FILM
DITES-NOUS TOUT
Auteur(s) : MICHEL BERTROU
Si elle est bonne, une seule idée cinématographique peut justifier tout un film. Alors que, dans la majorité des productions américaines, l’épouvante est scandée par une débauche de sons graves ou stridents, celle-ci, à l’opposé, parvient à créer la sienne “sans un bruit”, en nous faisant hautement redouter l’apparition du moindre son. Le film s’ouvre sur une supérette à l’abandon, où un couple et ses trois enfants, sacs aux dos, font leurs provisions. Le silence est si complet que l’on se demande d’abord s’il n’y a pas un problème technique. Quand on comprend que n’émettre aucun bruit est ici pour chacun un enjeu de survie, on en vient à attendre en tremblant la première maladresse. Le film nous fera découvrir (tardivement) de mystérieux prédateurs surgis on ne sait d’où, créatures monstrueuses aveugles, aussi promptes qu’implacables grâce à une ouïe hyperdéveloppée. Au cœur de ce monde post-apocalyptique contraint au mutisme, la petite famille habite une ferme isolée, où elle s’est ingénieusement organisée pour vivre en sourdine, communiquant par signes. Des conditions de vie qui s’avéreront hautement périlleuses pour une femme qui accouche et son nouveau-né. Très habilement montée (on sursaute souvent dans son siège), cette parabole de la famille unie face à l’hostilité du monde, thème cher au cinéma américain, a l’avantage de ne pas être bavarde. Son suspense soutenu jusqu’au dernier plan ferait presque souhaiter que nos peurs soient aussi divertissantes dans la vie.
Sans un bruit de et avec John Krasinski, Emily Blunt, Millicent Simmonds, Noah Jupe, États-Unis, 1 h 30, sortie le 20 juin.