Drôles de trolls

Àla lisière du film d’horreur, du folklore nordique, du réalisme social, du thriller et de la romance, Border défie les classifications. Adaptation d’une nouvelle de l’écrivain suédois John Ajvide Lindqvist – scénariste de Morse (2008), un excellent film de vampires –, le film déroule son intrigue autour de la question de la différence. Il se donne pour héroïne une inspectrice des douanes au physique déroutant (… repoussant), douée d’un implacable odorat qui lui permet de détecter les produits de contrebande et les émotions humaines comme la culpabilité. En dehors de son travail, Tina, plus en affinité avec les animaux sauvages que les hommes, mène à l’écart une vie résignée. Sa rencontre avec un homme provocant qui lui ressemble et dont l’odeur trouble sa perception libère en elle une sensualité et des instincts insoupçonnés. Son intimité avec Vore va lui révéler les secrets de leur patrimoine commun et l’inciter à partir à la recherche de ses origines. Si le réalisme magique de la passion insolite de Tina s’agence moyennement bien avec l’enquête policière parallèle (sur un réseau pédophile), la tension émotionnelle – entre humanité et animalité – des deux personnages (sous leurs masques de silicone) impressionne réellement. Évocation allégorique et sensible de la politique d’eugénisme que mena la Suède entre 1935 et 1996, ce film, qui jette des passerelles inédites entre réel et fantastique, interroge encore davantage l’intolérance à l’autre de notre société contemporaine.
•

Border d’Ali Abassi, avec Eva Melander, Eero Milonoff, Jörgen Thorsson, Suède, 1 h 48, sortie le 9 janvier.