PRATIQUE MIXTE
FORMATION
Auteur(s) : CLOTHILDE BARDE
CONFÉRENCIER
DENIS LECOMTE, UNION PROFESSIONNELLE VÉTÉRINAIRE (BELGIQUE)
Article rédigé d’après une conférence présentée lors du congrès de la SNGTV, en mai 2019.
Les maladies respiratoires sont les affections les plus fréquentes des jeunes bovins, à l’origine de pertes de production importantes. Ce constat s’explique par les spécificités anatomiques et fonctionnelles de leur appareil respiratoire qui contribuent à amoindrir leur résistance. Or, lors d’infections respiratoires (bactériennes ou virales), la réaction inflammatoire pulmonaire peut s’emballer et elle provoque alors une diminution des échanges gazeux (hypoxémie et hypercapnie), ainsi que des lésions pulmonaires irréversibles (à cause de dérivés de l’acide arachidonique, des cytokines, des enzymes protéolytiques, des radicaux libres). L’hypoxémie tissulaire se caractérise par une augmentation du métabolisme anaérobie à l’origine d’une acidose métabolique qui aggrave l’acidose respiratoire induite par l’hypercapnie et conduit à la très grande production de lactates1.
Pour faire face à ces phénomènes, l’oxygénothérapie est un traitement intéressant. Or, jusqu’à présent, elle est surtout utilisée pour les animaux de compagnie (cages d’oxygénothérapie). Cependant, comme l’a indiqué le conférencier, cette technique peut aussi être adaptée aux jeunes bovins. Ainsi, il propose d’utiliser un concentrateur en oxygène de type Respironics EverFlo® de Philips qui offre une concentration en dioxygène de 93 % (4,5 fois supérieure à celle de l’air) et un débit qui va de 0,5 à 5 l. Même si certaines niches à veaux offrent la possibilité d’être obturées relativement facilement, il conseille pour plus de facilité d’avoir recours à des “lunettes à oxygène” de médecine humaine plus longues et élargies au niveau de l’espace entre les deux canules intranasales. Selon lui, bien que peu documentée dans la littérature scientifique2,3,4, cette thérapie est très intéressante à utiliser chez les bovins comme complément à la lutte contre les agents infectieux, à la maîtrise de la réaction inflammatoire et à la correction des désordres mécaniques. De plus, pour classer l’atteinte respiratoire suivant son grade5 et déterminer le pronostic, il convient de mesurer la pression en dioxygène (PaO1), ainsi que les lactates sanguins2.
Grâce à l’apport de dioxygène par voie intranasale à l’animal, les valeurs pronostiques s’améliorent et, dans certains cas, une issue fatale peut même être évitée malgré un pronostic initial sombre. Ainsi, l’étude de Bleul6 montre que l’administration intranasale de dioxygène sur des veaux permet de remonter la PaO1 de 38 à 59 mmHg en 3 heures. Il propose une valeur seuil d’hypoxémie à 55 mmHg et conclu que si on remonte au-dessus de cette valeur en moins de 12 heures, neuf veaux sur dix survivent. De même, une autre étude7 démontre l’utilité de combiner l’administration de dioxygène à celle de surfactant chez des prématurés. Enfin, des essais réalisés sur des veaux clonés en détresse respiratoire ont montré qu’avec 67 à 421 ml de dioxygène par kg et par minute, leur état clinique était amélioré. En conclusion, l’hypoxie étant la cause principale de la mort lors de nombreuses affections respiratoires, l’apport d’oxygène doit être envisagé afin d’améliorer le taux de survie des animaux traités selon le conférencier. L’oxygénothérapie a donc sa place dans les stratégies thérapeutiques lors d’infections respiratoires chez les jeunes bovins, mais également chez les nouveau-nés (accouchement difficile ou tardif avec anoxie, détresse respiratoire aiguë…).
1. Coghe J. Evaluation de l’impact fonctionnel du complexe respiratoire bovin : validation de nouvelles technologies et critères objectifs du pronostic. Thèse vétérinaire. Liège, 2000. 180 pages.
2. Coghe J. Preliminary classification of the bovine respiratory disease complex into different levels of severity. Bovine practitioner. 1999;33:85-87.
3. Bleul U. Effect of intranasal oxygen administration on blood gas variables and outcome in neonatal calves with respiratory distress syndrome : 20 cases (2004-2006). J. Am. Vet. Assoc. 2008;233:289-293.
4. Brisville A. Respiratory disease in neonatal cloned calves. 2011;25:373-379.
5. Lekeux P. A therapeutic strategy for treatment of the bovine respiratory disease commplex : the rationale for the combination of a nonsteroidal anti-inflammatory drug with an antibiotic. British Cattle Veterinary Association. 2007;115-119.
6. Bleul U. Effect of intranasal oxygen administration on blood gas variables and outcome in neonatal calves with respiratory distress syndrome : 20 cases (2004-2006). J. Am. Vet. Assoc. 2008;233:289-293.
7. Karapinar T. Treatment of premature calves with clinically diagnosed respiratory distress syndrome. J. Vet. Intern. Med. 2008;22:462-466.