CONFÉRENCE
PRATIQUE MIXTE
Formation
Auteur(s) : MARINE NEVEUX
La maladie de l’herbe, appelée aussi dysautonomie équine ou grass sickness, présente une diversité de signes d’appel rendant le triage complexe. Les symptômes résultent d’une atteinte dégénérative des nerfs et du système nerveux autonome. Trois formes de la maladie sont décrites : aiguë, suraiguë et fatale, et chronique. Quel est l’agent causal de l’affection ? Comment la reconnaître dans ses différentes formes et la diagnostiquer ? Il existe plus d’interrogations que de réponses face à cette maladie encore mal connue.
L’animal malade présente une atteinte nerveuse, avec la suspicion d’une étiologie toxique. L’implication de neurotoxines semble probable et pourrait provenir de Clostridium botulinum. L’ingestion de toxines au pré et de mycotoxines est suspectée, car c’est une maladie saisonnière, et beaucoup de cas sont regroupés sur un même espace temporel et géographique.
Certains chevaux atteints manifestent des signes cliniques regroupés dans une liste bien établie ; pour d’autres, rien n’oriente initialement sur cette maladie, qui comporte encore beaucoup d’inconnues. Les signes peuvent être : abattement, perte d’appétit, déshydratation, sudation, température, tachycardie, hypersalivation, douleur abdominale, etc. Ils sont donc peu spécifiques. Certains symptômes sont plus marquants, comme des trémulations musculaires, une dysphagie, une régurgitation de reflux gastrique par le nez, une ptôse palpébrale bilatérale, une rhinite sèche (particulièrement dans la forme chronique, la muqueuse est sèche, voire croûteuse), une diminution du polygone de sustentation, une mort subite (cela s’inscrit dans les morts inexpliquées au pâturage). Dans les formes chroniques, il est possible d’observer : un paraphimosis, une dysphagie et des fausses routes.
Cliniquement, il n’est pas évident de s’orienter vers une maladie de l’herbe. La rhinite sèche est un élément utile d’analyse. Le diagnostic différentiel nécessite d’effectuer la distinction avec toutes les causes de coliques aiguës. Les dysphagies liées aux anomalies du système nerveux central (SNC) peuvent être suspectées.
S’agissant de la forme chronique, il reste le diagnostic différentiel des coliques, le parasitisme, les lymphomes intestinaux, les ulcères chroniques, la maladie du motoneurone.
La maladie de l’herbe est une affection émergente pour laquelle la recherche a peu de recul. Dans plusieurs pays, comme l’Écosse, la fréquence des cas est supérieure à ce qui est observé sur le territoire français.
Le Réseau d’épidémiosurveillance en pathologie équine (Respe) mène une étude à laquelle les praticiens peuvent participer. Le score clinique a été établi avec des données épidémiologiques, des facteurs favorisants : changement récent de pâturage, présence d’autres cas confirmés sur d’autres champs, âge du cheval, saisonnalité, etc. Des points sont attribués en fonction de la spécificité des signes cliniques. Une fois les données rétrospectives utilisées, les chevaux sont inclus dans l’étude et la confirmation ou pas de l’affection s’effectue post-mortem.
La plupart des chevaux malades sont jeunes, avec un pic vers 3-4 ans ; les poulains sont rarement concernés. Les ânes aussi peuvent être atteints.
Des prélèvements de sang et de fèces sont réalisés pour la recherche de Clostridium botulinum. Le diagnostic ante-mortem nécessite une biopsie d’iléon et ou de ganglions digestifs par laparoscopie ou laparotomie.
Des essais de tests peu invasifs et rapides ont été réalisés (histologie de biopsie de muqueuse linguale, biopsie rectale avec immunohistochimie), mais ces derniers n’ont pas encore été validés et ne sont pas commercialisés.
Le diagnostic gold standard est l’autopsie et l’histologie.
Les résultats d’études sur l’environnement montrent que le risque de multiplication des cas est plus important lorsque la maladie a déjà été détectée. Le surpâturage, la présence de jeunes chevaux, les sols riches en zinc, chrome, titane semblent être des facteurs favorisants. Le risque diminue avec un sol calcaire. En matière de gestion des chevaux : s’ils consomment de l’herbe coupée, il y aurait une diminution du risque. Complémenter les équidés en fourrages l’abaisse aussi. Le copâturage avec les ruminants pourrait être protecteur.
Il n’existe pas d’antidote. Un traitement de soutien est instauré, car la douleur doit être gérée. Pour la limiter, il convient de décomprimer l’estomac.
Pour les formes chroniques : des essais ont été effectués en Écosse pour voir s’il était possible d’établir un plan de nutrition chez les animaux hospitalisés (diètes laxatives, hyperdigestibles). Seuls 40 % des chevaux s’en sortent.
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Pratique Vétérinaire Équine n° 201 de janvier/février/mars 2019, dossier « Les maladies du cheval au pâturage », pages 6 à 35.
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