Les ulcères de la portion glandulaire de l’estomac Partie   1 : facteurs de risque et signes cliniques - La Semaine Vétérinaire n° 1786 du 16/11/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1786 du 16/11/2018

CONFÉRENCE

PRATIQUE MIXTE

Formation

Auteur(s) : ANNE COUROUCÉ  

Aucun praticien équin ne peut ignorer l’importance des ulcères gastriques chez les chevaux. Toutefois, il est aujourd’hui reconnu que le syndrome des ulcères gastriques appelé précédemment EGUS (equine gastric ulcer syndrome), englobe deux affections distinctes avec des chevaux présentant des ulcères gastriques non glandulaires ou squameux (UGNG) et des chevaux présentant des ulcères gastriques glandulaires (UGG). Beaucoup de vétérinaires diagnostiquent et gèrent au quotidien des cas d’UGNG. Pour ce qui est des cas d’UGG, cela est souvent plus compliqué, leurs causes sous-jacentes pouvant être différentes. Quels sont les facteurs de risque.

La race, l’âge, le sexe ?

Des études post-mortem ont mis en évidence que les ulcères glandulaires sont significativement associés avec la race et sont plus fréquents chez les galopeurs et les trotteurs. D’autres études sur des chevaux de sport au Danemark ont montré qu’il y avait une plus forte prévalence d’ulcères glandulaires chez certaines races. De ce fait, ce type d’ulcère est très probablement associé avec des facteurs environnementaux et de gestion des chevaux (nature, fréquence et intensité de l’exercice, alimentation, autres affections, mise en box, interaction sociale, etc.). Des chevaux nourris avec de la paille et n’ayant pas accès à l’eau au paddock étaient, par exemple, plus sujets à ce type d’ulcère. Une autre étude menée sur des chevaux de sport de loisir en Grande-Bretagne a permis de montrer que ni l’âge, ni le sexe du cheval, ni le mois de diagnostic n’avaient d’effet sur la prévalence de ces ulcères.

Quelle relation avec l’exercice ?

Chez les pur-sang et les chevaux de saut d’obstacles, il a été montré qu’un entraînement de plus de 4 ou 5 jours par semaine était significativement associé à la présence d’UGG. Néanmoins, l’intensité de l’exercice n’était pas un facteur significatif. Chez des chevaux d’endurance de haut niveau, la prévalence de ces ulcères était multipliée par deux lors de la saison de compétition par rapport à la période de repos. Chez les jeunes chevaux de sport, la prévalence des UGG était inversement proportionnelle au niveau d’expérience, tant chez des chevaux de concours de saut d'obstacles (CSO) que chez des chevaux de polo.

De la même façon, chez l’homme, le risque d’ulcères gastriques augmente avec la quantité et la fréquence de l’exercice plutôt qu’avec son intensité. Les affections gastriques humaines sont plus communes chez les athlètes et cela peut être à relier avec une réduction de l’apport sanguin à l’estomac au cours de l’exercice. L’exercice peut ainsi être un exemple de stress physiologique sur la muqueuse gastrique.

La quantité globale de l’exercice, et notamment le nombre de jours d’exercice par semaine, est ainsi plus significative comme facteur de risque d’UGG que l’intensité ou la durée de l’exercice.

Quelle relation avec le stress ?

Chez l’homme, le stress est un facteur de risque important pour la survenue d’ulcères peptiques. Les chevaux qui “tiquent à l’air” et qui peuvent être considérés comme stressés n’ont pas de prévalence augmentée d’UGG. Ces comportements stéréotypiques pourraient ainsi être considérés comme un moyen de gérer un stress augmenté. Il a été récemment montré que les chevaux présentant des UGG ont des taux de cortisol plus élevé en réponse à un nouveau stimulus, suggérant que ces chevaux seraient plus sensibles au stress. Néanmoins, chez ces chevaux, la résolution des UGG ne signifiait pas une résolution de la réponse au stress. Une autre explication serait que le cheval présente une réponse augmentée au stress du fait de la présence de ces ulcères gastriques glandulaires.

La réduction de la prévalence de ces ulcères chez des chevaux plus expérimentés (polo et CSO) peut également signifier une adaptation au stress physiologique, ces chevaux plus expérimentés ayant des taux de cortisol plus bas. Il est très difficile de donner des recommandations pour réduire le stress, car chaque cheval répond différemment aux stimuli stressants. La gestion doit être adaptée à chaque individu.

Quelle relation avec les AINS ?

Historiquement, les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ont été considérés comme un facteur de risque pour les UGG. Toutefois, il n’existe aujourd’hui pas suffisamment de preuves pour démontrer, qu’à une dose standard, les AINS augmentent la prévalence de ces ulcères. Cela sera en revanche le cas à dose élevée. Les ulcères gastriques induits par ce type de traitement sont toutefois assez différents de ceux survenant naturellement.

Quelle relation avec la ration alimentaire ?

Si rien ne démontre le lien entre la ration alimentaire et le développement d’ulcères gastriques, des données suggèrent que l’accès à la pâture serait un facteur protecteur. S’agit-il d’un effet nutritionnel ou d’un effet sur le bien-être de l’animal, ce dernier pouvant alors adopter un comportement normal de cheval qui broute au sein d’un troupeau ? Il n’existe pas aujourd’hui de recommandation type pour l’alimentation de ces chevaux, mais il semble logique d’optimiser les périodes en extérieure pour brouter et de s’assurer que le cheval ne fait pas d’exercice l’estomac est vide.

Quelle relation avec la douleur ?

De nombreux praticiens ont également noté une association entre UGG et douleur musculo-squelettique notamment chez les chevaux de sport. Toutefois, leur présence concomitante peut simplement être le fait de la prévalence élevée de ces deux affections.

Pour en savoir plus :

- Rendle D. I., Bowen I. M. , Brazil T. J. et coll. EGGD Consensus Statement: recommendations for the management of equine glandular gastric disease. UK-Vet Equine. 2018(2):1-12 bit.ly/2B7fwnE.

- Hepburn R. J. Endoscopic examination of squamous and glandular gastric mucosa in sport and leisure horses: 684 horses (2005-2011). Proceedings of the 11th International Equine Colic Research Symposium. 2014:5.

- Luthersson N., Nielsen K. H., Harris P., Parkin T. D. The prevalence and anatomical distribution of equine gastric ulceration syndrome (EGUS) in 201 horses in Denmark. Equine Vet J. 2009;41(7):619-624.

RECOMMANDATIONS POUR RÉDUIRE LES UGG

Tim Brazil DMV, diplomate Eceim. Michael Hewetson DMV, diplomate Eceim. Article rédigé d’après une présentation faite lors du congrès de la BEVA, à Birmingham (Grande-Bretagne), du 13 au 15   septembre.

- Assurer un minimum de 2 jours de repos par semaine, ou des périodes de repos régulières.
- Mettre les chevaux en extérieure dans la mesure où cela n’engendre pas de stress supplémentaire
- Minimiser les changements dans la gestion du cheval et tout facteur de stress.
- Conserver l’environnement habituel du cheval (autres équidés et personnes qui s’en occupent).
- Apporter du fourrage environ 30 minutes avant l’exercice.