CONGRÈS
PRATIQUE MIXTE
L'ACTU
Auteur(s) : TANIT HALFON
Thème de l’édition 2018 du congrès de l’Association française de médecine vétérinaire porcine, le bien-être des porcs fait l’objet de multiples travaux de recherche et de démarches professionnelles. Face aux attentes sociétales, l’objectif est d’identifier les leviers pour l’améliorer.
La question du bien-être animal, si on ne s’en occupe pas, c’est elle qui va s’occuper de nous. » Loïc Dombreval député et vétérinaire, invité au dernier congrès de l’Association française de médecine vétérinaire porcine (AFMVP), qui s’est déroulé à Paris les 13 et 14 décembre, n’a pas mâché ses mots. Thème central de l’événement, le bien-être du porc d’élevage fait évoluer les pratiques, les éleveurs et leurs vétérinaires devant se les approprier. Une étape pas forcément aisée : « En matière de bien-être animal, on s’habitue à certaines représentations quand on baigne dedans tous les jours », a souligné Yannick Ramonet, ingénieur au pôle porc de la chambre régionale d’agriculture de Bretagne. Pourtant, des solutions techniques existent, même si certaines sont moins abouties que d’autres. De plus, les éleveurs sont ouverts à cette question. Pour preuve, les cases mise-bas liberté occupent déjà plus de 1 600 places dans les élevages conventionnels, dont 7 élevages avec plus de 100 cases en place. Alors même que la législation n’oblige pas à s’équiper en ce sens.
Depuis 2001, tous les porcs âgés de plus de 2 semaines doivent avoir un accès permanent à de l’eau fraîche en quantité suffisante. « Le problème est que beaucoup d’élevages distribuant de la soupe ne mettent pas d’eau à disposition, a indiqué Yannick Ramonet. Or, si l’essentiel des besoins physiologiques est effectivement couvert, cela ne satisfait pas le besoin comportemental de l’animal. » Idem pour la lumière, les porcs devant être exposés à une lumière artificielle ou naturelle d’une intensité au moins égale à 40 lux pendant un minimum de 8 heures par jour. « Pourtant, lors des inspections, on voit encore des porcs élevés dans la pénombre », a indiqué l’ingénieur. La Commission européenne a aussi recommandé, en 2016, les matériaux les plus intéressants pour enrichir le milieu de vie en porcherie, et c’est la paille qui a remporté les suffrages. L’intérêt de la chaîne étant, lui, considéré comme marginal. Pour le conférencier, l’élevage porcin ne pourra pas faire l’impasse sur ces trois points, d’autant que les moyens à mettre en œuvre sont connus. Pour l’aider à progresser, les premières fiches explicatives sont disponibles en ligne depuis juillet 20181.
« Les techniques alternatives à la castration sont disponibles, mais ne dépendent pas forcément des éleveurs », a souligné Yannick Ramounet. Alors que la filière porcine française s’est engagée en 2001 auprès de Bruxelles à arrêter d’ici le 1er janvier 2018 la castration chirurgicale des porcelets, celle-ci reste fortement pratiquée.Or, « l’immunocastration des porcs est mondialement autorisée, et assure une viande de qualité, sûre pour le consommateur, tout en respectant les critères de bien-être animal », a souligné Vincent Muller, un confrère qui en fait l’expérience depuis 8 ans. La technique est, selon lui, économiquement rentable. Sur le terrain, il observe une réduction marquée des comportements agressifs et sexuels, une baisse de l’usage des antibiotiques (moins d’infections postcastration) et une diminution de la mortalité des porcelets sous la mère. « Le blocage des filières est strictement politique », a-t-il déploré.
L’arrêt de la caudectomie est aussi un sujet complexe pour la filière. Si, théoriquement, elle est interdite en routine2, en pratique, près de 100 % des élevages l’utilisent. Mais les choses bougent : un plan d’action est actuellement mené par la filière, pour proposer aux éleveurs des solutions fiables afin d’arrêter la pratique. Il va déboucher, entre autres, sur une grille de monitoring, en cours de rédaction, dont l’objectif est de permettre à l’éleveur de prouver qu’il met en œuvre les moyens nécessaires pour éviter les morsures, d’identifier les facteurs de risque du cannibalisme et de les corriger.
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2 « D’autres mesures doivent être prises, afin de prévenir la caudophagie et d’autres vices (…) », avant d’envisager la caudectomie.
UNE LÉGITIMATION DE L’INDUSTRIALISATION DE L’ÉLEVAGE ?