VIE PROFESSIONNELLE
ACTU
Auteur(s) : TANIT HALFON
La fermeture du cabinet vétérinaire de Couiza a mis en exergue les difficultés inhérentes à l’exercice rural, et le spectre de la désertification vétérinaire. Au-delà du constat, les parties prenantes peinent à trouver des solutions.
Un sentiment d’extrême gâchis. » Frédéric Decante, vétérinaire rural en Lozère et secrétaire général adjoint au conseil régional de l’Ordre de l’Occitanie, semble lassé. Il faut dire que la fermeture récente du seul cabinet vétérinaire de la commune de Couiza1, dans le département de l’Aude, a révélé avec fracas toute la complexité d’exercer le métier de vétérinaire rural. Un véritable sac de nœuds, avec pour toile de fond la question du maillage vétérinaire en zone rurale. « La région Occitanie présente déjà des zones avec un sous-effectif de vétérinaires ruraux, à savoir le Gard et les Pyrénées-Orientales, ce qui pose problème pour les prophylaxies », souligne Delphine Ferré-Fayache, praticienne mixte à Lacapelle-Marival et présidente du groupement technique vétérinaire (GTV) Occitanie. Dans le cas de Couiza, l’insuffisance des tarifs des campagnes 2017-2018 de prophylaxies avait abouti à un déficit de 9 000 € dans la trésorerie. « On se rend compte qu’ils ne sont en général pas bien défendus par la profession, par manque d’information et de formation, souligne Delphine Ferré-Fayache. Le rapport du CGAAER 2 avait, par exemple, montré que des départements pratiquaient des tarifs d’intradermoréactions simples inférieurs au revenu minimum d’une auxiliaire vétérinaire. » Elle souligne d’ailleurs le fait que les vétérinaires ne sont pas formés pour être des chefs d’entreprise : « Cela se retrouve dans la tarification des médicaments, dans les négociations. » Ce rapport, daté de juillet 2018, faisait le point sur le suivi des recommandations d’une précédente mission du CGAAER de 2015 relative à la fixation des tarifs de prophylaxie. Les conclusions avaient été dures : « La campagne 2017-2018 montre clairement que les acteurs qui participent à l’élaboration des tarifs ne se sont pas emparés des outils et instructions de la note de service de la Direction générale de l’alimentation. » Était constaté, entre autres, qu’« aucune étude comptable n’a été réalisée malgré de nombreux cas de tarifs manifestement sous-évalués », ou encore qu’« à part pour les intradermotuberculinations comparatives les tarifs, y compris ceux qui sont manifestement hors norme, ont peu évolué ».
La prophylaxie serait-elle le cœur du problème ? Thierry Mathet, chef du service vétérinaire de la direction départementale de la protection des populations de l’Aude, nuance fortement : « Dans le cas de Couiza, les tarifs ont été rediscutés 3 , permettant d’aboutir à un nouvel accord avec des tarifs fortement réévalués. » En outre, depuis deux ans, la convention départementale intégrait la possibilité de facturer un tarif horaire : « Si l’éleveur ne joue pas le jeu en matière d’organisation des visites et de contention des animaux, il est convenu que le praticien peut appliquer un tarif horaire au lieu du forfaitaire. Mais d’après ce que j’ai pu comprendre, cela était peu pratiqué. » Et de rappeler aussi que la rémunération du praticien rural ne dépend pas uniquement...