Optimiser l’interprétation histologique lors de complexe respiratoire porcin - La Semaine Vétérinaire n° 1786 du 16/11/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1786 du 16/11/2018

CONFÉRENCE

PRATIQUE MIXTE

Formation

Auteur(s) : TANIT HALFON  

Dans le contexte du complexe respiratoire porcin, le lésionnel macroscopique seul observé à l’autopsie n’est généralement pas suffisant pour déterminer le ou les agents pathogènes impliqués. Des examens complémentaires, dont l’analyse histologique, doivent être effectués. Néanmoins, la fiabilité des résultats dépend de plusieurs facteurs : qualité des prélèvements, durée d’évolution de la maladie, etc. Aussi, faut-il respecter un certain nombre de conditions avant envoi. De plus, l’information apportée par l’histologie n’est pas forcément suffisante et d’autres examens tels que la bactériologie, la sérologie, la réaction en chaîne par polymérase (PCR), voire l’immunohistochimie sont à envisager.

Transmettre des prélèvements de qualité

Les prélèvements sont à envoyer dans un fixateur adapté (généralement du formol tamponné), en respectant un rapport de 1 sur 10 entre les tissus et le fixateur. Leur taille moyenne doit être d’environ 1 cm3. Un prélèvement de petite taille est indispensable pour garantir une bonne fixation des prélèvements gorgés de sang (comme la rate) ou des parenchymes denses (comme le foie). Néanmoins, des prélèvements de plus grande taille sont possibles, en particulier pour des échantillons aérés tels que le poumon, et peuvent parfois permettre d’éviter les artefacts induits par l’incision. Cette incision du parenchyme doit être nette, effectuée à l’aide d’une lame tranchante aiguisée, en évitant les artefacts d’écrasement (éviter la découpe aux ciseaux). à la différence des intestins, les poumons s’autolysent moins rapidement après la mort de l’animal1. Il est ainsi possible d’attendre quelques heures, à condition de conserver l’animal au frais et que ce dernier ne soit pas trop gras. Un poumon prélevé trop tardivement rendra cependant l’histologie ininterprétable, du fait notamment d’une dégradation de l’épithélium des bronchioles et des bronches, de l’exsudation de liquide dans les alvéoles ou encore de la prolifération post-mortem de bactéries anaérobies (putréfaction).

Prélever des échantillons représentatifs

Pour une meilleure représentativité des lésions, l’idéal est d’examiner un animal montrant des signes cliniques en phase aiguë, fraîchement euthanasié. Lors de l’autopsie, l’examen lésionnel doit être complet ; il nécessite non seulement l’observation de l’aspect externe de l’organe, mais également celui de l’intérieur du parenchyme, à la coupe. Il conviendra notamment de vérifier par palpation la consistance des poumons (affaissement versus fermeté), ainsi que le contenu des bronches et des bronchioles à la coupe. L’observation d’empreintes costales sur la plèvre viscérale est utile. Le contrôle de la flottaison de la pièce anatomique peut également être intéressant (poumon qui flotte lourdement ou qui coule, signant la présence de matériel dans les voies aériennes ou d’une atélectasie complète si le poumon coule). De plus, même dans un contexte pulmonaire, il demeure important d’inspecter l’ensemble des organes des cavités thoraciques (nœuds lymphatiques, cœur et thymus) et abdominales, de même que les organes des voies respiratoires supérieures (cornets nasaux, larynx, trachée), afin de compléter, si besoin, l’analyse histologique. Par exemple, des cas de dyspnée sont parfois liés à une obstruction trachéale en cas d’abcès en région cervicale ou encore lors de trachéite. Des pneumonies bactériennes peuvent aussi avoir pour origine la dissémination par voie hématogène d’emboles bactériens issus d’une endocardite bactérienne. Par ailleurs, lors d’une infection par un circovirus de type 2, l’analyse des nœuds lymphatiques est primordiale pour aider à orienter le pathologiste. De plus, il est préférable d’effectuer plusieurs coupes dans les organes afin de mieux sélectionner le morceau à envoyer. à noter : il convient de ne pas soumettre pour histologie un fragment de parenchyme situé en dessous du tissu qui aurait été brûlé à des fins d’analyse bactériologique.

Caractériser le contexte lésionnel

Tout envoi de prélèvements doit être associé à une fiche détaillant des éléments d’anamnèse, à savoir l’espèce concernée, l’âge, les signes cliniques observés, et la description macroscopique des organes lésés (taille, forme des différentes parties affectées de l’organe, couleur, consistance). Détailler la surface d’atteinte des poumons est utile pour caractériser l’intensité de la lésion. Pour ce faire, lors de l’autopsie, le praticien peut avoir recours au système de notation des lésions pulmonaires utilisé en abattoir, dans lequel chacun des 7 lobes pulmonaires est noté de 0 à 4, l’addition de chaque note permettant d’obtenir une note sur 28. Une autre méthode, développée par Steinmann en 2014, consiste à caractériser, en pourcentage, l’intensité de la surface atteinte (légère < 10 %, modérée 11-30 %, marquée > 30 %). Enfin, les prélèvements doivent être effectués au sein des zones lésées, en particulier à la jonction entre la zone lésionnelle et la zone normale. Il peut cependant être utile d’inclure un prélèvement par lobe afin de mettre en évidence les atteintes interstitielles virales. La portion craniale du lobe caudal, à proximité du hile, peut s’avérer intéressante dans cette optique. Enfin, il convient d’éviter l’apex des lobes les plus consolidés, et l’apex des lobes caudaux s’ils semblent alésionnels.

1 Artefacts dès 15 minutes post-mortem pour les intestins.

Bénédicte Pouleur-Larrat Vétérinaire anatomopathologiste, diplomate ACVP, laboratoire Orbio. Article rédigé d’après une conférence du Symposium sur Mycoplasma hyopneumoniæ organisé par Boehringer Ingelheim à Cesson-Sévigné, le 6   novembre.