SYNTHÈSE
PRATIQUE CANINE
Formation
Auteur(s) : MYLÈNE PANIZO
La giardiose est une maladie parasitaire à localisation mondiale et au potentiel zoonotique. Giardia intestinalis (également appelé G. duodenalis ou G. lamblia) atteint de nombreux mammifères, dont le chien, le chat, le furet et l’homme. En Europe, la prévalence chez le chien se situe entre 1 à 50 % selon les études1. Elle varie nettement en fonction des méthodes de détection utilisées, le type d’individu (prévalence plus importante chez les jeunes) et le contexte (regroupement d’animaux). Chez le chat, elle est moins importante que chez le chien : elle est estimée à environ 12 %2.
L’infection est due à l’ingestion de kystes présents dans l’environnement (sur le pelage des animaux, l’eau ou des aliments contaminés). Il n’y a pas d’hôte intermédiaire. Dans l’intestin grêle, les kystes libèrent des trophozoïtes (formes mobiles) qui se multiplient et adhèrent aux cellules épithéliales. Ils se réenkystent dans le gros intestin, puis sont excrétés de façon intermittente. Les trophozoïtes peuvent être excrétés en cas de diarrhées liquidiennes importantes, mais cette forme parasitaire ne survit pas dans l’environnement. Seuls les kystes peuvent persister plusieurs mois. La période prépatente (durée entre l’ingestion du kyste et son excrétion) est courte : en général, elle dure moins d’une semaine. La période patente (durée d’excrétion des kystes) peut, quant à elle, durer plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Les réinfections sont fréquentes.
Les giardias provoquent, généralement, des diarrhées caractérisées par la présence de selles nauséabondes, pâteuses, mucoïdes, avec une stéatorrhée. Des diarrhées liquides avec méléna ou sang en nature sont plus rares. Il n’y a, la plupart du temps, pas d’altération de l’état général, sauf en cas de coinfection (virale ou bactérienne) ou d’immunodépression. Chez les jeunes animaux, la giardiose peut être associée à une anorexie, à des vomissements, à une perte de poids et à de l’abattement. Il n’est pas rare que l’infection soit asymptomatique (surtout chez les adultes) ou que les symptômes soient intermittents.
Le diagnostic différentiel des diarrhées aiguës prend en compte une infestation par des vers ronds, une coccidiose, une indigestion ou un changement alimentaire, la présence d’un corps étranger, une intoxication, les effets secondaires de médicaments ou encore les entérites bactériennes et virales. Celui des diarrhées chroniques comprend essentiellement les pullulations bactériennes et l’insuffisance du pancréas exocrine, maladie pouvant donner un tableau clinique très similaire à la giardiose.
Plusieurs méthodes sont décrites, de l’observation directe à l’analyse par polymerase chain reaction (PCR). Il est évoqué ici les techniques de diagnostic pouvant se réaliser au chevet de l’animal.
- L’observation directe des selles : il est nécessaire d’analyser un mélange de selles sur 3 jours (du fait de l’excrétion intermittente des kystes). L’opérateur doit être entraîné, car les kystes de giardia ressemblent à des levures. Les trophozoïtes peuvent être observés en cas de selles liquidiennes ; ils ressemblent aux tritrichomonas. Il n’y a pas de relation entre l’intensité d’excrétion de kystes dans les selles et la symptomatologie.
- La coproscopie par flottaison : elle permet d’avoir plus de chance d’observer des kystes par rapport à l’observation directe, car elle utilise une méthode de concentration. Cette technique est longue et fastidieuse, et l’opérateur doit être compétent.
- Les tests rapides : l’immunochromatographie recherche des antigènes présents à la surface des kystes. Un résultat positif permet de conclure, mais un résultat négatif peut être dû à l’excrétion intermittente des kystes.
- Le Snap Elisa (laboratoire Idexx) se base sur la recherche d’une protéine libérée par les trophozoïtes pendant l’enkystation. Il permet de s’affranchir de l’intermittence de l’excrétion des kystes. Cette technique peut être réalisée sur des selles conservées au réfrigérateur jusqu’à 7 jours maximum. Cette méthode possède une bonne sensibilité2.
Giardia intestinalis présente différents génotypes (nommés de A à G) qui ont une spécificité d’hôtes variable. Actuellement, les souches des assemblages A et B sont les seules considérées comme étant zoonotiques, car elles sont retrouvées chez le chien, le chat et l’homme. Les souches C et D sont absentes chez l’homme, mais fréquemment présentes chez le chien. Cependant, toute giardiose diagnostiquée doit être considérée comme potentiellement zoonotique, car il n’est pas possible, avec les outils de diagnostic au chevet de l’animal, d’identifier le type génétique du parasite (seule la PCR le permet).
Le traitement est indispensable pour les animaux symptomatiques. Il est recommandé pour les porteurs sains si le contexte présente un danger de contamination accrue : présence d’enfants ou de personnes immunodéprimées dans le foyer, regroupements d’animaux, promenade sans laisse et baignade. Il n’est pas recommandé de traiter un animal adulte porteur sain vivant au sein d’un foyer d’adultes sains, car le traitement peut présenter des effets secondaires et des résistances sont possibles.
Un seul médicament commercialisé en France possède une autorisation de mise sur le marché pour la giardiose chez le chien et le chat. Il s’agit du Metrobactin® (métronidazole, Dechra®). Le traitement de l’environnement est essentiel pour prévenir les réinfestations. Il est nécessaire de réaliser un shampoing sur les animaux, et de nettoyer l’environnement à l’aide de produit contenant des ammoniums quaternaires. Il convient également de veiller à une bonne hygiène individuelle.
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1 Gonin P. O. Analyse factuelle du traitement de la giardiose canine et recherche de facteurs de risque de récidive. Thèse de doctorat vétérinaire, VetAgro Sup, 2017.
2 Bouzid M., Halai K., Jeffreys D. et coll. The prevalence of giardia infection in dogs and cats, a systematic review and meta-analysis of prevalence studies from stool samples. Vet. Parasitol. 2015;207(3-4):181-202.