Intérêt de la SDMA pour le diagnostic de maladie rénale chronique - La Semaine Vétérinaire n° 1794 du 19/01/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1794 du 19/01/2019

CONFÉRENCE

PRATIQUE CANINE

Formation

Auteur(s) : LAURENT MASSON  

Le gold standard pour l’évaluation de la fonction rénale est le débit de filtration glomérulaire. Il est mesuré par l’élimination d’un marqueur (créatinine exogène ou iohexol), mais sa réalisation en routine est délicate (prélèvements répétés, préparation extemporanée du marqueur, etc.).

Marqueurs “historiques”

C’est pourquoi, jusqu’à présent, le diagnostic de maladie rénale chronique (MRC) reposait sur des examens de laboratoire de routine. Les plus couramment employés sont la densité urinaire, mesurée au réfractomètre, l’urémie et la créatininémie, en raison de leur faible coût et de leur disponibilité. Cependant, il s’agit de marqueurs tardifs de la MRC et ils manquent de spécificité :

- la densité urinaire diminue lorsque 66 % des néphrons sont lésés et est influencée par des maladies extrarénales ;

- l’urémie est également un marqueur tardif, qui varie selon l’alimentation, s’accroît lors de saignements digestifs ou de déshydratation et baisse lors d’insuffisance hépatique ;

- la créatininémie augmente lorsque 75 % des néphrons sont lésés et est influencée par la masse musculaire et l’alimentation. Le suivi de ce paramètre chez un même animal à jeun permet d’améliorer sa sensibilité pour une MRC. Ainsi, lorsque la créatininémie double, cela indique une diminution d’environ 50 % du débit de filtration glomérulaire.

Nouveaux marqueurs

D’où l’intérêt d’utiliser de nouveaux biomarqueurs afin d’optimiser la spécificité et la précocité du diagnostic, voire de cibler la nature physiopathologique ou l’étage des lésions rénales. La littérature fait mention de la cystatine C et de la diméthylarginine symétrique (SDMA). Concernant la mesure de la cystatine C, un fort taux de recouvrement entre chat sain et chat insuffisant rénal est noté, d’où son manque d’intérêt. La SDMA est un acide aminé issu du catabolisme des protéines, produit à niveau constant, filtré librement par les glomérules rénaux, sans subir de réabsorption ou d’excrétion par les tubules rénaux et sans métabolisme extrarénal. Sa concentration sanguine est corrélée avec le débit de filtration glomérulaire, d’où son intérêt. Elle s’accroît précocement lors d’insuffisance rénale chronique débutante, jusqu’à 17 mois avant l’augmentation de la créatininémie. Elle augmente en moyenne lorsque 40 % des néphrons sont atteints (jusqu’à 25 % chez certains chats)1. La spécificité est également très bonne en l’absence d’influence de la masse musculaire. Dans la classification Iris, une augmentation persistante de la SDMA au-delà de 14 µg/dl chez un animal correctement hydraté permet de conclure au diagnostic de MRC débutante (stade Iris 1). En outre, la SDMA serait intéressante chez les chats hyperthyroïdiens dans la recherche d’une MRC masquée par l’amyotrophie et l’hyperfiltration rénale provoquées par l’excès d’hormones thyroïdiennes. Ce marqueur permet enfin une adaptation du stade Iris de la MRC (stade établi selon la créatininémie, sous-stades attribués selon la pression artérielle systémique et la protéinurie). En effet, la créatininémie sous-estime le stade de MRC chez un chat amyotrophié. Ainsi, pour un chat en stade 2 (établi à partir de la créatininémie) correctement hydraté, si la SDMA est supérieure à 25 µg/dl de manière persistante, le stade est requalifié de 2 à 3. De la même façon, un chat en stade 3 (basé sur la créatininémie) avec une SDMA supérieure à 45 µg/dl de manière persistante est alors classé en stade 4. Ceci permet une meilleure adaptation des décisions thérapeutiques. Cette analyse est disponible en laboratoire spécialisé et aussi sur l’analyseur Catalyst® d’Idexx. Ce nouveau biomarqueur doit s’intégrer, mais sans se substituer aux autres tests biologiques actuels et au tableau clinique.

1 Les informations présentées pour la SDMA chez le chat sont également valables chez le chien.

Amandine Drut Diplomate ECVIM-CA, praticienne hospitalière à Oniris. Article rédigé d’après une conférence présentée au congrès de l’Afvac à Nantes (Loire-Atlantique), en 2017.