Le chien brachycéphale, un malade invisible - La Semaine Vétérinaire n° 1824 du 04/10/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1824 du 04/10/2019

ÉPIDÉMIOLOGIE

PRATIQUE CANINE

L'ACTU

Auteur(s) : TANIT HALFON  

Les propriétaires de chiens brachycéphales évaluent mal l’état de santé de leur animal, révèle une enquête.

Les propriétaires de chiens brachycéphales croient, à tort, que leur chien est en bonne santé, mais aussi en meilleure santé que le reste des individus de la même race. C’est ce que conclut une récente enquête1 publiée dans PLOS One menée auprès de 2 168 propriétaires de carlins et de bouledogues anglais et français du Royaume-Uni (72 %), des États-Unis (14 %) et du Canada (2,5 %). Face à la popularité croissante de ces races, des chercheurs du Royal Veterinary College et de l’université de Nottingham (Royaume-Uni), en association avec l’université d’Édimbourg (Écosse), ont cherché à mieux comprendre la complexité des croyances et des perceptions qu’ont les propriétaires vis-à-vis de leur animal et de la race en général. Les résultats parlent d’eux-mêmes. Environ 70 % des propriétaires estiment que leur chien2 est en « meilleure santé possible » ou en « très bonne santé ». Seuls 6,8 % considèrent qu’il est en moins bonne santé que la moyenne pour sa race. Pourtant, ces mêmes propriétaires signalent aussi l’existence d’un historique médical, caractérisé majoritairement par des allergies (27 %), des ulcères cornéens (15,4 %), des infections cutanées (15 %) et de syndrome brachycéphale (11,8 %). 20 % des propriétaires indiquent que leur animal a subi une ou plusieurs interventions chirurgicales liées à leur conformation. 36,5 % déclarent qu’ils peuvent percevoir sur leur chien une intolérance à la chaleur, 18 % des difficultés respiratoires, 5 % de prise alimentaire et près de 3 % de sommeil.

Une “normalisation” des problèmes de santé

Pour les auteurs, cette étude révèle l’intérêt pour le praticien de poser des questions spécifiques et fermées à ces clients, au lieu de demander simplement si le chien va bien. Cette façon de procéder permettrait de lutter contre le phénomène de “normalisation” qui rend certains troubles acceptables pour la race. En outre, les propriétaires ne prendraient conscience du mauvais état de santé de leur animal qu’à partir d’un certain seuil de sévérité des signes cliniques. Selon les auteurs, ces erreurs de perception pourraient être expliquées par des processus de dissonance cognitive. « Ces phénomènes sont préoccupants pour le bien-être des animaux, car ils peuvent prolonger leur souffrance et aggraver le pronostic. Par exemple, parce que les propriétaires peuvent tarder à consulter », soulignent-ils. À noter que cette perception erronée ne se limite pas à la santé. L’étude montre également qu’ils sous-estiment le niveau d’exercice souhaitable pour leur chien, de même qu’ils peuvent associer la race à un comportement type.

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2 L’âge médian des chiens est d’environ 2 ans, la majorité ayant moins de 5 ans.