Cession : pensez à informer vos salariés ! - La Semaine Vétérinaire n° 1823 du 27/09/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1823 du 27/09/2019

DROIT DU TRAVAIL

ÉCO GESTION

Auteur(s) : JACQUES NADEL  

Les salariés doivent être informés au préalable de la cession de leur entreprise à certaines conditions et sous certaines modalités fixées par la loi économie sociale et solidaire du 2 août 2014.

Depuis la loi économie sociale et solidaire du 2 août 2014, tout chef d’entreprise qui emploie moins de 250 salariés et dont le chiffre d’affaires n’excède pas 50 millions d’euros a l’obligation de les informer au préalable de la cession de l’entreprise, qu’il s’agisse d’un fonds de commerce (ou libéral), de parts sociales ou bien d’actions représentant la majorité du capital social. L’objectif est de permettre aux salariés qui le souhaitent de présenter une offre de rachat.

Une obligation

Cette notification doit intervenir au plus tard deux mois avant la date de la cession présumée afin de leur laisser le temps pour qu’ils puissent réfléchir et proposer une offre. L’exploitant cédant son fonds, sa société ou ses parts ne doit pas prendre cette obligation à la légère. En cas de non-respect de cette formalité (défaut d’information, retard ou information incomplète), le cédant est sanctionné par une amende civile ne pouvant excéder 2 % du prix de vente. De plus, tout salarié s’estimant lésé (en l’occurrence un vétérinaire salarié de la clinique) pourra obtenir des dommages-intérêts à condition qu’il supporte un préjudice.

En pratique, cette information doit s’effectuer par tout moyen de nature à rendre certaine la date de réception (lettre recommandée avec accusé de réception (AR), lettre remise en main propre contre émargement ou récépissé, affichage avec signature d’un registre daté attestant avoir connaissance de cet affichage, réunion formalisée, courriel avec une date de réception certifiée, etc.). Pour l’envoi en lettre recommandée avec AR, le point de départ du délai d’information préalable de deux mois court à compter de la première présentation de la lettre.

Et si le projet est prolongé dans le temps, il convient de le notifier à nouveau aux salariés tous les deux ans.

Le cédant n’est pas tenu par cette obligation dans certaines opérations : les apports partiels d’actifs, les donations, les ventes familiales ou dans certaines situations, notamment lorsque l’entreprise fait l’objet d’une procédure de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires. Sont exclues également les cessions indirectes de titres, comme une cession d’entreprise par l’intermédiaire de la cession de titres d’une société holding.

Qu’entend-on par informer ?

L’information fournie par le dirigeant à ses salariés peut se limiter à sa seule volonté de vendre et au fait qu’ils peuvent présenter une offre d’achat. Mais la loi ne l’oblige pas à transmettre d’autres informations sur la cession envisagée, ni à fournir des documents comptables qui sont essentiels pour pouvoir faire une offre de reprise.

Quoi qu’il en soit, le cédant garde l’entière liberté de choisir son acquéreur. En toutes hypothèses, les salariés ne bénéficient pas d’un droit de préemption ou de préférence sur le fonds ou les titres. Ils peuvent présenter une offre, cependant le cédant n’est pas tenu d’y donner suite, et encore moins d’entrer en négociation avec eux, même si l’offre en question est plus intéressante que celles recueillies par ailleurs. Le refus d’étudier leur offre n’a pas besoin d’être motivé.

Et quand bien même l’offre de ses salariés l’intéresserait, si le cédant a déjà signé un compromis avec un acquéreur, il n’est plus en mesure de vendre son fonds ou ses parts à un salarié qui se serait manifesté (sauf à se dédire et à indemniser le tiers repreneur). Mais ce ne serait pas le seul problème rencontré si le vendeur a déjà accepté une offre d’achat d’un acquéreur présenté par une agence de transactions (en cas de compromis déjà signé, outre le dédit à payer, la commission d’agence est due, que le mandat de vente qui a été signé soit exclusif ou pas). Aussi, pour éviter ces difficultés, il est préférable d’informer les salariés dès qu’un projet de cession est envisagé, bien avant qu’un acquéreur ne soit trouvé.