FISCALITÉ
ÉCO GESTION
Acquérir les murs de sa clinique vétérinaire est une opportunité à saisir. L’investissement immobilier est généralement réalisé par le biais d’une société civile immobilière. Reste à choisir son régime fiscal : impôt sur le revenu ou sur les sociétés ?
Constituée dans le cercle familial ou entre associés, la société civile immobilière (SCI) a pour objet d’acquérir ou de gérer un bien immobilier. Facile à constituer, elle est l’outil privilégié de gestion et de transmission d’un patrimoine immobilier. Le vétérinaire dirigeant qui ne conserve pas l’immeuble d’exploitation dans son patrimoine privé ni ne l’inscrit à l’actif de son entreprise peut décider de le “loger” dans une SCI. Dans ce cas, l’immeuble (les murs) peut être mis à la disposition de la clinique ou du cabinet vétérinaire, gratuitement ou moyennant un loyer.
C’est donc la SCI qui s’endettera pour se porter acquéreur du local professionnel et qui remboursera son emprunt avec les loyers versés par l’entreprise individuelle ou la société qui exploite la clinique (ou le cabinet) vétérinaire.
Par défaut, une SCI est soumise à l’impôt sur le revenu (IR), ce qui explique que le choix s’oriente très majoritairement vers une société “fiscalement transparente”. Autrement dit, le résultat est déterminé au niveau de la société, mais imposable entre les mains des associés (en tant que revenus fonciers).
Mais rien n’empêche en cours de vie, sur option, d’épouser le régime à l’IS si le dirigeant y a intérêt. En fonction des objectifs et de la stratégie patrimoniale, il peut y avoir des différences importantes de taxation des gains (loyers, plus-values immobilières) selon la fiscalité applicable.
L’option (irrévocable) pour le régime à l’impôt sur les sociétés (IS) reste encore un choix minoritaire en raison de la double imposition, donc plus forte qu’à l’IR, qui s’applique lors de la cession du bien immobilier.
Cependant, la fiscalité est mouvante et plutôt en faveur ces derniers temps du régime IS. Avec la baisse du taux d’IS à 28 % pour les 500 000 premiers euros de bénéfices (toutes entreprises, sauf si taux réduit de 15 % applicable sur les 38 120 premiers euros) et 31 % au-delà en 2019, avec l’instauration d’un prélèvement forfaitaire unique à 30 % (flat tax) sur les dividendes et plus-values de titres de sociétés à l’IS, compte tenu aussi de l’augmentation des prélèvements sociaux à 17,20 % sur les revenus fonciers notamment, il peut être judicieux d’opter pour l’IS. Autant de dispositions de nature à rebattre les cartes et qui doivent amener à s’interroger sur le choix de l’IS.
Une étude de cas (source : Serendipity Conseil) permet d’éclairer ce choix et d’apporter des éléments de réponse à cette question. Imaginons un vétérinaire qui à l’opportunité de transférer sa clinique dans un nouveau local dont il se porte acquéreur au travers d’une SCI constituée avec son épouse. Le taux marginal d’imposition du couple à l’IR est de 41 %. Les caractéristiques de l’investissement immobilier de ce vétérinaire sont résumées ci-contre (tableau 1).
Dans une SCI à l’IR, il est possible de déduire les intérêts d’emprunt et certains frais des loyers perçus. Les bénéfices réalisés, qu’ils aient été ou non appréhendés par les associés, sont imposés à l’IR dans la catégorie des revenus fonciers. Le couple va donc supporter une imposition sur des revenus non encaissés puisque consacrés au remboursement en capital de l’emprunt. La pression fiscale est importante (IR à 41 % + 17,2 % de prélèvements sociaux, soit un taux d’imposition global de 55,4 %), responsable d’un flux de trésorerie cumulé au terme des 15 ans négatif (- 225 k€). Soit, en moyenne, un effort financier du couple de 15 k€ par an (tableau 2).
Au contraire, l’IS permet de réduire considérablement la pression fiscale en phase de remboursement de l’emprunt du fait de la déduction des amortissements comptables du bien, des intérêts du prêt, des frais d’acquisition et des droits d’enregistrement. Le bénéfice imposable s’en trouve nettement réduit.
Autre avantage : le taux de l’IS évolue en sens inverse de la fiscalité des personnes physiques.
Il en résulte une capacité de remboursement incomparablement accrue, ce qui permet au couple de se distribuer 42 k€ (après imposition à la flat tax) sur la période. L’écart entre le gain de trésorerie cumulé à l’IS et le déficit de trésorerie cumulé à l’IR est de 267 k€(tableau 3).
La situation s’inverse à la sortie, au moment de la revente du bien. À l’IS, la SCI supporte une imposition plus forte de la plus-value de cession (régime des plus-values professionnelles au taux normal de l’IS + taxation du solde net de la cession à la flat tax de 30 %). À l’IR, les plus-values sont soumises au régime des plus-values immobilières des particuliers, calculées à partir du prix de revient et de la date d’acquisition de l’immeuble, avec un abattement progressif par année de détention.
Avec un prix de revente de 616 k€ correspondant à une valorisation de 1,5 % par an, au terme des 15 années la sortie est beaucoup douce à l’IR au niveau des impôts à régler, d’où un net disponible pour le couple qui est supérieur à l’IR (599 k€versus 380 k€ à l’IS) de 219 k€(tableaux 4 et 5).
À l’issue de la revente, les résultats penchent globalement en faveur de l’option IS, avec un écart favorable de 48 k€ (267-219). Mais cet exemple ne permet pas de tirer des conclusions définitives. Sauf à dire que la SCI à l’IS est un choix judicieux pour un bien pour lequel on ne prévoit pas de plus-values importantes, mais qui offre des revenus locatifs très intéressants. Et que l’IR se révèle pertinent lorsque le vétérinaire est en situation de déficits fonciers.
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OPTER POUR L’IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS