NOURRISSAGE, INTERACTIONS SOCIALES
PRATIQUE CANINE FÉLINE NAC
FORMATION
Auteur(s) : MARINE DHUNPUTH*, JULIE NICOLEAU**
CONFÉRENCIER
JAN HOOIMEIJER, PRATICIEN DANS UNE CLINIQUE RÉSERVÉE AUX OISEAUX, AUX PAYS-BAS.
Article rédigé d’après une conférence organisée en partenariat avec l’Afvac, l’Association of Avian Veterinarian s et Yaboumba Junior à l’ENVT, en octobre 2019.
La question de l’élevage des jeunes perroquets, ainsi que leur nourrissage à la main est un sujet important, puisque, bien que ce soit une activité lucrative florissante, elle n’est malheureusement pas toujours bien exécutée par manque de connaissances des compétences cognitives de cet animal, alerte Jan Hooimeijer, praticien aux Pays-Bas. Ce commerce s’est extrêmement bien développé au cours des dernières années, notamment grâce au bénéfice considérable que les éleveurs peuvent tirer de l’augmentation du nombre d’œufs par femelle. Toutefois, il en résulte de nombreux problèmes, notamment comportementaux, qui ont motivé des associations à agir. La Dutch Parrot Fondation, par ses nombreuses campagnes, a réussi à obtenir, depuis le premier juillet 2014, l’interdiction aux Pays-Bas de séparer un oisillon de ses parents tant qu’il n’est pas capable de se sustenter par lui-même. Cette législation existait déjà pour d’autres animaux comme les chiens et les chats et a pour vocation d’empêcher le phénomène d’imprégnation des jeunes. En effet, les premiers stades d’existence de l’animal sont cruciaux pour les interactions sociales et vont l’aider à se forger un répertoire comportemental qui l’accompagnera toute sa vie, d’où l’importance de respecter un certain délai avant de séparer les mères de leurs petits. Chez les chiens et les chats, il est de 7 semaines, contre 4 semaines seulement chez les lapins et 4 ans chez les chimpanzés. C’est une réglementation qui repose sur des données collectées sur les 15 dernières années. Il a été démontré scientifiquement que séparer précocement les jeunes perroquets de leurs parents aurait un effet néfaste sur leur santé et leur bien-être à long terme. Les animaux élevés par les humains avant le sevrage ont plus de problèmes comportementaux avec une proportion plus grande de troubles liés au sentiment d’insécurité et de peur, de réactions de morsure ou encore de picage convulsif… Il convient de rester très vigilant, car ces troubles comportementaux peuvent n’apparaître que des mois, voire des années, après la séparation, lorsque l’oiseau devient hormonalement actif. Par ailleurs, le perroquet reste une proie, c’est pourquoi la communication avec l’humain est parfois compliquée. En effet, nos yeux rapprochés et nos dents imposantes à chaque sourire donnent inconsciemment une posture considérée comme intimidante ou irrespectueuse vis-à-vis de l’oiseau. Or, gagner la confiance d’un perroquet est un processus qui peut prendre de nombreuses années mais reste un facteur clé de succès pour son approche et sa bonne contention.
élever à la main et nourrir des perroquets peut également être néfaste du fait des conditions même de cet élevage : il y a certes plus de couvées et plus d’oisillons dans les élevages entretenus par les humains qu’à l’état naturel, mais les animaux à l’âge adulte sont moins lourds et présentent souvent plus de problèmes de santé que leurs congénères en liberté. Dans certains cas, le mélange d’oiseaux différents en grand nombre fait naître des conditions propices à la propagation de maladies contagieuses. De plus, le stress important que peuvent subir les animaux dans ces élevages explique en partie la moindre viabilité des oiseaux. En effet, l’espérance de vie des perroquets est divisée par trois en captivité. Comme facteurs critiques peuvent être cités le manque d’interactions sociales, de soleil ou d’exercice, la malnutrition et un stress accru. à noter que la malnutrition est la plus grande cause de mort chez le perroquet. Enfin, à l’instar des élevages actuels de races canines ou bovines, les phénomènes de sélection génétique que subissent les animaux pour satisfaire le consommateur appauvrissent considérablement la variabilité génétique des perroquets et favorise la transmission de tares héréditaires.
Enfin, en plus des difficultés pratiques d’élevage, reste aussi l’importance des connaissances scientifiques qu’il faut avoir pour pouvoir élever convenablement un oiseau aux capacités cognitives comme celles du perroquet : moins anodin que cela ne puisse paraître, il s’agit d’un acte technique avec des points fondamentaux à respecter que sont notamment les interactions sociales, les sorties à l’extérieur ou encore une bonne maîtrise de la nutrition. Les interactions sociales sont indispensables, car ces animaux vivent en grands groupes, la compagnie d’autres oiseaux ou d’un autre être vivant est donc l’un des premiers critères à respecter en captivité. Dans ce but, aux Pays-Bas, des rencontres entre propriétaires de perroquets sont organisées dans les parcs : elles permettent non seulement aux oiseaux de se sociabiliser avec des animaux du même genre, mais aussi aux propriétaires d’échanger sur leur mode d’élevage et de partager leurs astuces. Les sorties à l’extérieur sont également l’une des conditions nécessaires au bien-être des oiseaux. Or, il n’est pas rare d’entendre des propriétaires possédant un perroquet depuis de longues années préciser : « Je le laisse sortir 15 à 20 minutes dans la maison de temps à autre ». Ces pratiques restrictives doivent être expliquées, car la santé et le comportement du perroquet en sont profondément affectés.
Un autre facteur critique est celui de la nutrition. En captivité, les aliments subissent des transformations artificielles et contiennent parfois certains pesticides agricoles, sans parler de l’équilibre alimentaire rarement respecté concernant les graisses et les minéraux. Les problèmes liés au plumage (perte, décoloration, etc.) sont les premiers signes d’appel d’une malnutrition. S’en suivent alors, parfois trop tardivement, des effets indésirables sur les griffes, une pousse excessive du bec ou encore l’apparition d’une goutte viscérale ou articulaire. En pratique vétérinaire, le conférencier conseille la gamme Harrison, qui est la seule alimentation biologique présente sur le marché, avec laquelle les perroquets atteints de malnutrition retrouvent un état satisfaisant seulement quelques mois après un changement alimentaire.