Maladie hémorragique virale du lapin : prévention - La Semaine Vétérinaire n° 1771 du 06/07/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1771 du 06/07/2018

CONFÉRENCE

PRATIQUE MIXTE

Formation

La maladie hémorragique virale du lapin (Rabbit Hemorrhagic Disease ou RHD) est une maladie infectieuse qui affecte les lapins domestiques et sauvages de l’espèce Oryctolagus cuniculus. L’agent étiologique, le RHDV, est un calicivirus du genre Lagovirus. La maladie est apparue à la fin des années 1980 en Europe. Un seul sérotype était initialement connu, incluant un variant antigénique RHDVa qui possède le même niveau de pathogénicité que le RHDV. À partir de 2010, un nouveau génotype, le RHDV2, a émergé et, aujourd’hui, c’est celui qui circule essentiellement en France métropolitaine. Actuellement, il n’existe aucun traitement possible. Expérimentalement, des traitements antihémorragiques ont été testés, mais se sont révélés inefficaces. En cause : la rapidité de l’évolution de la maladie qui ne laisse pas le temps de soigner le lapin qui meurt généralement des suites d’une coagulation intravasculaire disséminée. Par conséquent, la gestion de la maladie passe essentiellement par la prévention, qui repose avant tout sur une bonne vaccination et l’application de mesures de biosécurité. Pour que le virus ne circule pas aisément, il est habituellement admis que 70 % du cheptel doit être vacciné. Pour autant, les éleveurs – pour des raisons économiques – ne vaccinant que les reproducteurs, et les autres lapins domestiques étant très peu vaccinés, on peut penser que sur l’ensemble des lapins français, seuls 1 à 2 % sont réellement bien protégés. Un pourcentage insuffisant pour empêcher la circulation du RHDV2, qui passe aussi par la faune sauvage via le portage par les petits rongeurs ou la multiplication chez les lapins de garenne ou les lièvres. Par conséquent, il apparaît absolument nécessaire de renforcer les barrières sanitaires.

Appliquer les principes de biosécurité

Il convient d’abord d’éviter l’introduction du virus dans un élevage, en contrôlant les points d’entrée possibles du virus, à savoir les contacts avec les lapins sauvages (risque indirect : éleveurs chasseurs ; risque direct : crottes laissées sur le quai d’embarquement, ce qui attire le lapin sauvage), les contacts lors des foires et des expositions de lapins, ainsi que ceux lors de visites d’élevages sans précaution sanitaire. Pour entrer dans un élevage, plusieurs mesures doivent être mises en œuvre : ne pas se garer devant les entrées d’air, utiliser des pédisacs ou des chaussures restant à l’élevage, porter une charlotte jetable, une cotte jetable neuve, et non déjà présente sur l’exploitation, se laver et se désinfecter les mains (gel hydroalcoolique) avant et après la visite, et respecter les zones sales et propres des sas sanitaires. L’éleveur doit également changer de vêtements et de chaussures pour éviter tout risque de contamination depuis l’extérieur.

Respecter des mesures d’hygiènes strictes

L’éleveur est tenu de procéder à une désinfection du matériel et des locaux avec un produit virucide homologué à la dose recommandée. De plus, une lutte contre les vecteurs potentiels est conseillée. Elle inclut une dératisation ; la pose d’un grillage ou d’un cache-moineaux contre les oiseaux ; la fermeture hermétique des sorties des fosses, une vigilance vis-à-vis des chiens (le virus est retrouvé dans leurs excréments, puis sur leurs poils s’ils ont mangé un lapin contaminé) et, de façon générale, de tout animal domestique ; un éloignement des camions d’équarrissage, qui doivent s’arrêter loin de l’élevage. Il convient ainsi de déplacer le bac, puis de le désinfecter avant de le remettre en place. De plus, une prudence vis-à-vis des autres véhicules est de mise en les garant, si possible, loin de l’élevage. Enfin, il est recommandé d’installer une protection contre les lapins sauvages, en y associant un balayage des quais d’embarquement après chaque départ. Si des crottes sont présentes autour du bâtiment, chauler les abords est conseillé. À noter que les fourrages verts sont à proscrire pour les lapins de compagnie non vaccinés (contamination possible des aliments par des animaux domestiques et sauvages infectés).

Des mesures offensives en cas de foyer

Lorsque la maladie se déclare en élevage, l’éleveur doit mettre en place des mesures sanitaires offensives : un isolement du cheptel, en informant les partenaires afin d’éviter les visites ; une vaccination d’urgence pour les animaux vaccinés depuis plus de 5 mois ; une élimination, le plus rapidement possible, des animaux malades et suspects, avec un stockage des cadavres dans un bac fermé ; une destruction réglementée des cadavres par incinération (le virus persiste plusieurs mois sur les os des cadavres) ; une désinfection des locaux et du matériel avec un produit homologué employé aux doses virucides recommandées ; et enfin, un nettoyage complet, suivi d’une désinfection et d’un vide sanitaire (6 semaines) dans la salle concernée, quand cela est possible.

Deux vaccins commercialisés

En France, seuls deux vaccins contre le RHDV2 avec autorisation de mise sur le marché (AMM) sont actuellement disponibles : Filavac VHD KC+V (Filavie) bivalent, renfermant les valences RHDV et RHDV2 souche française, et Eravac (Hipra) monovalent, renfermant une valence RHDV2 espagnole. Il convient de retenir que la protection croisée entre RHDV et RHDV2 est faible. Il est donc essentiel d’adapter la souche vaccinale au contexte épidémiologique. Un consensus tenant compte des déclarations de pharmacovigilance en élevage de chair a été trouvé par les praticiens pour le protocole vaccinal des reproducteurs : primovaccination, deux injections à l’âge de 5 semaine, puis à 11 semaines, et rappel tous les 6 mois. Selon les fabricants, l’immunité est conférée 7 jours après la première injection. Cependant, depuis 2016, les chercheurs ont observé des lapins vaccinés depuis plus de 1 mois qui déclenchent la maladie. Des études sont en cours pour essayer de comprendre le phénomène et de l’enrayer.