ENTRETIEN
PRATIQUE MIXTE
L'ACTU
Auteur(s) : PROPOS RECUEILLIS PAR MARINE NEVEUX
Quels sont les enjeux sanitaires majeurs auxquels vous êtes confronté aujourd'hui ?
Les enjeux sanitaires sont de différents ordres. Certains sont intrinsèques à l’espèce équine. Ainsi, les herpèsviroses posent de réelles difficultés : les vaccins n’ont pas un niveau d’efficacité comparable à ceux de la grippe (chez le cheval comme chez l’homme). La rhinopneumonie est un enjeu majeur chez le cheval, car c’est une maladie protéiforme, à réactivation, et il est difficile de protéger l’animal dès le jeune âge. Les herpèsviroses sont aussi un enjeu majeur en raison de la complexité des virus et de leurs variants.
En outre, le cheval est un athlète qui se déplace pour les compétitions, pour la reproduction, ainsi la zone à risque est démultipliée. La maîtrise de la biosécurité au niveau des entraînements, des compétitions, des organismes de vente, etc. est essentielle. Le vaccin contre l’herpès est un défi pour l’industrie pharmaceutique.
La grippe soulève la problématique des variants, comme en témoigne la survenue récente de nouveaux variants en Europe. La France est en avance sur cet enjeu sanitaire car la couverture vaccinale sur le territoire est élevée. Le Respe dispose aussi d’une grande efficacité puisqu’il s’appuie sur une organisation très performante de la filière équine et sur une culture française du sanitaire. La grippe équine reste un enjeu : celui de la réactivité face à l’apparition de nouveaux variants. Les vétérinaires sentinelles et Labéo sont très réactifs, les foyers sont restreints et la détection précoce font que le virus grippal n’a pas entraîné d’arrêt des rassemblements et des compétitions sur l’Hexagone (versus le Royaume-Uni, par exemple).
Les maladies bactériennes représentent moins d’enjeux sanitaires. La rhodococcose est un peu à part, car c’est un vrai défi pour l’élevage, et il est utile de mieux comprendre la bactérie et son “comportement” chez le poulain.
Enfin, les enjeux sanitaires, ce sont tous les agents pathogènes dont on ne connaît pas encore l’impact : les mycoplasmes, les moisissures, le microbiome du cheval, sa flore intestinale complexe.
La maîtrise de la reproduction reste un enjeu sanitaire permanent. Sa gestion est excellente en France en raison des contrôles de la semence et des juments ou étalons. Il n’y a pas de métrite et très peu d’artérite virale au sein des élevages de haut niveau sanitaire, les stud-books ne relâchant pas leur vigilance sur ces maladies
Comment la recherche et la collaboration avec les acteurs de la filière peuvent y répondre ? Quelles évolutions envisagez-vous à l'avenir ?
Avec le Respe, nous travaillons sur l’amont et l’aval. Comprendre le génome et comment l’individu se comporte par rapport aux agents pathogènes est un axe de recherche d’avenir.
Le Respe nous a aidés à nous perfectionner, à mettre beaucoup de moyens sur l’assistance et le développement. La recherche et développement de niveau universitaire mais liée étroitement à l’économie du cheval, c’est près de 15 équivalents temps plein et 5 % de notre budget réinvestit… depuis 15 ans, pour la santé animale et les vétérinaires.
Après 20 ans de collaboration avec le Respe, les partenariats se sont développés avec la recherche privée, les universités, l’Anses, l’IFCE1. Il faut peut-être consolider un cadre qui nous permette de nous réunir plus souvent, à l’instar de ce que fait l’Equine Industry Committee. Le pôle de compétitivité filière équine est aussi notre “voisin” de prédilection. Aujourd’hui, le GIS2 Centaure regroupe déjà 4 entités (70 chercheurs et 17 habilitations à diriger les recherches sur 3 campus dans le Calvados) ; le Fonds Eperon est un maillon essentiel au financement de projets de recherche. Demain, nous pourrions envisager de travailler avec un plus grand soutien de l’industrie, mais aussi de l’Inra3. Le Respe a la capacité de fédérer autour de la table tous les acteurs de la recherche équine.
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1 Agence nationale de sécurité sanitaire, Institut français du cheval et de l’équitation.
2 Groupement d’intérêt scientifique.
3 Institut national de la recherche agronomique.