La peste des petits ruminants : vers une éradication mondiale ? - La Semaine Vétérinaire n° 1777 du 14/09/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1777 du 14/09/2018

PLAN STRATÉGIQUE

PRATIQUE MIXTE

L'ACTU

Auteur(s) : CLOTHILDE BARDE 

Lors de la conférence organisée par l’Organisation mondiale de la santé animale et l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, qui s’est tenue à Bruxelles les 6 et 7 septembre, plus de 45 pays ont réitéré leur engagement en faveur de l’éradication mondiale de la peste des petits ruminants d’ici 2030.

La peste des petits ruminants (PPR), maladie hautement contagieuse responsable de la mort de millions d’ovins et de caprins chaque année (jusqu’à 90 % des animaux infectés), est à l’origine de pertes économiques annuelles de plus de 2,1 milliards de dollars à travers le monde. C’est une « menace directe [pour] les moyens d’existence des personnes les plus pauvres dans leurs pays », ont indiqué les participants à la dernière conférence internationale de l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) et de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) dans leur déclaration ministérielle.

Or, cette maladie est encore fortement présente à travers le monde1. En effet, après avoir été détectée pour la première fois en Côte d’Ivoire en 1942, elle s’est peu à peu propagée à plus de 70 pays en Afrique, au Proche et au Moyen-Orient et en Asie avant d’atteindre l’Union européenne (Bulgarie) en juin 2018.

Un objectif ambitieux, de plus en plus envisageable

Face à cette situation, la lutte s’est organisée depuis 2015 avec l’adoption par la FAO et l’OIE de la stratégie mondiale de lutte et d’éradication de la PPR2, puis à travers le programme mondial d’éradication de la PPR 2017-20213, qui détaille les plans stratégiques nationaux de lutte et d’éradication (protocole de vaccination, estimation des ressources financières). De nouvelles stratégies vaccinales sont développées. En effet, d’après les résultats d’une étude scientifique4publiée dans la revue PNAS5 le 27 juillet dernier, alors que les campagnes massives de vaccination préconisées jusqu’à présent sont coûteuses et très compliquées à mettre en œuvre d’un point de vue logistique, une vaccination ciblée pourrait être la voie à poursuivre.

Les chercheurs ont combiné un modèle dynamique simulant la dissémination du virus avec une étude sérologique nationale. Les informations obtenues ont permis d’évaluer le niveau de transmission virale en zone endémique et la couverture vaccinale nécessaire pour stopper cette transmission et éliminer la maladie. Les résultats suggèrent qu’une vaccination ciblée sur des systèmes de production agissant comme des réservoirs du virus (certains systèmes de production pastorale notamment) permettrait de « réduire le coût d’éradication de maladie tout en augmentant la probabilité de succès », comme l’a expliqué Guillaume Fournié, épidémiologiste au Royal Veterinary College.

Un engagement mondial

C’est ainsi que pour renforcer cet engagement dans l’éradication de la PPR, la conférence mondiale organisée à l’initiative de la FAO et de l’OIE a réuni début septembre près de 270 participants, dont des ministres issus de plus de 45 pays infectés ou menacés par la PPR, ainsi que des représentants des partenaires, de la société civile et d’organisations non gouvernementales. Ils ont alors pu partager leurs connaissances et ont réitéré leur volonté de faire disparaître la maladie d’ici 15 ans, grâce à la mise en place d’une approche harmonisée, coordonnée et durable. À cette occasion, Monique Eloit, directrice générale de l’OIE, a d’ailleurs souligné l’importance de « renforcer les services vétérinaires nationaux », mesure qu’elle juge « essentielle afin de mener à bien cet objectif commun ». Enfin, les pays présents ont appelé les partenaires ressources et la communauté du développement à combler le déficit financier de 340 millions de dollars du programme mondial d’éradication de la PPR.

Cette dernière pourrait être à l’avenir la troisième maladie infectieuse à pouvoir être éradiquée après la variole et la peste bovine.

1 bit.ly/2NcBtcl.

2 bit.ly/2NLzN9l.

3 bit.ly/2OhhUw6.

4 le Cirad et menés par le Royal Veterinary College (université de Londres), en collaboration avec des partenaires éthiopien et européens : National Veterinary Institute (Ethiopie), INRA et ENVT (France), Epicentre (France), London School of Hygiene & Tropical Medicine (Royaume-Uni), City University of Hongkong (China).

5 Proceedings of the National Academy of Sciences.