INFECTIOLOGIE
PRATIQUE CANINE
L'ACTU
Auteur(s) : ANNE-CLAIRE GAGNON
Souvent déroutantes d’un point de vue clinique, les affections dues à des champignons ne sont pas si rares chez le chat. Leur guérison reste aléatoire dans la plupart des cas.
Le congrès de l’International Society of Feline Medicine (ISFM) a réuni plus de 500 participants, venus de 42 pays, fin juin à Cavtat en Croatie, pour cinq journées autour de la pathologie infectieuse féline.
Souvent apyrétiques, certains champignons pathogènes sont particulièrement bien adaptés aux mammifères et aux nouvelles conditions climatiques, puisqu’elles se développent à des températures comprises entre 25 et 37 °C. Les champignons affectionnent l’appareil respiratoire supérieur, la peau, les ganglions, le système nerveux, les yeux. La non-réponse à une antibiothérapie ou un antécédent d’utilisation d’immunosuppresseurs sont évocateurs de la survenue d’une mycose. Jane Sykes (université de Davis, États-Unis) a souligné l’urgence que constituerait une infection à Candida auris, mortelle et récemment décrite en médecine humaine. Les candidoses restent rares chez le chat et provoquent souvent une déviation de la cloison nasale, avec atteinte de la gueule et des extrémités. Comme pour les mycoses systémiques, les molécules de choix sont le fluconazole et l’itraconazole, dont la posologie et la durée de traitement varient selon les individus (en fonction de la réponse inflammatoire de chacun).
La cryptococcose est six fois plus fréquente chez le chat que chez le chien, et l’infection par l’herpèsvirus félin la favorise. Richard Malik (Sydney, Australie) décrit le tableau clinique comme un iceberg, discret en surface. Les chats (comme les chiens) filtrent dans leurs cavités rhino-sinusales les particules qu’ils inhalent, raison pour laquelle les spores de Cryptococcus neoformans et gattii s’y développent (alors que, chez l’humain, les formes sont souvent pulmonaires). Le diagnostic peut se faire simplement depuis la commercialisation de deux tests rapides, Crypto PS1 et Immy2, les positifs étant à confirmer cependant avec un test au latex3 ou par coloration avec la méthode de Ziehl-Neelsen. L’atteinte de la rétine et du nerf optique peut donner des mydriases bilatérales avec perte de réflexe photomoteur, sans hypertension, qui rétrocèdent après traitement (flucytosine et amphotéricine B, les deux molécules agissant de façon synergique). Lors de rhinosinusite, le traitement au fluconazole seul peut suffire (10 mg/kg per os, deux fois par jour pendant 6 à 12 mois, voire plus).
Parmi les mycobactérioses cutanées, plusieurs formes sévissent chez l’humain, les rongeurs, l’écureuil roux en Grande-Bretagne, les vaches et les chèvres (avec une thélite et scrotite nodulaire due à Mycobacterium uberis), et les chats. Pour ces derniers, la voie d’entrée est une morsure par un rongeur. Actuellement, trois agents sont décrits chez le chat, dont un exclusivement en Australie. Les lésions nodulaires apparaissent sur la tête ou les antérieurs, siège de la morsure. Le traitement est chirurgical, par exérèse des lésions cutanées, et médical, avec de la clarithromycine et de la rifampicine. Au moins un cas a été décrit et traité avec succès en France, sur un chat importé de Grèce4.
L’émergence de la tuberculose chez le chat, notamment en Grande-Bretagne, semble plus le fait d’une alimentation à base de venaison crue, mais les morsures par les blaireaux et les musaraignes sont également incriminées. Une tuberculose nosocomiale, avec pour seuls symptômes des plaies, a même été décrite dans une structure britannique vétérinaire5. Le traitement des animaux atteints est interdit en France, et toute suspicion de tuberculose doit faire l’objet d’une déclaration à la direction départementale de la protection des populations (DDPP), avec réalisation d’une culture et d’une polymerase chain reaction (PCR), pour confirmation.
La panniculite inguinale due à des bactéries Mycobacterium à croissance rapide (présentes dans le sol) se traduit par de multiples lésions punctiformes (photo), sans retentissement sur l’état général. Le pannicule adipeux, n’ayant aucune défense immunitaire, constitue donc un milieu à risque. La procédure diagnostique inclut une recherche d’agent pathogène par culture et PCR, en lien avec la DDPP et/ou le service dermatologie des écoles nationales vétérinaires. Le traitement est autorisé (chirurgical et antibiothérapie ciblée : pradofloxacine, doxycycline, clarithromycine), en prenant toute précaution nécessaire pour la santé publique.
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2 immy.com.
3 Test d’agglutination passive dans lequel l’antigène est absorbé sur les particules de latex qui ensuite s’agrègent dans la présence de l’anticorps spécifique de l’antigène absorbé.
4 Courtin F., Huerre M., Fyfe J. et coll. A case of feline leprosy caused by Mycobacterium lepraemurium originating from the island of Kythira (Greece) : diagnosis and treatment. J. Feline Med. Surg. 2007;9(3):238-241.
5 Murray A., Dineen A., Kelly P. et coll. Nosocomial spread of Mycobacterium bovis in domestic cats. J. Feline Med. Surg. 2015;17(2):173-180.
DE L’IMPORTANCE DE L’IDENTIFICATION DES GERMES
UNE TECHNIQUE RÉVOLUTIONNAIRE
Dans la jungle des moyens de dépistage, l’apparition du Matrix-assisted laser desorption/ionization-time of flight (Maldi-TOF) révolutionne l’identification spécifique des germes. Cette technique détruit les membranes cellulaires des bactéries pour en extraire les protéines, qu’elle sépare. Le Maldi-TOF est une technique beaucoup plus rapide que la culture, capable d’identifier complètement chaque bactérie, notamment son espèce, et de mettre en évidence celles qui sont rares, voire inconnues, en donnant le spectre unique de sensibilité aux antibiotiques pour chaque germe.ET AUSSI…