Diables de Tasmanie

Parmi les vétérinaires qui écrivent, combien peuvent se flatter d’avoir 700 000 lecteurs ? L’incroyable succès en France de La Mémoire des embruns – roman publié en 2011 par Les Escales et dont la parution en poche en 2016 a décuplé les ventes – a surpris son auteure, Karen Viggers. Cette consœur australienne partage sa vie entre l’écriture romanesque et son cabinet à Canberra. Elle est également spécialisée en faune sauvage et a participé à de nombreuses missions de terrain à travers l’Australie et en Antarctique. Si les problématiques environnementales qu’elle aborde dans ses récits – le déplacement des populations, le sauvetage des baleines, l’abattage des kangourous et, ici, la déforestation et la tumeur faciale transmissible qui décime les diables de Tasmanie – disent la nécessité de renouer le lien sensible avec la nature et les animaux, son naturalisme contemporain, au-delà, met en scène des mondes qui se heurtent. Ce quatrième roman questionne à bon droit la violence à l’œuvre au quotidien au sein des familles ou des communautés et… le silence qui l’entoure et l’entretient. Dans une petite localité de Tasmanie qui vit de l’exploitation du bois, les chemins de vie croisés de trois personnages – un fils de bûcheron devenu garde forestier, un écolier harcelé par le fils du policier local, une orpheline que son frère protège en la réduisant à un quasi-esclavage – vont faire écho aux tensions qui taraudent sourdement la collectivité. Le roman accompagne leur émancipation.
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Le Bruissement des feuilles de Karen Viggers, Éditions Les Escales, 14 x 22,5 cm, 432 pages, 21,50 €.