DOSSIER
Le recours aux spécialités pharmaceutiques dans les conditions définies ou non par autorisation de mise sur le marché (AMM) représente la majeure partie de la pratique en matière de thérapeutique en médecine vétérinaire. Toutefois, il existe des situations dans lesquelles le vétérinaire ne dispose pas de spécialités pharmaceutiques adaptées au contexte clinique. Si les vétérinaires connaissent bien les premiers alinéas du principe de la cascade visant à encadrer la prescription hors AMM, ils n’ont qu’une vague idée des possibilités offertes par les préparations extemporanées, dont la préparation magistrale est la principale représentante. À l’inverse, beaucoup de vétérinaires ignorent qu’ils en font dans leur exercice et ne respectent pas toujours les conditions de réalisation fixées par la réglementation.
D’un point de vue historique, au moment de la création des écoles vétérinaires, les préparations magistrales représentaient l’unique moyen thérapeutique disponible. Les étudiants élaboraient dans les laboratoires pharmaceutiques des préparations à partir d’une collection importante de plantes médicinales cultivées dans les jardins de l’école qui les formait. Les archives annoncent la disparition des cours d’analyse chimique et de préparation pharmaceutique en 1868, ce qui semble concomitant à l’arrivée des spécialités vétérinaires.
L’essor des spécialités pharmaceutiques a facilité la prise en charge des animaux, toutes espèces confondues. Toutefois, le recours à la préparation magistrale peut représenter plusieurs intérêts, dont l’adaptation posologique, entre autres pour des espèces de petites tailles (par exemple, les nouveaux animaux de compagnie ou NAC), et l’adaptation galénique, avec notamment l’ajout d’arôme. L’objectif ultime est de traiter l’animal en favorisant l’observance du traitement qui reste parfois difficile, en particulier pour les chats et les NAC.
Le Code de la santé publique définit la préparation magistrale vétérinaire comme un médicament préparé extemporanément, c’est-à-dire juste avant son utilisation (article L.5141-2). Elle doit être réalisée par un vétérinaire, un pharmacien ou un préparateur en pharmacie diplômé selon une prescription destinée à un animal ou à des animaux d’une même exploitation (article L.5143-1).
La législation actuelle autorise les vétérinaires à réaliser eux-mêmes les préparations magistrales dans le respect des bonnes pratiques de préparation et du principe de la cascade (article L.5143-2). Le recours à la préparation magistrale peut paraître contraignant, compliqué et chronophage ; cela freine souvent le vétérinaire à la réalisation d’une préparation complexe. C’est la raison pour laquelle la plupart des vétérinaires ayant recours à la préparation magistrale confient son élaboration à une officine de proximité.
L’arrêté du 9 juin 2004 relatif aux bonnes pratiques de préparation extemporanée des médicaments vétérinaires définit les conditions de réalisation des préparations magistrales vétérinaires.
Les préparations magistrales peuvent se présenter sous différentes formes pharmaceutiques solides telles que des gélules, liquides telles que des solutions ou suspensions, ou semi-solides telles que des crèmes ou pommades.
Le reconditionnement de spécialités pharmaceutiques afin de fractionner la dose est autorisé sous réserve de respecter les bonnes pratiques de préparation et de garantir sa qualité. Cela représente une grande part des préparations magistrales dont l’objectif est d’adapter le dosage d’une formulation à usage humain à un animal.
Les préparations injectables nécessitant des conditions aseptiques strictes ne sont généralement pas réalisées, les contraintes relatives à la stérilité étant trop importantes pour permettre la réalisation de préparations vétérinaires injectables par la plupart des structures existantes. La reconstitution d’une suspension à partir d’une spécialité sous forme de lyophilisat ne constitue pas une préparation magistrale ; de même que la reconstitution des préparations de chimiothérapie anticancéreuse.
En revanche, toute modification de la forme pharmaceutique d’une spécialité ou toute utilisation dans des conditions qui ne sont pas définies dans l’AMM peut être assimilée à la réalisation d’une préparation extemporanée (mélange de deux spécialités pharmaceutiques avant administration, comme celui de Tévémyxine® collyre avec le NAC® collyre dans le traitement des ulcères cornéen).
S’agissant d’un médicament d’un point de vue légal, son étiquetage doit répondre également à un certain nombre de règles énoncées dans le décret n° 2012-12-1201 du 29 octobre 2012.
Enfin, la réalisation d’une préparation magistrale implique la traçabilité de la fabrication par la personne qui la réalise (tenue d’un registre, par exemple) et engage la responsabilité de celui qui la prépare comme de celui qui la prescrit. La personne qui l’élabore doit s’assurer de la compatibilité des matières premières, de la faisabilité technique, de la qualité de la préparation sur les plans qualitatif et quantitatif, etc. Le prescripteur doit s’assurer de la pertinence du recours à une préparation magistrale et des risques pour l’animal et le détenteur qui va l’administrer.
Aux États-Unis, la préparation magistrale représente un véritable marché. Cette thérapeutique est très courante et développée. Une revue spécialisée sur la préparation magistrale vétérinaire existe même depuis 1997 : International Journal of Pharmaceutical Compounding. La multitude de formes galéniques (gels transdermiques, suspensions orales, formes sublinguales) existant aux États-Unis révèle le niveau d’avancement du pays sur ce terrain. Ce panel de formes galéniques associé à un stock de 250 saveurs, avec parmi les plus originales cheddar cheesie ou bacon croustillant, permet de satisfaire au mieux l’animal pris en charge et d’assurer une observance du traitement optimale. Le développement de la voie transdermique constitue également une nouvelle orientation permettant de s’affranchir du goût et de faciliter l’administration.
En France, cette pratique reste encore marginale malgré l’existence d’un certain nombres de sociétés proposant des matières premières et des conditionnements.
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AVANTAGES
INCONVÉNIENTS