Les maladies congénitales orthopédiques chez le chat - La Semaine Vétérinaire n° 1804 du 30/03/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1804 du 30/03/2019

CONFÉRENCE

PRATIQUE CANINE

Formation

Auteur(s) : MYLÈNE PANIZO  

Les maladies congénitales orthopédiques sont généralement difficiles à diagnostiquer chez le chat. Les propriétaires et les vétérinaires sous-estiment en effet la gêne orthopédique, car les symptômes sont la plupart du temps frustes. Un chat qui présente des douleurs ostéoarticulaires ne va pas forcément boiter. Il est souvent simplement moins actif, se toilette moins, son comportement change.

Les dysplasies de la hanche

Il est estimé qu’en moyenne 6,6 % des chats présentent une dysplasie de la hanche. Certaines races sont prédisposées, telles que les persans, les norvégiens et les maine coon (jusqu’à 73 % de dysplasiques chez cette race). La dysplasie de la hanche ne provoque généralement pas de symptôme au début de la vie de l’animal. Les signes cliniques apparaissent lorsque de l’arthrose se développe, mais ceux-ci peuvent être très subtils (inconfort au quotidien, baisse d’activité). Le diagnostic est obtenu par radiographie. Les signes d’une arthrose débutante sont généralement visibles (ostéophytes sur le bord cranial de l’acétabulum, sclérose de l’os sous-chondral). Afin d’obtenir un diagnostic plus précoce, il est recommandé d’observer la couverture dorsale de la tête du fémur. Chez le chat, celle-ci est normalement d’au moins 50 %, car le bassin est plus étroit que chez le chien (au moins 60 % de couverture). La probabilité que le chat soit dysplasique si la couverture est inférieure à 50 % est forte, même en l’absence de signe d’arthrose débutante. Chez le chat, la norme de l’angle de Norberg-Olsson est de 95-100° (chez le chien celui-ci doit être supérieur à 105). La fosse du ligament rond de la tête fémorale est plus large chez le chat que chez le chien, son analyse radiologique n’en fait donc pas un critère de diagnostic de dysplasie.

Chez le chat, le traitement est en général conservateur : gestion du poids, de l’activité et de l’environnement et alimentation spécifique. Il est conseillé de privilégier des petites doses de méloxicam (0,01 à 0,03 mg/kg), mais sur des longues durées. Il a été démontré qu’il y a peu de risques d’effets secondaires, à faibles doses, même en cas de légère insuffisance rénale. Le tramadol, à la dose de 2 mg/kg, peut également être utilisé, toutefois, il est primordial de surveiller l’apparition de potentiels effets secondaires (euphorie, sédation, perte d’appétit). La chirurgie est le traitement de dernier recours dans l’espèce féline. Il s’agit de la résection de la tête et du col fémoral. Les résultats de cette chirurgie sont contrastés, et ce d’autant plus que l’atteinte est bilatérale et/ou sur des chats de grand format. Les prothèses de hanche existent chez le chat. Elles donnent de très bons résultats cliniques. Cependant, leur mise en place demande une technicité élevée et le coût est important (environ 4 200 €).

Les luxations de la rotule

Chez le chat, les luxations de la rotule entraînent en général une boiterie nette, bien plus marquée que chez le chien. Elles sont souvent associées à une dysplasie de la hanche. La rotule est plus large chez le chat que chez le chien, elle est donc moins stable dans la trochlée.

Le diagnostic est souvent précoce (clinique et radiographique) et il est vivement recommandé d’opérer rapidement. En effet, chez le chat, une luxation de la rotule non traitée va s’aggraver, car le mouvement de va-et-vient de la rotule induit une abrasion importante du rebord de la trochlée. De plus, si la luxation est diagnostiquée pendant la croissance, attendre induit de graves conséquences : la rotule formant avec le quadriceps une bande de tension médiale, la plaque de croissance se retrouve progressivement comprimée au niveau médial et décomprimée au niveau latéral, ce qui entraîne une déformation angulaire du fémur accentuée. Ceci rend beaucoup plus complexes les chirurgies ultérieures (nécessité de réaliser une ostéotomie). Il faut donc effectuer rapidement une chirurgie correctrice de la luxation. Il s’agit généralement d’une chondroplastie, qui permet de reformer une trochlée en préservant le cartilage. La transposition de la crête tibiale est moins fréquemment réalisée chez le chat que chez le chien (environ 50 % versus 95 % d’après les publications), mais c’est sans doute une erreur. La chirurgie de luxation de rotule chez le chat n’est pas anodine. Une étude a recensé 20 % de complications majeures lors de chirurgies réalisées par des spécialistes en orthopédie.

L’ostéochondrite disséquante

Elle est en général située sur le genou. Les maine coon et les norvégiens sont prédisposés. La chirurgie est possible : il s’agit d’enlever la lésion d’ostéochondrose et d’appliquer un cartilage de synthèse (resurfacing). Une autre forme d’ostéochondrite disséquante est la fracture de la rotule, souvent bilatérale, qui apparaît chez des chats de 8 à 14 mois, parfois associée à des maladies dentaires.

L’ostéochondrodysplasie

Le scottish fold est prédisposé. L’ostéochondrodysplasie est la plupart du temps plus sévère sur les tarses. Les lésions visibles à la radiographie (zones de calcification péri-articulaire) ne doivent pas être confondues avec des lésions d’hypervitaminose.

Cette maladie est généralement très débilitante et sa gestion est difficile. La corticothérapie, la physiothérapie et l’utilisation de laser peuvent cependant entraîner une amélioration de la qualité de vie.

Les fractures de Salter-Harris de type I de la tête du fémur

Anciennement appeléeostéopathie métaphysaire”, il a été démontré que cette lésion était en réalité le plus souvent une fracture de la tête du fémur. Les jeunes adultes de grand format sont prédisposés. Lors de la visualisation d’un aspect mité du col du fémur à la radiographie, il est important de réaliser différentes vues (et non pas une seule vue ventro-dorsale), afin de visualiser l’éventuelle fracture.

Bibliographie :

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Guillaume Ragetly Diplômé ECVS et ACVS, spécialiste en chirurgie au CHV Frégis. Article rédigé d’après une présentation organisée par le centre hospitalier vétérinaire Frégis (Val-de-Marne), en octobre 2018.