Ruptures de stock : la recette de Boehringer Ingelheim pour les éviter - La Semaine Vétérinaire n° 1795 du 27/01/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1795 du 27/01/2019

MÉDICAMENTS VÉTÉRINAIRES

ACTU

Auteur(s) : MICHAELLA IGOHO-MORADEL  

Le parcours d’un vaccin, de sa naissance à sa mise sur le marché, est une aventure complexe. Des facteurs extérieurs peuvent en influencer la bonne marche. Boehringer Ingelheim revient sur ces contraintes incompressibles et parfois imprévisibles.

Pourquoi les ruptures ? Cette question se pose tant en santé humaine qu’en santé animale. Pénurie de matières, renforcement de la réglementation, accroissement de la demande, les causes sont nombreuses. Du côté des spécialités vétérinaires, les bonnes pratiques élaborées par l’Agence nationale du médicament vétérinaire (Anses-ANMV) et les acteurs du secteur proposent des clés pour gérer ces ruptures. Objectif affiché : mieux communiquer pour les anticiper1. Pour les laboratoires, cette problématique constitue un défi de tous les instants. Les 24 et 25 janvier, Boehringer Ingelheim a organisé une visite au sein de ses centres de production biologique, de répartition et de conditionnement, afin de faire « découvrir, étape par étape, la vie d’un vaccin, de sa conception à sa mise sur le marché ». L’occasion aussi de faire comprendre que cette dernière, pour un vaccin par exemple, peut être plus longue que prévu.

Une chaîne complexe

Les ruptures de stocks et d’approvisionnement de médicaments s’expliquent, plusieurs facteurs peuvent en être la cause. De la fabrication au conditionnement, chaque maillon de la chaîne est complexe et important. Il suffit d’une impureté pour bloquer l’approvisionnement. La visite des sites de Lyon Porte des Alpes et de Lentilly démontre en effet toute la complexité des circuits de fabrication d’un vaccin jusqu’à sa mise sur le marché. Le premier centre regroupe les activités de recherche et développement et de production, le second est un site de répartition, de conditionnement et de stockage. De la naissance d’un vaccin à sa commercialisation, en passant par la formation de ses collaborateurs, l’industriel respecte des normes de qualité nationales et européennes strictes, sans compter les exigences qu’il s’impose. Les équipes d’Assurance Qualité vérifient à chaque étape que ces bonnes pratiques sont appliquées. Un travail minutieux qui permet d’attester de la bonne conformité d’un vaccin. Ainsi, un problème technique, de qualité ou encore un refus de lots pour non-conformité, peut retarder la mise sur le marché d’un produit quand il n’en cause pas la destruction. De même, la chaîne industrielle complexe peut engendrer des risques de ruptures. En effet, l’accroissement et la variabilité de la demande peuvent impacter les délais de réactivité du laboratoire. « Les stocks tampons permettent de pallier ces situations d’urgence, mais ceux-ci doivent répondre à la juste demande, pour ne pas générer de produits à péremption courte », indique la société.

Améliorer sa performance

Face à ces situations complexes, le laboratoire met en place des solutions afin de répondre efficacement à l’urgence. L’enjeu est d’abord d’identifier le plus en amont possible les situations de ruptures de stock. Des échanges permanents sont organisés entre les équipes de direction et celles de production sur le terrain. L’objectif est de détecter et de résoudre d’éventuels dysfonctionnements et aussi de faire émerger, le cas échéant, des axes d’amélioration (stockage, sécurité, évolution des locaux). En cas d’urgence, l’entreprise revoit son organisation du travail. Des équipes supplémentaires peuvent être mises en place, un travail de nuit organisé. Autre champ d’action, l’augmentation de sa capacité de production et l’amélioration de sa performance. « Les équipes de recherche et développement travaillent sur les processus des nouveaux vaccins, afin de réduire les cycles », souligne le laboratoire. L’entreprise a par ailleurs investi des millions d’euros pour la construction, à Jonage (Rhône), d’un nouveau site industriel de production de vaccins contre la fièvre aphteuse et la fièvre catarrhale. En parallèle, une nouvelle ligne de répartition viendra renforcer le centre de conditionnement et de stockage de Lentilly (Rhône). L’investissement de 20 millions d’euros permettra d’augmenter la capacité de production du site, aussi bien en vaccins liquides (+ 50 %) qu’en vaccins lyophilisés (+ 15 %).

1 Voir aussi La Semaine Vétérinaire n° 1789 du 14/12/2018, pages 40 à 45.

DEUX QUESTIONS À VINCENT FENARD




Quelles sont vos contraintes ?
Elles concernent principalement les délais et la qualité, en lien avec les exigences réglementaires. Par exemple, les délais de contrôles sont incompressibles. Chaque produit a sa propre grille de contrôle qualité, et tant que tous les contrôles ne sont pas réalisés et ne sont pas satisfaisants, le produit ne peut pas être libéré. Un problème de qualité, la moindre non-conformité lors de la production peut avoir pour conséquence la destruction du lot. Nous mettons sur le marché uniquement un vaccin dont nous sommes sûrs de la qualité. Nos lots de produits sont libérés après de nombreuses vérifications effectuées dès la réception des matières premières, sur nos productions, et jusqu’au conditionnement. Cette batterie de contrôle peut prendre du temps et parfois causer un retard dans le délai de libération de lots de produits. Nous devons aussi tenir compte des contraintes de nos propres fournisseurs de matières premières.

Quelles solutions privilégiez-vous pour anticiper les ruptures ?
Nous revoyons régulièrement nos stocks de sécurité qui nous permettent normalement de couvrir la plupart des aléas. Néanmoins les exigences de nos clients en matière de péremption résiduelle ne nous permettent pas d’avoir des stocks de sécurité illimités sous peine de détruire énormément de produit. Notre entreprise a adopté une politique de communication interne efficace. Nous travaillons en étroite collaboration avec les Opérations Commerciales France, afin d’anticiper les besoins de nos clients. Notre site de Lyon Rhône-Alpes exporte sa production dans 140 pays. Cela nécessite une organisation sans faille. Afin de répondre au mieux à la demande de nos clients, nos prévisions et nos plans de production sont mis à jour tous les mois. Pour les besoins de notre clientèle française, qui représente 20 % de nos ventes, des réunions sont organisées au sein de l’unité business France, afin d’établir des prévisions de vente les plus précises possible. Par ailleurs, nous avons engagé des investissements très importants sur nos sites pour augmenter notre capacité de production et accélérer la mise à disposition de nos produits.