COLLOQUE
PRATIQUE MIXTE
L'ACTU
Auteur(s) : CLOTHILDE BARDE
L’organisation de la gestion sanitaire en santé animale et ses enjeux aux échelles européenne, nationale et, plus particulièrement, régionale étaient à l’ordre du jour du colloque organisé le 4 avril par l’Anses, en collaboration avec GDS France et la fédération régionale des GDS de Nouvelle-Aquitaine.
Première région d’élevage en Europe, la Nouvelle-Aquitaine donne aujourd’hui la parole aux professionnels, aux politiques et aux scientifiques pour qu’ils discutent de leurs visions croisées de la gestion et des enjeux des risques sanitaires et du bien-être animal (BEA) pour la région et au-delà », a annoncé, le 4 avril, Roger Genet, directeur général de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), pour introduire le colloque organisé à Poitiers (Vienne) par l’Anses, avec la Fédération nationale des groupements de défense sanitaire (GDS France)1 et la fédération régionale des GDS de Nouvelle-Aquitaine (FRGDS NA).
Comme l’a indiqué Franck Daubin, président de la FRGDS NA, « la région se caractérise par une grande diversité de productions, avec de moins en moins d’élevages de bovins laitiers, mais de nombreux élevages de bovins viandes (broutard), de palmipèdes gras, un tiers du cheptel national des brebis laitières et 37 % de celui de chèvre ». Or, dans un tel contexte, de nouvelles problématiques sanitaires régionales apparaissent, comme l’a précisé Gilles Salvat, directeur du pôle recherche et référence de l’Anses. Elles sont le reflet d’une mutation plus globale de l’élevage aux échelles nationale et européenne caractérisée par une plus forte exigence sociétale (BEA, environnement et santé des animaux), une volonté d’amélioration de la réactivité et de l’anticipation des crises sanitaires, de poursuite de la lutte contre l’antibiorésistance, de sécurisation sanitaire des aliments, de renforcement des réglementations nationales et européennes, et enfin de meilleure transmission des connaissances aux acteurs agricoles.
« Afin d’y répondre en apportant à l’ensemble des acteurs de nouveaux outils de suivi et de gestion des dangers sanitaires pour demain, les scientifiques de l’Anses (laboratoire de Niort, dans les Deux-Sèvres), agence nationale d’expertise scientifique, et les acteurs de terrain des GDS locaux collaborent depuis cinq ans », a rappelé Christophe Moulin, secrétaire général de GDS France. Ainsi, en pratique pour la gestion sanitaire2 des trois maladies animales transmissibles jugées les plus importantes sur notre territoire (diarrhée virale bovine [BVD], rhinotrachéite infectieuse bovine [IBR] et paratuberculose), comme le spécifie la réglementation, « les organisations professionnelles doivent pouvoir disposer des outils nécessaires pour conduire les stratégies sanitaires concernant les dangers à l’encontre desquels des actions collectives sont nécessaires ». C’est pourquoi, selon Nicolas Canivet, directeur stratégie de l’Anses, pour l’IBR, l’accent est mis sur la lutte et l’assainissement, avec la recherche de tests plus spécifiques, d’outils plus robustes et de protocoles simplifiés. De plus, pour éradiquer la BVD, du nouveau matériel de prélèvement sera indispensable (biopsie auriculaire) et, pour lutter contre la paratuberculose, les problèmes de calibrage des kits devront par exemple être résolus. Ces travaux doivent « permettre au GDS de bénéficier d’outils analytiques fiables et d’avis scientifiques indépendants », a ajouté Gilles Lavollée, trésorier de GDS France.
De même, pour les autres maladies majeures de l’élevage, « comme il est essentiel d’avoir des tests assez sensibles et spécifiques pour ne pas se tromper dans le statut de l’élevage, a indiqué Maria-Laura Boschiroli (Anses), de nouveaux outils de surveillance sont testés sur le terrain ». Par exemple, dans le cas de la mycoplasmose ovine, maladie endémique dans les élevages ovins des Pyrénées-Atlantiques, de nouveaux outils de dépistage pour qualifier les statuts des cheptels (PCR) ont permis de mettre en place un abattage sélectif des troupeaux pour accélérer le processus d’assainissement des zones infectées, a précisé le docteur vétérinaire Julie Blaziot (GDS des Pyrénées-Atlantiques). De même, pour la tuberculose bovine, comme l’a précisé Isabelle Tourette (GDS France), il serait intéressant de développer de nouveaux outils de dépistage, moins complexes et plus rapides que le protocole défini actuel d’intradermotuberculination (ID) comparative3. C’est le cas du test à l’interféron-γ (IFNG) en série (meilleures sensibilité et spécificité) qui pourrait permettre de « s’affranchir du contrôle en ID après six semaines, d’affiner la suspicion, de limiter les réactions anergiques et d’obtenir des valeurs objectives », selon Maria-Laura Boschiroli. De plus, pour éviter d’avoir recours à la culture bactérienne, considérée comme un gold standard de diagnostic, mais dont les résultats sont très longs à obtenir, la technique de PCR (plus sensible de 10 %) devrait aussi permettre de réduire le délai de diagnostic, intervenir plus rapidement dans les foyers et réaliser des levées d’arrêté préfectoral de mise sous surveillance (APMS) plus rapides. Enfin, en ce qui concerne l’enjeu majeur de la gestion du BEA, l’Anses collabore avec le GDS « pour améliorer les techniques existantes, pour penser l’élevage de demain, pour évaluer les solutions et faire des choix qui auront un impact sur le BEA de l’éleveur, et donc sur celui de l’animal », a expliqué Gilles Salvat. Pour cela, un nouvel outil d’évaluation reposant sur des indicateurs pertinents doit être développé (de mai 2019 à mai 2020), une étude de faisabilité sera ensuite réalisée, et enfin la reproductibilité et la mise en œuvre seront étudiées.
Enfin, concernant les mesures réglementaires de surveillance, les travaux de recherche de l’Anses et le recueil de données du GDS peuvent permettre d’évaluer leur cohérence dans le contexte actuel. Ainsi, comme l’a indiqué Axelle Scoizec (Anses), en ce qui concerne l’influenza aviaire (IA), l’Anses a mené des études sur les durées de survie du virus dans l’environnement (étude de vieillissement artificiel du lisier), sur les mesures de nettoyage et de désinfection (N/D) nécessaires pour réduire le nombre de pathogènes présents, sur les pratiques à risque de contamination croisées – manque d’espaces et croisement des circuits (prêt à gaver, gavage) – et sur l’intérêt de la prévention vaccinale – expression clinique, excrétion virale et séroconversion virale. De plus, au niveau régional, comme l’a souligné Michel Fruchet, du Comité interprofessionnel des palmipèdes à foie gras (Cifog), « une interaction indispensable et efficiente entre le GDS, le Cifog (organisation interprofessionnelle) et l’Anses ont permis un partage de données et la coconstruction de projets, tels que l’édition d’une base de données de la localisation des élevages (cartographie Cartogip
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) pour prévenir et lutter contre l’IA
». De même, les réseaux de surveillance nationaux des mycoplasmoses ovines (Mycoides agalactiae) et caprines (Mycoides capricolum capricolum, Mycoides putrefaciens, Mycoides capri, Mycoides agalactiae), à l’origine du syndrome d’agalactie contagieuse, qui se manifeste sous forme de pneumonie, de conjonctivite, d’arthrite et de mammite (Vigimyc5), ou des avortements (dispositifs Oscar6 et Omar7) sont autant de sources de données sur l’état sanitaire de la région.
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1GDS France rassemble l’ensemble des groupements départementaux et régionaux français (GDS et FRGDS).
2 Ordonnance n° 2011-862 du 22 juillet 2011 relative à l’organisation de l’épidémiosurveillance, de la prévention et de la lutte contre les maladies animales et végétales et aux conditions de délégation de certaines tâches liées aux contrôles sanitaires et phytosanitaires. (bit.ly/2GgfEUb).
4 https://sig.cartogip.fr/donnees_culturelles.
UN CADRE RÉGLEMENTAIRE EUROPÉEN EN COURS D’ÉLABORATION