Pourquoi développer une école de chiots en clinique - La Semaine Vétérinaire n° 1766 du 01/06/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1766 du 01/06/2018

RELATION CLIENT

ÉCO GESTION

Auteur(s) : CHANTAL BÉRAUD  

De plus en plus de structures canines proposent une école de chiots face à une demande croissante. Cette prestation permet de fidéliser ses clients et valorise les équipes vétérinaires.

Une prestation comme une autre ? Diplômée en psychiatrie vétérinaire, Sylvia Masson propose une école de chiots à la clinique de la Tivollière (Voreppe, Isère). « Je souhaitais que mes clients puissent avoir ainsi accès à une offre éducative basée sur des méthodes non coercitives », explique-t-elle. Les vétérinaires sont-ils les professionnels les mieux placés pour offrir ce genre de service ? « Malheureusement non. Les études vétérinaires intègrent très peu notre discipline dans le cursus de base. En conséquence, les clients n’ont généralement pas le réflexe de se référer à leur vétérinaire pour les apprentissages primaires à apporter à leurs chiots, et c’est bien dommage parce que ce genre de cours permet de prévenir ou de détecter les troubles du comportement. Il peut aussi améliorer la relation vétérinaire-animal, via l’entraînement médical. »

De la formation jusqu’au suivi pathologique

En six ans d’existence, l’école des chiots a déjà évolué ! « Au départ, précise Sylvia Masson, j’ai assuré moi-même les cours (10 € par cession), chaque samedi matin. Puis, par manque de temps, j’ai formé mes assistantes vétérinaires. Mais maintenant que je participe à la formation d’éducateurs canins qui appliquent des méthodes d’éducation positives, je fais intervenir l’un d’entre eux. Je lui laisse à disposition un enclos. Et nous restons en relation pour suivre l’évolution des chiots ».

La structure propose donc aujourd’hui trois formules complémentaires : l’école des chiots (avec des apprentissages de base, la vérification de la propreté, la sociabilisation). L’école des adolescents (les exercices se compliquent et sont réalisés dans des situations plus variées). Enfin, des cours individuels sont également possibles. « Quand un jeune animal présente des difficultés, nous préconisons de lui faire d’abord suivre un cours individuel, précise Sylvia Masson. Le but est de trouver à chaque cas une solution adaptée et individualisée qui soit non coercitive et non cul pabilisante pour son propriétaire. Si le cas est plus grave, je propose alors une consultation de psychiatrie vétérinaire. Quant à la rééducation, elle se fait en partenariat avec l’éducateur, souvent en cours individuels au début, puis en cours collectif. »

Habituer l’animal à la clinique et aux soins…

Sylvia Masson apporte aussi dans son exercice une attention particulière aux chiots. « Ma consultation pour un premier vaccin dure une heure. Je prends en effet le temps de parler au propriétaire de tout ce qui concerne les vermifuges, les vaccins, bref l’examen “classique” de l’animal. Par ailleurs, je passe du temps sur l’aspect comportement en vérifiant que l’acquisition de la propreté, les peurs, les autocontrôles sont dans la norme. Je m’attache aussi à expliquer l’intérêt d’utiliser des méthodes non coercitives pour l’éducation. » Enfin, chaque soir, sans rendez-vous, entre 17 h et 19 h, les chiens peuvent venir gratuitement dans la clinique pour l’entraînement médical. « Les auxiliaires spécialisés vétérinaires (ASV) donnent une friandise à l’animal à l’accueil. Puis il passe en salle de consultation, où il est pesé, manipulé, où l’on fait semblant de réaliser différents examens », explique Sylvia Masson. Cela facilite les autres consultations médicales que l’animal aura à suivre le reste de sa vie dans la clinique… « Il se sentira mieux, et nous aussi ! »

À la Tivollière, l’école des chiots fait donc partie d’un ensemble d’autres prestations, visant à prendre en charge l’aspect psychologique et éducatif de l’animal comme faisant partie d’un tout. « Une seule médecine » qui intègre aussi le comportement.

UNE DEMANDE SOCIÉTALE CROISSANTE

Aux clients de la clinique Les Corfolands, à Courseulles-sur-Mer (Calvados), une école des chiots est proposée depuis 2010. Ce sont deux auxiliaires spécialisées vétérinaires (ASV), volontaires et motivées (Chloé Lemale et Corinne Marot), qui ont été formées pour assurer les séances, chaque samedi, de 12 h 30 à 13 h 30. Quand les chiots sont plus grands, ils peuvent ensuite suivre des séances d’agility. « Aujourd’hui,constate la vétérinaire Agnès Le Delezir, de nombreux propriétaires expriment des demandes croissantes en matière d’éducation et de sociabilisation des chiens. Répondre à ces attentes permet de les fidéliser un peu plus. Cela ancre aussi l’image de la clinique sur la prévention, le bien-être. Et puis, quand les propriétaires viennent (parfois en famille) le samedi matin à l’école des chiots, ils en profitent souvent pour poser une question à l’ASV, pour peser le chien, pour acheter un vermifuge, etc. Cela crée un lien plus joyeux avec les clients. »

UNE VITRINE SUR FACEBOOK AVEC UN SERVICE RÉSERVÉ À LA CLIENTÈLE

« Pour animer l’école, j’ai notamment suivi une formation de deux jours sur le comportement du chiot », explique Charlotte Beauquesne, auxiliaire spécialisée vétérinaire à la clinique L’Arche de Venoix (Caen, Calvados). J’ai aussi mon propre chien adulte, qui intervient en régulation. » Les propriétaires qui le souhaitent peuvent ainsi suivre une vingtaine de thématiques différentes. « C’est un service gratuit, réservé à notre clientèle,poursuit Charlotte Beauquesne.Si je m’aperçois qu’un chiot a un problème, nous conseillons à son propriétaire de consulter un autre professionnel, adapté à chaque cas. » Ce service permet également d’attirer à la clinique quelques nouveaux propriétaires de chiots. Il alimente aussi régulièrement de façon sympathique la page photo Facebook de la structure ! « Par ailleurs, il me semble que, grâce à l’école des chiots, quelque 30 % des propriétaires s’améliorent dans les soins quotidiens apportés à leur animal,conclut-elle. Notamment pour le nettoyage des yeux, des oreilles… »

DES CONSEILS BÉNÉFIQUES POUR LES VÉTÉRINAIRES ET LES CLIENTS

Chaque semaine, les clients de la clinique de Périers (Manche) peuvent faire suivre aux chiots, pour 6 € TTC, une heure de séance thématique (marche en laisse, petits soins, sorties en ville, forêt, plages, etc.). « Cela intéresse à chaque fois une dizaine de personnes, constate Linda Martino, vétérinaire à la clinique de Périers.Il n’y a pas d’inscription préalable, les clients sont prévenus de l’horaire (variable selon la météo), via la page Facebook et une affiche en salle. » Ces séances sont aujourd’hui assurées par une auxiliaire spécialisée vétérinaire (ASV), Ingrid. « Elles sont effectuées sur ses heures de travail, c’est une prestation qui la passionne », analyse Linda Martino. « Cela suppose de sa part pas mal de qualités : Ingrid est notamment douce, calme, patiente, car elle a à répondre à plein de questions ! En consultation, le vétérinaire donne des conseils, mais les gens ne retiennent pas tout. Du coup, Ingrid reprend des bases : quel est l’intérêt des vermifuges, de la stérilisation, etc. Elle leur apprend aussi à manipuler le chiot. » Des services qui aident un peu à fidéliser la clientèle, en donnant à la clinique une image plus conviviale. « L’idéal,conclut Linda Martino, serait de proposer ce serviceviaun binôme ASV-vétérinaire. » Elle l’a expérimenté autrefois : « Nous proposions un peu de théorie avant la pratique. Si j’avais aujourd’hui du temps, j’aimerais bien reprendre ! Car cela me rapprochait des clients tout en m’apprenant aussi beaucoup de choses en matière d’éducation. »