CONFÉRENCE
PRATIQUE MIXTE
Formation
Auteur(s) : CLOTHILDE BARDE
La douleur animale, et plus particulièrement celle des animaux d’élevage, est une problématique de plus en plus prégnante dans notre société. En effet, sa prise en charge est indispensable pour les consommateurs et, au vu des connaissances scientifiques dont nous disposons, elle ne peut plus être négligée actuellement. Or, chez les ruminants, sa gestion peut être difficile car ses manifestations sont souvent difficiles à détecter cliniquement et la pharmacopée dont les vétérinaires disposent est assez réduite.
Certains avantages d’une bonne gestion de l’analgésie sont cependant indéniables et il est important de ne pas raisonner sur une question de coûts, car ils peuvent être amortis par les effets bénéfiques sur la production (croissance, production laitière, etc.). Pour cela, il sera important de moduler l’analgésie suivant le type d’intervention et, autant que possible, suivant un mode multimodal.
La douleur n’est pas forcément un processus péjoratif pour l’animal. Une douleur physiologique est importante car elle sert d’alerte et permet une procédure de retrait face au stimulus douloureux. C’est un mécanisme de protection permettant de limiter les conséquences du contact. Cependant, lorsque la douleur fonctionnelle nécessaire est dépassée, elle devient inadaptée et c’est le reflet d’un phénomène pathologique. L’intensité et/ou la durée de la sensation de douleur n’ont plus alors de rapport avec l’intensité du stimulus : le ressenti de la douleur déclenchée par un stimulus de faible intensité (inférieur au seuil qui conduirait à une douleur normale) est ressenti de manière exagérée. En l’absence de thérapeutique adaptée, cette douleur pathologique conduira à une sensibilisation favorisant un allongement du phénomène douloureux dans un premier temps puis, à terme, au développement d’une douleur chronique.
Concernant les anesthésiques locaux, seule la procaïne dispose actuellement d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) chez les ruminants. La lidocaïne, pourtant utilisée historiquement, n’en dispose pas et, de ce fait, ne peut plus être utilisée. Plusieurs stratégies sont proposées : dépôt à l’extrémité distale des nerfs périphériques, le long des troncs nerveux (anesthésie tronculaire ou locorégionale) ou au niveau du canal rachidien (rachianesthésie).
Une autre classe d’anesthésique, les α-2-agonistes, est utilisable. Deux molécules disposent d’une AMM chez les bovins (xylazine et démétomidine). Ces molécules sont, de par leur mode d’action, à l’origine d’une sédation, d’une myorelaxation et d’une analgésie.
Parmi les traitements antalgiques essentiels chez les bovins, on peut aussi citer les anti-inflammatoires, et notamment les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS). Ils exercent un effet anti-inflammatoire et analgésique, en réduisant la synthèse de prostaglandines par l’intermédiaire de l’inhibition de l’enzyme cyclo-oxygénase (COX-1 ou 2) au niveau des tissus périphériques et du système nerveux central (SNC). Il s’agit du kétoprofène (AINS non selectifs COX-2) et du meloxicam (AINS-COX-2). Les morphiniques, eux, agissent sur des « récepteurs morphiniques » (μ, κ et δ) situés au niveau de la moelle épinière et de l’encéphale, dont la stimulation contribue à bloquer la transmission du signal au niveau de la synapse à l’étage médullaire, ainsi que les voies d’activation inhibitrices descendantes allant inhiber les neurones médullaires. Chez les bovins, seul le butorphanol dispose des limites maximales de résidus (LMR) fixées dans l’espèce équine, il est par conséquent utilisable dans le cadre de la cascade même si les bovins sont moins sensibles aux effets des morphiniques.
Enfin, la kétamine, anesthésique dissociatif, peut être utilisée à des doses infraanesthésiques pour limiter le développement d’une sensibilisation centrale et de l’hyperalgésie. Son utilisation a ainsi été étudiée dans le cadre de protocoles de castration chez des taurillons en complément de la xylazine, mais aussi par voie péridurale, seul ou en complément de lidocaïne, lors d’interventions obstétricales chez des génisses. L’imalgène est la seule spécialité qui dispose d’une AMM chez les bovins.
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