaux en 2016 : le vétérinaire diagnostique une uvéite, alors que c’était un abcès. Mais là aussi, il n’y a pas de lien de causalité démontré, car le cheval aurait été borgne, mais pas en raison d’un mauvais diagnostic.

Concernant la responsabilité dans le cadre de la garde juridique de l’animal : la notion de transfert de la garde de l’animal s’applique au cas par cas. Lorsqu’une personne tient le cheval au licol pendant les soins du vétérinaire, c’est la responsabilité du vétérinaire qui est en jeu.

S’agissant de la responsabilité dans le cadre du dépôt salarié (Code civil, article 1927) : en 2012, la cour d’appel de Paris juge une affaire dans laquelle un cheval a été retrouvé mort, après une intervention chirurgicale, dans un box de la clinique. Le toit du box a été heurté par un tracteur qui ramassait le fumier et sa chute a entraîné la mort du cheval. La cour d’appel confirme la responsabilité du vétérinaire. Ce dernier tente d’évoquer le cas de force majeur du camion de fumier, mais le tribunal argue que le camion passait tous les jours et que la vétérinaire avait la charge de la sécurité dans ses installations.

EXTRAITS DU CODE CIVIL

Catherine Froment Avocate au barreau de Lyon. Article rédigé d’après une présentation programmée par GL Events Equestrian Sport, en collaboration avec l’Institut de droit équin, à l’AccorHotels Arena de Paris, le 12 avril.

- Article 1927
« Le dépositaire doit apporter, dans la garde de la chose déposée, les mêmes soins qu’il apporte dans la garde des choses qui lui appartiennent. »
- Article 1112-1
« Celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.
Néanmoins, ce devoir d’information ne porte pas sur l’estimation de la valeur de la prestation.
Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.
Il incombe à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que l’autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu’elle l’a fournie.
Les parties ne peuvent ni limiter ni exclure ce devoir.
Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d’information peut entraîner l’annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants. »