Que pensez-vous des mouvements anti-viande ? - La Semaine Vétérinaire n° 1788 du 30/11/2018
La Semaine Vétérinaire n° 1788 du 30/11/2018

FORUM

@... VOUS !

Auteur(s) : TANIT HALFON 

LEUR IMPACT MÉDIATIQUE EST ÉNORME

En plus de détruire l’élevage français, ces mouvements extrémistes veulent nous imposer leur manière de vivre. Et leur impact médiatique est énorme ! Nos clients nous en parlent tous les jours, d’autant plus que nous sommes situés à côté de l’abattoir de l’Ain récemment incendié. Ce sujet déprime profondément les éleveurs, et s’ajoute aux autres difficultés qu’ils rencontrent. Pourtant, dans notre département, il n’y pas d’élevage industriel : les bovins sont dehors tout l’été, ainsi qu’au printemps et en automne. On trouve également énormément d’élevages laitiers bio. Toutes ces structures sont bien loin de la description qu’en font les mouvements anti-viande. Nos paysans sont amoureux de leurs bêtes : ils ne font pas ce métier pour nuire aux animaux, tout comme nous les vétérinaires. À ce propos, la profession s’investit dans des réseaux pour détecter les cas de maltraitance animale et aider indirectement l’éleveur concerné, en collaboration avec les autorités sanitaires et les organismes agricoles. Je pense qu’il serait utile que les professionnels des secteurs agricole et vétérinaire communiquent plus sur ce sujet : quand on ne dit rien, n’est-ce pas comme si, aux yeux de l’opinion publique, nous avions quelque chose à cacher ?


Christian Uhart

ILS ONT LANCÉ UN DÉBAT PUBLIC

Vandalisme des boucheries, attaques des abattoirs… Même si ces actes spectaculaires ont permis d’ouvrir un débat sociétal sur notre consommation de produits d’origine animale, rien ne peut justifier la violence qui les accompagne. Pour ma part, que ce soit pour des raisons écologiques ou de bien-être animal, je pense qu’il est nécessaire de se diriger vers une baisse de consommation des produits d’origine animale. Mes expériences personnelle et professionnelle m’ont amené à devenir végétarien. Le fait notamment d’avoir soigné des lapins et des chevaux lors de mes études m’a amené à les considérer comme des animaux de compagnie et plus de boucherie. De plus, penser aux conditions d’abattage industrielles m’a totalement détourné de la viande. Il ne serait pas absurde que la profession s’exprime sur ces sujets. On entend plus volontiers parler des associations comme L214 ou des élus, alors que les services vétérinaires se taisent. C’est dommage. Les méthodes des mouvements anti-viande sont contestables, car décider d’arrêter de manger de la viande reste avant tout un choix très personnel. Néanmoins, ils ont lancé le débat public sur la question du bien-être et de la souffrance animale. On en parle, on réfléchit, c’est bien.


François Bévalot

LES FILIÈRES DOIVENT APPORTER DES RÉPONSES

Leurs méthodes sont très critiquables. Ils pénètrent dans des propriétés privées, libèrent des animaux dans les abattoirs et font usage de violences verbales à l’encontre du personnel. En tant que vétérinaire aviaire pour une entreprise agroalimentaire, je défends forcément la production de viande, dans de bonnes conditions. Actuellement, dans notre secteur, les modes d’élevage des volailles du quotidien évoluent avec, entre autres, une meilleure prise en compte du bien-être animal, une baisse de l’utilisation des antibiotiques… Dans ce cadre, nous discutons avec des associations de protection animale, afin de faire évoluer nos pratiques. Ces organismes nous demandent notamment de réaménager nos bâtiments, en installant par exemple des jardins d’hiver, de limiter les densités animales, et de permettre aux volailles d’exprimer leur comportement naturel. Pour autant, notre objectif est aussi de conserver des filières durables financièrement : on ne peut pas produire à n’importe quel coût, pour les éleveurs mais aussi pour les consommateurs. Nous ne pouvons ignorer ces mouvements en cours dans notre société. Face à eux, les filières professionnelles doivent apporter des réponses afin que la viande garde une bonne image auprès des consommateurs.


Xavier Gautier