Des pistes pour résoudre le casse-tête du recrutement - La Semaine Vétérinaire n° 1792 du 06/01/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1792 du 06/01/2019

EMPLOI

PRATIQUE CANINE

L'ACTU

Auteur(s) : PIERRE DUFOUR  

Problématique prégnante dans la profession, la difficulté à trouver des salariés peut en partie se résoudre en proposant une nouvelle vision du travail d’équipe.

Lors de la dernière édition du congrès de l’Afvac, le Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL), Résovet et l’association Ergone ont coorganisé une journée autour du thème du recrutement.

Construire sa marque employeur : capter, convertir et fidéliser

L’une des premières façons de sortir du lot en tant qu’employeur est de se créer une marque. Elle se décompose en trois axes : les pratiques (concernant principalement les ressources humaines), l’identité (liée à l’histoire du métier) et l’image (interne comme externe) de l’employeur. En effet, la réputation de l’entreprise est capitale. « L’objectif est d’attirer les talents, de susciter leur engagement, pour qu’ils soient fiers d’appartenir à l’entreprise, de porter ses valeurs », souligne notre confrère Éric Lejeau, vice-président du SNVEL. Le triptyque est alors : capter, convertir et fidéliser. Or, 82 % des vétérinaires ont des difficultés à réaliser ces trois actes. Du côté des candidats à l’embauche, 1 vétérinaire sur 2 estime que la réputation d’une structure est décisive et 95 % d’entre eux effectuent des recherches en ligne sur celle-ci avant d’y travailler. 41 % recherchent une vraie culture d’entreprise. Concernant le processus de sélection, deux tiers abandonnent s’il est trop complexe, alors que seulement 8 % des employeurs ont conscience qu’un tel processus de sélection fait fuir les meilleurs talents. 64 % des employeurs estiment que ces derniers sont recrutés par cooptation. « De nombreuses pistes sont à suivre : développement de partenariat avec les écoles, création d’un label “véto friendly”, amélioration de la visibilité, formalisation de la politique de cooptation en commençant par les stagiaires », illustre notre confrère. « C’est vous qui décidez de votre positionnement, de la direction de l’entreprise et de son plan stratégique » souligne Pierre-Marie Cadot, président de l’association Ergone. Comment se démarquer ? Via Internet, la création d’un site personnalisé, la présence sur les réseaux sociaux, mais pas seulement. « Vétérinaire est un métier passion, qui doit rester un plaisir. Donnez des projets aux membres de votre équipe, impliquez- les, apportez du sens », poursuit-il. Grâce à son exemplarité et à sa transparence, le vétérinaire manager génère la confiance des salariés en les responsabilisant. Le recrutement, au-delà d’un processus, est alors une posture valorisant autant les savoir-être que les savoir-faire.

Favoriser la motivation et l’engagement au travail

« Le plus important, c'est de comprendre que l'engagement des autres passera forcément par le sien. Il s’agit d’être disponible et au service des autres pour que les projets de groupe se réalisent », explique notre confrère Renaud Berger, fondateur de VetoVet, agence de recrutement dédiée aux vétérinaires. La motivation (étymologiquement : “se mouvoir et s’émouvoir”) est la première marche pour l’engagement qui se manifeste dans les actes. La motivation n’est pas uniquement un outil de développement personnel, mais un levier aboutissant à la performance économique. « Trois ingrédients influencent la motivation : l’autonomie, la maîtrise, la finalité », précise notre consœur Céline Porret, praticienne et titulaire d’un diplôme d’école de management vétérinaire. L’autonomie représentant autant le choix de la tâche que la manière de la réaliser, le moment de sa réalisation ou le choix de ses collaborateurs. La maîtrise, quant à elle, se réfère au sentiment de progression. Enfin, la finalité représente le fait d’œuvrer pour quelque chose qui va au-delà de sa propre personne.

Ainsi, les collaborateurs sont des partenaires et non des ressources, et de l’autonomie découle l’implication, l’engagement. Les moteurs internes dépendent des individus : émotions, représentations, croyances, valeurs, identité, image de soi, etc., mais surtout du contexte. « La satisfaction au travail dépend des facteurs dits d’hygiène, qui sont négatifs si non pris en compte, mais jamais positifs, et des facteurs de motivation, correspondant au sommet de la pyramide de Maslow : besoin d’épanouissement et d’accomplissement professionnel », explique-t-elle.

Pour résoudre un problème avec un collaborateur, la grille des niveaux logiques de la pensée de Dilts est un bon outil pour identifier le niveau en cause, du bas vers le haut : environnement (espace et temps), comportement (action), capacité (compétences), croyances et valeurs, identité, mission (appartenance). Tout changement à un niveau se répercutant sur les autres.

« De manière générale, valoriser, éviter les formules négatives, questionner et multiplier les temps d’échange autant que possible, pour identifier les moteurs d’actions, spécifiques, souvent inconscients, soumis à la culture, à l’expérience, et source de rigidité. Enfin, attention aux effets de groupe », souligne Céline Porret. Ces moteurs sont souvent le reflet de choix de vie.

Développer l’esprit d’équipe : devenir un leader empathique

Notre confrère Pierre Mathevet, président de Tirsev, société d’audit et de conseils pour les cliniques vétérinaires, invite à travailler en équipe plutôt qu’en famille. En effet, les deux ont de nombreux points communs : une mémoire collective, un leader, un sentiment d’appartenance. Mais pour l’équipe, les relations sont plus équilibrées, on parlera plus volontiers de transmission du savoir plutôt que d’éducation, et surtout le leader se doit d’être empathique. Désigné par le groupe, il doit accepter ce rôle. Il convient ensuite de définir clairement les rôles de chaque membre de l’équipe, ainsi que leur responsabilité, afin de déterminer des objectifs communs, alignés sur des valeurs communes que chacun incarne. C’est la diversité du groupe qui fera la force de l’équipe, supérieure à la somme des forces individuelles. Tout l’enjeu réside dans la faculté de se connaître et de connaître ses collaborateurs pour travailler ensemble : l’estime de soi est le socle indispensable à la cohésion d’équipe. « Plus le désordre est faible, plus l’ambiance est bonne, et donc la performance haute. Ne rentrez pas dans le jeu du sauveur-victime-persécuteur. Pour résoudre un problème, privilégiez la sympathie à l’empathie ou la compassion, ne rajoutez pas de l’émotion à l’émotion », conseille notre confrère. L’objectif, une démarche de recherche de solutions, passant par différents stades : nier, accuser, justifier, assumer, pallier, analyser, imaginer. Enfin, « créez et entretenez des rituels, célébrez les victoires ! », conclut-il.