SYNTHÈSE
PRATIQUE CANINE
Formation
Auteur(s) : TAREK BOUZOURAA
Les recommandations du précédent consensus de l’American College of Veterinary Internal Medicine (Acvim) de 2006 ont été remises à jour1. Les conseils relatifs à la borréliose en Europe évoluent.
Les cervidés constituent le réservoir de la tique Ixodes ricinus en Europe, dont l’expansion dicte la distribution de la maladie. La séroprévalence varie selon la région, mais aussi selon la race, puisque plusieurs études (dont deux en Europe) confirment une surreprésentation des bouviers bernois parmi les séropositifs. Ceux-ci ne sont pas plus exposés que les individus d’autres races aux coinfections par d’autres hémopathogènes (maladies ehrlichiennes, notamment), ce qui suggère qu’ils ne le sont pas davantage aux piqûres de tiques et seraient, en revanche, plus sensibles à Borrelia. Les études en Europe n’indiquent pas d’association entre la séropositivité à Borrelia et la maladie clinique, ce qui signifie qu’un chien séropositif n’est pas forcément malade. Cependant, la borréliose peut causer une glomérulonéphrite, voire moins probablement une mono/polyarthrite, toutes deux marquées avec syndrome fébrile. L’impact clinique de l’infection chez le chat demeure méconnu.
La détection par un test rapide (Snap® 4Dx Plus) d’anticorps dirigés contre la sous-unité C6 du complément impliqué dans la cascade immunitaire indique une infection active par Borrelia. Sa quantification en laboratoire de référence est nécessaire pour confirmer l’hypothèse, puis permettre l’évaluation et le suivi de la charge antigénique. La chute du titre C6 durant le traitement confirme l’élimination du pathogène, tandis qu’une recrudescence suggérera une rechute ou une réinfection. Bien qu’ils aient été associés à des résultats possiblement interprétables, les outils diagnostiques disponibles pour le chien ne doivent actuellement pas être utilisés chez le chat.
Lors d’arthrite avec séropositivité à Borrelia, une antibiothérapie et une analgésie (opioïdes) est mise en place, avec une réponse rapide. La doxycycline est privilégiée (10 mg/kg/j pour une période de 1 mois, avec une réponse appréciable dès 2 jours environ). La durée de 1 mois est motivée par la possible présence de coinfections (maladies ehrlichiennes ou leptospirose). Pour anticiper un éventuel effet indésirable de la doxycycline (chez le chiot notamment), l’amoxicilline-acide clavulanique reste une solution alternative acceptable. Les experts suggèrent l’emploi de céfovécine, mais ce protocole ne peut être suggéré en France actuellement pour des raisons réglementaires. Contrairement à l’humain, les arthrites chroniques à Borrelia chez le chien ne sont pas documentées. Ainsi, l’emploi d’anti-inflammatoires non-stéroïdiens n’est pas préconisé. Ils compliqueraient de plus la prescription de corticoïdes lorsqu’un processus immun (polyarthrite ou glomérulonéphrite) est présumé.
En l’absence de protéinurie chez un chien sain, les experts ne recommandent pas de traiter, afin d’éviter l’exposition injustifiée à un traitement générant des résistances ou des effets indésirables. En revanche, lors de séropositivité à Borrelia chez un chien sain, la présence d’une protéinurie doit être identifiée et traitée le cas échéant. Pour un cas stable (sans azotémie ou hypoalbuminémie), associer de la doxycycline à un traitement conventionnel (bénazépril à la dose de 0,25 à 0,5 mg/kg/j, aliment de soutien rénal, acides gras oméga 3,voire amlodipine à la dose de 0,2 à 0,4 mg/kg/j). Lors d’atteinte marquée (azotémie, hypoalbuminémie, œdèmes, déshydratation ou choc hémodynamique), la réalisation de biopsies rénales pour analyse histologique conventionnelle et avancée est proposée. Si elles sont déclinées par le propriétaire (coût d’environ 600 € en microscopie électronique et immunohistochimie) et en cas d’aggravation, l’emploi d’immunosuppresseurs (prednisolone à la dose de 1 à 2 mg/kg/j, notamment) peut être recommandé.
En zone d’endémie, la meilleure méthode de prévention reste l’inspection du pelage pour y déceler les tiques. Cet élément est primordial car les tiques sont actives dès 4 °C (même en climat tempéré). Bien que le consensus ne recommande pas de molécule en particulier, les auteurs préconisent les produits qui tuent rapidement les tiques ou préviennent leur attachement. Ils précisent que le fluralaner (Bravecto®) atteint une efficacité de 100 % dès 12 heures après application et que l’afoxolaner (Nexgard®) neutralise les tiques 8 heures après leur attachement. L’intérêt de la vaccination proposée en Amérique du Nord n’est pas validé par les experts.
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1 Litman M. P., Gerber P., Goldstein R. E. et coll. Acvim consensus update on Lyme borreliosis in dogs and cats. J. Vet. Intern. Med. 2018;32:887-903.