Des conditions d’application du règlement sanitaire départemental - La Semaine Vétérinaire n° 1785 du 09/11/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1785 du 09/11/2018

JURISPRUDENCE

ÉCO GESTION

Auteur(s) : CÉLINE PECCAVY  

L’analyse du commentaire du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Toulouse le 28 septembre 2018 montre que l’application du RSD ne concerne que les bâtiments où les animaux stationnent en permanence.

Les faits : Mme M. a repris en 2005, avec son époux, un centre équestre fonctionnant sous forme d’écurie de propriétaires. À proximité de ce centre vivent depuis de nombreuses années les époux P.

En septembre 2013, la situation a quelque peu changé. Mme M., divorcée, a repris seule le centre et l’a ouvert à des cavaliers non propriétaires. Mme P., quant à elle, est devenue veuve. Commence alors une guerre ouverte entre les deux voisines. Mme P. se plaint en effet de nombreuses nuisances de voisinage.

Procédures

Mme P. entend bien faire reconnaître son préjudice. Elle saisit donc initialement le juge des référés sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile, afin d’obtenir une expertise judiciaire.

Ce litige présente déjà à ce stade un grand intérêt. Il est en effet assez rare que le juge des référés rejette une demande d’expertise. C’est pourtant bien ce qui va arriver en l’espèce. Par ordonnance du 15 juillet 2016, le juge des référés va rappeler qu’il faut, pour obtenir une expertise, un motif légitime, constater que Mme P. a déjà par deux fois fait venir son expert d’assurance, qu’elle dispose de deux rapports.

Demande rejetée.

Mme P ne baissera pas les bras. Elle saisit donc le tribunal de grande instance au fond et sollicite l’indemnisation forfaitaire de 20 000 €.

Arguments

Mme P. attaque sur plusieurs fronts. Elle se plaint ainsi du fait que la carrière est à l’origine d’une propagation importante de poussière, de bruits et d’insectes de toute sorte et du fait que l’auvent construit à côté de la carrière génère des odeurs permanentes qui deviennent difficilement supportables lors d’épisodes venteux ou en période estivale.

Par ailleurs, elle remet directement en cause la légalité de certaines structures, telles que la carrière et deux lieux de préparation des chevaux, dans la mesure où ils sont situés à moins de 50 m de son habitation. Pour Mme P., ces structures sont donc en infraction avec le règlement sanitaire départemental (RSD).

Textes applicables

Le juge devait se pencher avant tout sur la légalité de l’implantation des structures et seulement ensuite sur la question du trouble anormal de voisinage.

En matière de troubles de voisinage, c’est à celui qui se plaint d’apporter une preuve concrète et non à celui qui est accusé de prouver qu’il ne cause aucune nuisance.

En l’espèce, les experts d’assurance de Mme P. n’avaient fait aucune constatation précise. Leurs rapports se bornaient à relater les plaintes de celle-ci.

Alors que de son côté elle n’y était pas tenue, Mme M. va faire venir un huissier de justice qui rendra un rapport notamment sur le volume sonore lors des cours.

Avec tous ces éléments le tribunal a tranché.

Jugement rendu

Le point le plus intéressant est incontestablement celui de la question du respect du RSD :

« Il n’est pas contesté que les installations nécessaires à l’exploitation du centre que sont la carrière, la lice de préparation des poneys et un auvent permettant d’attacher les poneys pour les préparer en vue d’un cours soient situés à moins de 50 m de la maison d’habitation de la demanderesse. S’il est exact que l’article 153-4 du règlement sanitaire départemental produit prévoit que les bâtiments renfermant des animaux d’élevage ne peuvent être implantés à moins de 50 m des immeubles habités par des tiers, ces dispositions ne peuvent s’appliquer aux trois installations sus-mentionnées, qui ne constituent pas des bâtiments au sens de cet article et que les animaux qui y sont présents n’y stationnent pas en permanence. »

C’est tranché : l’application du RSD ne concerne que les bâtiments où les animaux stationnent en permanence.

Pour le reste, le juge va constater que les deux rapports établis par le cabinet d’assurance de Mme P. ne font état d’aucune réelle constatation. Le procès-verbal d’huissier sera également considéré par le juge pour débouter totalement Mme P de ses demandes.

En conclusion : une jurisprudence notable quant aux conditions d’application du RSD.