Que pensez-vous de la phytothérapie pour les ruminants ?
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Auteur(s) : CHANTAL BÉRAUD
IL FAUT APPRENDRE À ENCADRER CETTE PRATIQUE
Nous sommes face à un fort engouement des éleveurs pour la phytothérapie. Malheureusement, ils achètent parfois ces produits à de simples commerçants, dont de nombreux compléments alimentaires vendus sans autorisation de mise sur le marché (AMM). Les éleveurs sont aussi souvent à la recherche de simples formules pour résoudre leurs problèmes, qui sont, en fait, à 80 % d’origine zootechnique ! Moi, je pratique différemment, en vérifiant d’abord quels sont les fondamentaux du troupeau : quelle hygiène ? Quel confort ? Y a-t-il un surpeuplement ou pas ? Etc. Je me demande aussi si l’on est face à un pathogène ciblé pour lequel je peux effectivement recommander une vaccination. Dans d’autres cas, je considère qu’on peut l’éviter en revenant à davantage de zootechnie, avec éventuellement un accompagnement complémentaire à base de plantes. Mais je pense qu’exercée seule la phytothérapie n’est pas meilleure que, par exemple, une utilisation systématique des antibiotiques ! Ce devrait être un outil complémentaire dans l’exercice de notre profession. Si un certain nombre de mes confrères s’en désintéressent – voire même s’y opposent de manière un peu brutale – notre profession risque à l’avenir de se trouver confrontée au développement de ce genre de pratique sur le terrain, hors de tout contrôle et cadre vétérinaire. Ce serait dommage. • EDWIGE BORNOT
LA DEMANDE DES ÉLEVEURS S’ACCÉLÈRE AUJOURD’HUI
Je me suis intéressé à la phytothérapie en suivant une formation continue. Là, j’ai compris qu’il ne s’agit pas d’utiliser des recettes toutes faites, mais qu’il faut mettre en place un raisonnement, qui suit la même méthodologie qu’il s’agisse d’animaux de compagnie, de chevaux ou de bovins. à la base, il est toujours indispensable d’établir un bon diagnostic, souvent après avoir effectué une visite de l’élevage. À la suite de quoi, je préconise ou pas mes propres mélanges. Par exemple, je continue d’utiliser plutôt des antiparasitaires chimiques, car la phytothérapie ne propose rien d’efficace dans ce domaine. En revanche, dans d’autres cas, elle m’apporte des résultats que je ne parviendrais pas à obtenir avec de la médecine conventionnelle. Par exemple, elle est efficace pour traiter la pneumonie des veaux, car les plantes contiennent des antiviraux. En revanche, il vaut mieux pouvoir traiter en tout début de problème, ce qui suppose d’avoir été alerté rapidement par des professionnels qui sont des éleveurs dans l’âme, capables de bien observer leurs troupeaux. Et comme la demande des éleveurs augmente en la matière, si notre profession ne veut pas se trouver débordée par d’autres concurrents, il faut que les praticiens vétérinaires se jettent à l’eau en utilisant la phytothérapie comme une corde de plus à leur arc ! • JÉRÔME LEGRIS
LA PHYTOTHÉRAPIE EST GÉNÉRALEMENT EFFICACE
Il n’a plus été autorisé d’utiliser du “sérocat” pour soigner le coryza du chat : j’ai donc essayé, en remplacement, des traitements de phytothérapie, qui ont réussi. Du coup, cela m’a donné envie de me lancer dans le traitement d’autres maladies que les affections virales et je confectionne désormais mes préparations magistrales personnalisées, pour un animal seul ou pour des lots (par exemple, pour un lot de taurillons souffrant d’une même affection respiratoire). De par ma pratique, je constate que généralement la phytothérapie est efficace, à condition bien sûr d’avoir au préalable établi un bon diagnostic ! Je m’aperçois que non seulement la maladie est surmontée, mais qu’on obtient aussi souvent d’autres résultats positifs, grâce aux interactions synergiques entre les molécules des extraits de plantes. Avec pour résultat, par exemple, un veau guéri de sa diarrhée, mais qui devient aussi plus tonique, car les principes actifs issus des plantes ont également contribué à améliorer son état général. De plus en plus de vétérinaires s’intéressent à la phytothérapie, même s’il leur faut notamment avoir le courage de replonger dans leurs bouquins pour apprendre les mécanismes d’action des principes actifs des extraits de plantes ! Et depuis 2018, un énorme progrès a été fait avec la création du diplôme interécoles de phytothérapie vétérinaire. • MARIE-ANNICK VENTÉJOU