À la suite d’un licenciement, conclure une transaction avec un salarié - La Semaine Vétérinaire n° 1822 du 04/10/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1822 du 04/10/2019

DROIT DU TRAVAIL

ÉCO GESTION

Auteur(s) : JACQUES NADEL 

Parfois, la tranquillité n’a pas de prix. Afin de couper court à un conflit amorcé ou de prévenir toute contestation future devant les prud’hommes et de sécuriser une rupture de contrat de travail, l’employeur peut, à la suite d’un licenciement, proposer au salarié une conciliation à l’amiable qui se matérialise par la signature d’une transaction.

Qu’elle soit mise en place à titre préventif ou curatif, « la transaction est un contrat conclu entre un employeur et son salarié, contenant des concessions réciproques. Ce principe de transiger avec un salarié va au-delà du droit social, explique Matthieu Blaesi, avocat du cabinet Sapone-Blaesi à Paris. Le salarié abandonne son droit de contester la ou les causes de son licenciement contre le versement par son employeur d’une indemnité transactionnelle, en plus de l’indemnité légale. » Cette indemnité peut se traduire de manière « sonnante et trébuchante » par le versement de deux ou trois mois de salaires et/ou une dispense de préavis tout en maintenant la rémunération du salarié, mais aussi par une renonciation de l’employeur à se prévaloir d’une faute grave, par exemple.

Cet accord transactionnel doit faire l’objet d’un consentement libre et éclairé des deux parties. Il ne peut être signé et donc être effectif qu’après la rupture du contrat de travail. Un délai raisonnable entre cette dernière et la signature d’une transaction doit être respecté, celui-ci étant nécessaire pour les discussions amiables et fixer les modalités de l’accord.

Un accord qu’il convient de bien verrouiller

« Il est important de bien rédiger l’accord et de bien cadrer le sujet de la transaction », recommande Matthieu Blaesi. En particulier, il convient d’indiquer de façon précise la nature et les causes du litige, les motifs des griefs reprochés, les éventuels points de désaccord entre les signataires. « L’employeur a intérêt à mentionner dans cet accord le nombre de causes le plus large possible et le salarié doit savoir les raisons pour lesquelles il accepte cette transaction », développe-t-il.

Il est aussi primordial d’éviter une rédaction dans des termes trop généraux qui pourrait engendrer des difficultés d’interprétation ou si, par leur imprécision, ils ne permettent pas de valider les contours de l’accord ; l’employeur ne serait pas à l’abri, le cas échéant, de poursuites en justice par son salarié, concernant un contentieux qui n’a pas été expressément mentionné dans la transaction.

À titre de mise en garde, cet avocat rapporte l’exemple d’un salarié qui avait été licencié et qui s’était plaint ouvertement de harcèlement moral de son employeur. Sauf accusation calomnieuse, une plainte de harcèlement moral n’est pas une cause de licenciement. Ayant transigé avec son employeur sur la cause (autre) de son licenciement, le salarié ne l’a pas contesté devant les prud’hommes, mais a engagé une action prud’homale pour harcèlement moral.

Des concessions réciproques équilibrées

Autre point de vigilance qui peut être source de contentieux : les concessions réciproques doivent être équilibrées. Des concessions disproportionnées invalideraient une transaction. Par exemple, une transaction conclut avec un salarié ayant dix ans d’ancienneté et à qui l’employeur a proposé une indemnité transactionnelle de moins de deux mois a été annulée en raison du caractère jugé « dérisoire » de l’indemnité.

Cet accord doit également être assorti d’une clause de confidentialité, qui interdit au salarié de divulguer des informations sur la transaction, notamment auprès d’autres salariés de l’entreprise, et d’une clause pénale que l’employeur peut faire jouer en cas de violation de cette clause (versement par le salarié d’une indemnité de non-respect, montant à négocier entre les parties, par exemple, 10 à 15 % du montant de la transaction). Mais, en ce domaine, la meilleure des précautions est de solliciter pour chaque partie le concours d’un avocat, car ces professionnels du droit sont tenus entre eux au secret professionnel. En particulier, dans l’hypothèse où les engagements ne seraient pas respectés par l’une ou l’autre des parties, engendrant un nouveau contentieux.