Un réseau européen pour le partage d’expertises et d’expériences en matière de productivité ovine - La Semaine Vétérinaire n° 1824 du 04/10/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1824 du 04/10/2019

ÉLEVAGE

PRATIQUE MIXTE

L'ACTU

Auteur(s) : CLOTHILDE BARDE  

Le séminaire final du projet européen SheepNet, qui s’est tenu les 3 et 4 septembre, a permis de présenter certaines pistes d’amélioration de la productivité de l’élevage ovin.

Écouter, discuter et partager de nouvelles idées de techniques d’élevage afin d’améliorer la productivité en élevage ovin laitier et allaitant », a indiqué Jean-Marc Gautier (Idele, Institut de l’élevage), interrogé sur la naissance, en novembre 2016, de SheepNet (Sharing Expertise and Experience towards sheep Productivity througt Networking), lors du séminaire consacré au projet qui s’est tenu les 3 et 4 septembre derniers (à Gramat, dans le Lot, et Bellac, en Haute-Vienne).

Une baisse inquiétante

Telle était l’ambition de ce réseau européen, financé par l’Union européenne, lors de sa mise en place il y a trois ans par l’Idele. En effet, au cours des 20 dernières années le nombre d’élevages ovins laitiers et allaitants a été divisé par deux en Europe (85 millions d’ovins en 20131) et la productivité ovine a été réduite de presque 40 %, selon le pays et le mode d’élevage. Ces tendances à la baisse sont inquiétantes pour le développement durable d’un grand nombre de territoires. « En Europe, nous ne sommes pas autosuffisants actuellement pour la production de viande alors qu’il suffirait d’augmenter la productivité (nombre d’agneaux élevés par brebis ou nombre de brebis traités par brebis mise à la reproduction) en élevage ovin de 0,1 % pour avoir un niveau d’autosuffisance de 92 % », a ajouté Jean-Marc Gautier.

C’est pourquoi le projet SheepNet a été créé en Europe comme un « réseau européen de partage d’expertise et de savoirs sur la productivité ovine qui repose sur une approche multi-acteurs et transdisciplinaire. » Les six pays européens (France, Irlande, Italie, Roumanie, Espagne et Royaume-Uni) impliqués ont été choisis pour leur diversité de systèmes d’élevage et de races. De plus, l’intégration de la Turquie (31 millions d’ovins) permet au projet de s’ouvrir aussi à des systèmes de production nouveaux.

42 propositions

Parmi les différents intervenants, des chercheurs, des vétérinaires, des conseillers agricoles et des éleveurs ont confronté leurs expériences et leurs connaissances en génétique, sur l’alimentation du troupeau, sur la reproduction ou sur la santé animale pour faire ressortir à grande échelle des questions concrètes. Dans un premier temps, trois leviers d’optimisation principaux ont été identifiés : l’amélioration de la reproduction, de la gestation et la diminution de la mortalité des agneaux. Puis, les conclusions des travaux de recherche3 ont été présentées et, à l’issue des concertations, ce sont 42 propositions de solutions pour une meilleure productivité en élevage d’ovins qui ont émergé, parmi lesquelles l’amélioration de l’état corporel, de la santé, de la nutrition des mères, de la vigueur et du poids à la naissance des agneaux, mais aussi du diagnostic de gestation, du contrôle des avortements, de la quantité et de la qualité du colostrum, ainsi que de la conception des abris et de la préparation de l’agnelage. Ces solutions ont ensuite été testées dans les fermes partenaires des réseaux de chaque pays, à l’origine d’un catalogue de “88 trucs et astuces” innovants pour faciliter la mise en œuvre des solutions (par exemple, une ceinture de menuisier comme kit d’agnelage en France).

Des thématiques en suspens

Selon Jean-Marc Gautier, « aujourd’hui, certains changements de pratique ont déjà vu le jour en élevage, toutefois, 19 thématiques nécessitent encore un travail de recherche et d’accompagnement ». Un nouveau projet européen, EuroSheep4, piloté cette fois encore par l’Idele, incluant neuf pays, a donc été retenu par la commission européenne pour la période 2020-2023. Les échanges lancés seront enrichis de deux nouvelles thématiques : la gestion de la santé et de l’alimentation des brebis en lactation, ainsi que la robustesse des agneaux et le renouvellement du troupeau. « C’est un nouveau projet passionnant qui amène de nouveaux défis », a conclu Jean-Marc Gautier.

1 Eurostat, 2013.

2 bit.ly/2o41Ohi.

3 En France : réseaux Robustagno (Lot et Aveyron), Association nationale insémination ovine (Anio) et Centre interrégional d’information et de recherche en production ovine (Ciirpo).

4 European Network for Interactive and Innovative Knowledge Exchange on Animal Health and Nutrition Between the Sheep Industry Actors and Stakeholders : bit.ly/2oUfT1d.

« UNE APPROCHE MULTI-ACTEURS COCONSTRUITE »

Quelle est la visée de ce projet ?
Les solutions proposées ont été mises en ligne1 pour pouvoir être appliquées en pratique. Certaines ont déjà été testées et l’objectif final est qu’elles soient diffusées hors de ce réseau le plus largement possible sur le territoire.

En quoi ce projet est-il novateur ?
Au-delà des solutions trouvées, cette approche multi-acteurs bénéficie de retours positifs de la part des éleveurs, des vétérinaires et des techniciens qui l’ont coconstruite. Ce n’est pas un projet “descendant”, mais partagé. Leurs avis ont été pris en compte à chaque étape du projet et les solutions retenues bénéficient d’une caution scientifique.
1 sheepnet.network/fr.