Quel accompagnement de la fin de vie avez-vous mis en place ? - La Semaine Vétérinaire n° 1781 du 11/10/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1781 du 11/10/2018

FORUM

@... VOUS !

CONTRIBUER AU PROCESSUS DE DEUIL

C’est un évènement brutal et difficile, d’autant que l’animal est aujourd’hui un membre de la famille. Depuis quelques années, nous essayons d’améliorer la fin de vie. Nous avons commencé en proposant plus souvent aux propriétaires de récupérer le corps de leur animal afin de l’enterrer. Puis nous avons travaillé avec Anima Care et leurs outils : des guides qui aident à connaître les différentes possibilités et à prendre une décision, une lanterne à placer dans la salle d’attente qui appelle au recueillement et à la compassion. Nous utilisons également Euthabag®, qui contribue au processus de deuil en permettant d’effectuer la mise en bière avec le concours des propriétaires, et en épargnant à l’équipe l’utilisation de sacs plastiques. Si un animal meurt pendant l’hospitalisation, nous plaçons ses effets personnels dans une boîte de sympathie. Nous envoyons à certains propriétaires une carte manuscrite pour exprimer nos condoléances. Si certains le souhaitent, nous les dirigeons vers un cimetière animalier ou un établissement de crémation privée. Les clients témoignent leurs remerciements, leur soulagement et parfois leur gratitude, ils reviennent plus facilement, alors que c’est un moment où nous pouvons facilement les perdre.

AUJOURD’HUI, JE LE VIS PLUS SEREINEMENT

Concernant la fin de vie, c’est davantage mon discours et ma posture qui ont changé, ils sont un peu plus philosophique. J’essaie de parler du fait que nos animaux ont des cycles de vies plus courts que les nôtres. Être confronté à leur mort, bien que ce soit douloureux, est naturel. Ma clientèle est de moins en moins rurale, elle relativise moins facilement qu’autrefois par rapport à ce sujet. Quand je vois que l’animal a le regard dans le vide, qu’il n’est plus du tout communiquant, je mets l’accent sur la souffrance. Plus concrètement, je n’ai pas changé de protocole, j’essaie de faire ça le plus rapidement possible et j’explique systématiquement que c’est important que les propriétaires soient présents, au moins pour l’anesthésie. Aujourd’hui, je ne vis plus cet acte comme un stress, je le vis plus sereinement, peut-être grâce à l’âge et à la durée de ma pratique. En général, les gens le vivent bien, ils sont parfois même reconnaissants. J’ai vu que de nouvelles choses existaient, comme l’empreinte de patte de leur animal ou des cartes, personnellement je ne me sens pas de les proposer. Je pense qu’il faut s’adapter aux clients et être cohérent avec notre attitude envers eux.

JE TRAVAILLE BEAUCOUP À L’AIDE À LA DÉCISION

J’ai de plus en plus recours aux housses mortuaires, type Euthabag®. Je privilégie systématiquement l’anesthésie avant toute euthanasie. J’ai un endroit dédié à cela. Je travaille beaucoup à l’aide à la décision, le deuil est d’autant plus facile à gérer que cette décision est prise sereinement et que l’euthanasie est faite sans douleur. J’essaie toujours de prendre rendez-vous avec les propriétaires et je favorise le fait qu’ils puissent être là jusqu’au bout. Les gens verbalisent plus facilement leur lien émotionnel avec leur animal. Et le fait d’être triste à sa perte est de moins en moins perçu comme honteux, c’est considéré comme un deuil à part entière et pas seulement une perte. J’observe une hyper-sensibilité des personnes aux gestes médicaux, à la douleur, et une capacité à gérer les émotions moins évidente. Réussir une euthanasie est professionnellement gratifiant, l’attitude du vétérinaire est prédominante. L’acte d’euthanasie peut être riche humainement et en émotions partagées, on peut aider les personnes, on se sent utile. Après l’euthanasie, je reste à leur écoute. Il existe ce risque, pour le vétérinaire qui exerce depuis longtemps, de banaliser cet acte et les émotions des personnes. Il faut en prendre conscience pour l’éviter.