« Le Respe doit s’inscrire dans une démarche d’entraînement des autres pays » - La Semaine Vétérinaire n° 1831 du 22/11/2019
La Semaine Vétérinaire n° 1831 du 22/11/2019

ENTRETIEN

PRATIQUE MIXTE

L'ACTU

Auteur(s) : PROPOS RECUEILLIS PAR MARINE NEVEUX  

Quels sont les enjeux sanitaires majeurs de la filière équine aujourd’hui ?

La France fait partie des grandes nations d’élevage et de compétition hippiques. Sa particularité est d’être un carrefour géographique qui subit une forte circulation d’équidés.

La protection sanitaire doit donc être beaucoup plus élevée que pour des pays insulaires dont la biosécurité est plus facile à assurer. Historiquement, le Respe a permis une réponse structurante aux enjeux sanitaires de la filière. Continuer de relever le défi d’une politique sanitaire réaliste économiquement et efficace techniquement est un enjeu majeur de ce réseau pour accompagner les éleveurs, les agriculteurs diversifiés dans le cheval, les détenteurs professionnels et amateurs dans un perfectionnement de leurs pratiques sanitaires en s’appuyant sur plus de 850 vétérinaires sentinelles qui assurent une veille.

Le Respe est un formidable outil avec une gouvernance sanitaire partagée entre socioprofessionnels de la filière et des vétérinaires représentant la profession. Ce réseau en format associatif est le porteur des actions sanitaires collectives décidées par la gouvernance professionnelle. Il est le support de programmes collectifs volontaires, notamment autour des maladies non réglementées aujourd’hui comme les herpèsvirus, la grippe, la gourme et la piroplasmose. Mais il est également un outil de veille pour des maladies réglementées dont certaines sont en recrudescence (West Nile, AIE1, etc.)

Quels freins souhaitez-vous dépasser avec le Respe ?

Il y a deux points de vigilance. Le premier : la recherche d’un financement pérenne est toujours d’actualité. En effet, le Respe fonctionne avec plus de 90 % d’aides, essentiellement du conseil départemental du Calvados, de l’IFCE2, de la DGAL3, du Fonds Éperon et de la FNCF4. À l’issue de la réforme de la gouvernance en santé animale, on peut espérer un décret qui permettrait à des réseaux d’épidémiosurveillance représentatif d’une filière de lever des cotisations obligatoires auprès des détenteurs pour l’établissement d’actions sanitaires collectives.

Un autre frein à lever avec une structuration européenne des pays à forte tradition équestre est la nécessaire transparence consubstantielle à l’efficacité d’un outil de surveillance et de biosécurité. Le Respe rassure nos homologues des pays voisins, le fait de déclarer tous les épisodes sanitaires, les épizooties et leur gestion sécurise les organisateurs de compétitions et de rassemblements, tant au niveau national que pour les importations et les exportations. Néanmoins, cette transparence nous fragilise parfois car elle est utilisée par certains de nos concurrents économiques d’autres pays pour nous dénigrer.

La transparence d’un réseau d’épidémiologie est une condition d’efficacité et donc de succès. Par conséquent, il est indispensable que le Respe continue d’œuvrer en toute exhaustivité. Il nous faut profiter de notre leadership et de la réussite du Respe pour enclencher un mouvement d’internationalisation européenne de la surveillance sanitaire de la filière équine. Les Irlandais ont le projet de fonder un “Irish Respe”… Le Respe sera, dans les années qui viennent, leader sur un rapprochement et une aide à la structuration des réseaux existants ou à créer dans d’autres pays.

Quelles évolutions envisagez-vous à l’avenir pour répondre à de nouveaux enjeux sanitaires ?

Au niveau national, la mise en place de la visite sanitaire obligatoire en filière équine devient un instrument indispensable de prévention, de surveillance et d’action. Cela participe pleinement à la professionnalisation sanitaire de la filière. Le Respe pourrait promouvoir une section équine au sein du FMSE5, avec pour mission d’indemniser les professionnels affiliés pour les incidents sanitaires selon les programmes d’indemnisation élaborés au sein de la section.

Au niveau Européen, le Respe doit s’inscrire dans une démarche d’entraînement des autres pays afin de fédérer une politique sanitaire équine commune.

1 Anémie infectieuse des équidés.

2 Institut français du cheval et de l’équitation.

3 Direction générale de l’alimentation.

4 Fédération nationale des courses françaises.

5 Fonds de mutualisation des risques sanitaires et environnementaux.